Relation élèves-professeurs / Liaisons dangereuses : Témoignages - Notre Continent
> NOTRE CONTINENT > - Confidence | Par Eva | Publié le 26/12/2022 05:12:37

Relation élèves-professeurs / Liaisons dangereuses : Témoignages

Les relations amoureuses prennent place dans des salles de classe au détriment de la transmission du savoir.

Certains enseignants ne gardent plus la distance avec leurs élèves ou leurs étudiantes. Ils usent d’astuces pour les convaincre de sortir avec eux. Beaucoup d’histoires de ce genre tournent mal. Des filles et des étudiantes lèvent un coin du voile du modus operandi des Dandy des temps modernes.

L’eau a coulé sous les ponts dans les établissements scolaires et d’enseignement supérieur. On ne cultive plus la distance entre le professeur et son élève ou entre son étudiante. La nature des rapports a connu une profonde et regrettable mutation. De nos jours, on ne compte plus des lycéennes qui n’hésitent pas à draguer ceux censés leur transmettre le savoir. En lieu et place du savoir et des connaissances, l’amour domine les discours. Les cas de relations amoureuses entre un enseignant et sa collégienne ou entre un professeur et son étudiante qui finissent en eau de boudin font légion. Dans certaines contrées, des enseignants se sont retrouvés derrière les barreaux pour détournement de mineur. Alors que d’autres pour échapper à la prison ou à l’inquisition de la société ont décidé d’épouser la fille, des suites d’une grossesse. L’histoire récente nous rappelle qu’un professeur d’Education Physique et Sportive ( Eps) a été arrêté pour avoir engrossé plusieurs élèves dans la région de Sédhiou. C’est un cas parmi tant d’autres. Un tour au Lycée John Fitzgerald Kennedy, composé de filles, le sujet divise nos interlocutrices. Dans cet établissement, Fanta Bâ, élève en première L2 s’offusque des déductions hâtives à ce sujet. Leur établissement se distingue par l’excellence. Elle ne comprend pas comment une collégienne peut entretenir des relations amoureuses avec son maître. « Cela me paraît assez bizarre qu’un élève censé quitter la maison pour aller à l’école acquérir des connaissances puisse sortir avec son professeur sans se soucier des inconvénients et des rumeurs que cela pourrait créer. Parce que, c’est interdit même si je reconnais qu’un professeur est un être humain comme tout le monde et que le cœur a ses raisons », affirme Fanta Bâ. Elle reconnaît que parfois ce sont des rumeurs que certains cherchent coûte que coûte à transformer en vérité. « La plupart du temps, ce sont des rumeurs entretenues et transmises de bouche à oreille. Et, en général, c’est juste fondé sur des simples faits et gestes qui n’ont rien de concret. Et, les gens se mettent à tirer des conclusions hâtives alors que rien n’est vrai. En tout cas, je n’ai jamais eu de preuves sur ces rumeurs », précise-t-elle. Fanta Bâ n’épargne pas aussi certaines de ses camarades qui dépassent le cadre d’un rapport entre la collégienne et son enseignant. « C’est vrai qu’actuellement, les élèves ont beaucoup d’audace parce que parfois, ce sont elles qui provoquent. Mais dans tous les cas, c’est au professeur d’avoir de la retenue, savoir ne pas réagir », a estimé Fanta Bâ. Dans le cas de figure où le professeur ne peut pas résister, il peut demander la main de l’élève ou de l’étudiante.

