Kankourang : Un mythe préservé de génération en génération à Mbour - Notre Continent
> NOTRE CONTINENT > - Art & Culture | Par Eva | Publié le 08/02/2023 03:02:00

Kankourang : Un mythe préservé de génération en génération à Mbour

Le mythe du Kankourang, un personnage qui désigne, à la fois, un masque et un rituel célébrant la circoncision parmi les Mandingues, continue à être jalousement préservé à Mbour, un des départements de la région de Thiès (ouest).

Les non-initiés connaissent peu de chose de ce personnage. A Mbour, même les responsables de la communauté Mandingue en charge de la conservation de ce rite culturel n’en savent pas davantage.


Seuls des membres d’un comité de sages regroupant des vieux âgés de plus 70 ans sont au contact de ce personnage qui apparaît habituellement en septembre, la période de la circoncision chez la communauté Mandingue de Mbour. Un mystère.

D’ailleurs, dire peu de chose à son père et ne rien révéler à sa mère, après la sortie de la case des circoncis, demeure le principal procédé ayant contribué à la préservation du mythe autour du Kankourang, introduit à Mbour au début du 20e siècle, précisément en 1904.

D’ordinaire interdit d’accès aux femmes pendant les périodes de circoncision, le local abritant les secrets du Kankourang dans le quartier Médine extension à Mbour a été exceptionnellement ouvert à une équie de journalistes de l’Agence de presse sénégalaise dans le cadre des préparatifs du Conseil des ministres que doit abriter jeudi Thiès, la capitale régionale.

D’après Aps, l’isolement de l’endroit et son bosquet touffu que le visiteur est invité à découvrir, ainsi que l’espacement de ses bâtiments sont à l’image du mystère qui entoure le Kankourang.

Démarche nonchalante, de loin identifiable par son bonnet rouge assorti de cauris, des gris-gris sur le corps et la corne entre les mains qu’il présente comme un de ses moyens de communication avec les anciens, Cheikhou Koté est le maitre des lieux. Il est le doyen d’âge de la communauté mandingue à Mbour.

Président du conseil des sages, organe délibératif de tout ce qui concerne le Kankourang, le vieux Koté s’exprime en langage codé, pour ne pas dire inaccessible aux non-initiés. ‘’Les anciens vous ont remis un tapis sur lequel ils étaient assis, tachez de le remettre intact aux générations futures’’, lance le vieux en langue mandingue, invitant avec autorité un de ses neveux présents sur les lieux à faire la traduction.

Durant les cases de circoncision, ‘’l’enfant est inculqué de valeurs qui vont le suivre durant toute sa vie’’, indique-t-il.

A sa sortie de cette retraite culturelle, l’enfant est invité ‘’à dire peu de chose à son père et à ne rien révéler à sa mère’’, ajoute le gardien du temple, devant les acquiescements de Fatou Faty. Comme pour confirmer les dires de son grand-père ou dénoncer ce procédé discriminant.

Né en 1936, Cheikhou Koté soutient que le Kankourang est arrivé au Sénégal en 1904 par l’entremise de notables mandingues établis à Mbour dont son père Mady Koté. Son introduction au Sénégal ferait suite à des fléaux marqués notamment par des morts d’enfants et de femmes en couches, rappelle Mamadou Aidara Diop.

Le secrétaire général de la Collectivité mandingue à Mbour ajoute que ses ancêtres, désemparés devant ces fléaux, avaient dépêché une délégation composée de mandingues pour retourner puiser dans les savoirs endogènes en vue de trouver un remède contre ces catastrophes naturelles. La délégation partie à Gabu est revenue avec le kankourang, a-t-il poursuivi.

C’est depuis 1904 que le Kankourang est célébré à Mbour à des fins ‘’thérapeutiques’’ et ‘’protectrices’’, indique M. Diop.

Le secrétaire général de la collectivité note toutefois que sa structuration actuelle à travers le septembre mandingue remonte en 1990.

La convergence culturelle comme outil de diplomatie dans la sous-région

Le Kankourang est admis depuis 2005 au patrimoine immatériel de l’UNESO, l’organisme des Nations unies en charge de la protection des cultures, renseigne l’ancien cadre de la Sonatel.

Mamadou Aidara Diop note que l’activité se faisait traditionnellement après les récoltes. Mais avec le temps, le mois de septembre a été choisi pour la célébrer en période de vacances et pouvoir enrôler les élèves