Témoignage et vécu

C’est tout le contraire de cette demoiselle. Cette étudiante en licence 3 dans une école de formation de la place que nous avons interrogée et qui a préféré garder l’anonymat est totalement contre ses relations. De son côté, elle soutient que ce sont des relations à bannir complètement dans les milieux scolaires. Victime de cette situation deux fois, elle raconte sa mésaventure. « Ils ne sont pas sérieux. Ils cherchent juste un complément parce qu’ils ont à la maison leurs femmes. Ils cherchent juste un objet pour jouer. J’ai vécu cette situation avec mes deux professeurs. L’un, c’était en classe de première et l’autre c’est actuellement à Dakar, dans une école de formation de la place. Mais, j’ai refusé de m’engager dans ses relations amoureuses entre professeur et élève ou entre professeur et étudiant. En fait, la première fois, c’est avec mon professeur de Svt en classe de première. Il avait les yeux rivés sur moi dès notre premier jour de devoir. Une fois que tous les élèves ont rendu leur copie, il ne restait que moi dans la classe. Il ne cessait de me fixer moi je n’avais pas vu parce que j’avais les yeux fixés sur ma copie maintenant comme j’étais trop même lente à l’écriture donc j’étais la dernière à avoir rendu ma copie et il ne restait que lui et moi dans la classe. Une fois que j’ai rendu ma copie, il a levé sa main j’ai déposé ma copie, le temps de retirer ma main, il a posé sa main sur la mienne en disant est-ce que je peux avoir ton numéro. Une fois encore dehors, on était censé prendre le même chemin, il a insisté en répétant ‘’donne-moi ton numéro’’. J’ai refusé. A la fin de l’année, j’ai passé en classe de terminale maintenant pour récupérer nos notes, c’est là qu’il a eu mon numéro parce qu’il a donné toutes les copies. Il a fait exprès de ne pas me donner ma note », rapporte la demoiselle. Elle n’avait pas d’autres choix que de donner son numéro de téléphone.

Une note de 19 en SVT rejetée par la fille

Un autre jour, ce même professeur a rendu toutes les notes de la classe en feignant d’oublier celle de l’étudiante. Par la suite, il demande à la classe qui n’a pas reçu sa note. « J’ai levé la main, toi la responsable oui, il me dit pourquoi alors quand on était seul, quand je t’appelle, tu ne réponds pas ? Je lui dis monsieur s’il vous plaît rendez-moi ma note je vais aller rejoindre mes camarades avant qu’ils ne rentrent sans moi. Il dit d’accord, tu as eu une très bonne note. Tu as eu 19. J’ai dit 19 SVT, je n’ai pas eu cette note. Il me dit si tu as travaillé, tu as une très bonne note j’ai dit Monsieur, je ne mérite pas cette note », confie-t-elle. Le professeur a fini par lui attribuer une note de 10.

« J’ai récupéré ma copie et je suis rentrée chez-moi. Même en cours de chemin, il ne cessait de m’appeler en disant tu sais que tu es la plus belle de la classe. Mais j’ai eu le courage de l’affronter car j’ai dit non et quand je dis non c’est non et heureusement par la suite, il l’a compris », a-t-elle narré.

Autre lieu, autre histoire. Un professeur d’anglais n’avait d’yeux pour son élève. Le premier jour, il pose ses pions en organisant un simulacre d’élection de désignation de la responsable de la classe. Il choisit trois candidats parmi eux, une candidate. Il a fait son choix, reste à savoir, si la classe le validera. « Coming, nous, on a commencé », lui avait dit le prof, le premier jour. Elle poursuit : « Comme je suis la fautive, je suis restée bouche bée. Il ne cessait de me regarder. Par la suite, il m’a interrogé et j’ai trouvé. A la pause, je suis sortie avec mes deux copines. On s’est dirigé vers la buvette pour boire du café et il nous a rejoints là-bas. Moi, j’achetais du café avec deux copines, ça fait trois tasses de café. Je sors mon argent pour payer, il vient et dit à la dame : c’est moi qui paie et il a payé toutes les trois tasses de café donc j’ai dit merci. Après la pause, on est dans la salle et comme il n’avait encore pas responsable et le prof a dit, il faut que vous trouviez ou un ou une responsable qui est partante ? personne n’a répondu », fait savoir la collégienne.

Le schéma a fonctionné. Le professeur a alors mille prétextes de jeter son dévolu sur cette fille parmi d’autres candidatures. « Mademoiselle toi, au fond viens ici. Je me suis levée tout en me disant moi et il me dit oui ! J’ai hésité quand même parce venir le premier jour de cours, ce n’est pas évident de se présenter devant tes camarades de classe. Mais il insista en répétant en Anglais coming et je me suis mise devant, il dit une autre personne ne répond, un autre, personne ne répond, il a désigné deux autres camarades de classe pour leur demander de me rejoindre au tableau, nous étions trois », relate la collégienne. Les conditions d’une élection sont réunies. Mais le vainqueur est connu d’avance comme dans nos démocraties.

Une déclaration d’amour voilée à l’issue du vote

« J’ai remporté par chance et j’ai été désignée responsable. Et, il me dit tout de suite, je savais que les élèves allaient te choisir parce que déjà, tu es présentable, tu es souriante, tu es accueillante. J’ai ri et j’ai laissé passer. A la fin du cours, il devait remplir le cahier et je devais l’attendre pour déposer cela. C’est là qu’il a pris mon numéro. Vers minuit, il m’appelle pour me dire, tu habites où ? je lui dis pourquoi et il me dit est-ce que je peux venir te rendre visite sinon tu sors on part quelque part. Je dis mais tu as vu l’heure qu’il fait et partir où et pourquoi ? J’ai raccroché. Il me rappelle encore. Est-ce que tu sais que je suis tombé amoureux de toi. Je lui ai répondu : Monsieur, je suis désolée mais je ne suis pas dans ça. Il a insisté deux jours et après, il a compris que je n’avais pas de ressenti envers lui et il l’a laissé tomber », raconte -t-elle.

La morale, l’éthique et de la déontologie en question

L’enseignante à la retraite, avec un capital d’expériences d’une trentaine d’années dans les écoles privées catholiques, Mme Iguette Deg Bouée, estime que ce sont des comportements à bannir. Les raisons sont simples : l’enseignant est tenu d’avoir un regard sain sur l’élève, sur l’étudiante.

La morale tout comme l’éthique et la déontologie sont à l’opposé de ces comportements. Le professeur a une posture de parent devant ses élèves et ses étudiantes. C’est un éducateur. Au passage, l’enseignante à la retraite revisite des concepts. Eduquer, c’est-à-dire, inculquer à l’élève des valeurs essentielles qui vont lui permettre un jour d’affronter la vie et de devenir un jour ce qu’on appelle un « honnête homme » c’est-à-dire quelqu’un qui a dû savoir et qui s’est aussi comporté dans la vie en faisant la différence entre le bien et le mal. « Il faut toujours préserver cette grandeur, cette pureté, le côté sans équivoque parce qu’au cas où il y aurait équivoque, autant pour l’élève que le professeur, il pourrait y avoir un sérieux problème », précise Mme Iguette Deg Bouée.

Le mieux pour elle, c’est de préserver la distance, d’éviter d’être très proche des élèves. « Je pense que les anciens avaient compris cela mais peut-être que les nouveaux font moins attention à ces règles. Ce qui provoque des malentendus qui finissent mal ou par des scandales. La salle de classe, l’école sont des lieux sacrés pour moi, pour les gens de ma génération », compare l’enseignante. Rien ne saurait justifier un manquement à certains principes surtout si l’on exerce un métier noble : la transmission du savoir. « Dans un temple du savoir, on ne doit que s’occuper du savoir. Il faut uniquement avoir des relations pédagogiques », tranche Mme Iguette Deg Bouée.

L’indécence, familiarité, langage verbal, vulgarité, l’une des raisons principales

Il est nécessaire de proscrire ces comportements pouvant remettre en question l’image de l’école, d’un établissement d’enseignement. Pour ce faire, l’enseignant doit jouer son rôle dans la préservation de la notoriété de l’institution. « Il est important que les enseignants se rappellent, se souviennent qu’ils contribuent à cette image de l’institution et qu’il faut préserver. Nous avons de plus en plus des enseignants jeunes dans les salles de classe. Ils doivent comprendre qu’ils ont un devoir vis-à-vis de l’institution, des parents, vis-à-vis de l’élève aussi. Ils doivent, par leurs comportements, se rattacher à cette déontologie-là, l’enfant est sacré, la mission qu’on leur a confiée est sacrée et qu’il doit absolument la rendre positive », indique Mme Iguette Deg Bouée.

Le port vestimentaire des jeunes filles, des pantalons moulants, des jupes courtes sont incriminés. Mais cela ne doit pas être une justification. L’enseignant jusqu’à la preuve du contraire est doué de raison et il est capable de résister à la tentation. « Il faudrait que les parents, le corps professoral, l’institution s’appliquent à respecter les normes. Mais cela ne devrait en aucun moment être une raison pour que les enseignants dérogent à la règle, il faudrait peut-être conseiller ces jeunes filles », propose l’enseignante.

Depuis quelques années, Iguette Deg Bouée a constaté une familiarité langagière. La vulgarité a pris la place de la pudeur. « La vulgarité prend de l’ampleur. Le tissu social est en train de s’effriter. Il n’y plus de respect entre les différentes générations et les genres. Il y a une familiarité constante, une vulgarité ambiante qui fait que même au sein de l’école, les règles ne sont plus respectées », a constaté avec regret, l’éducatrice.


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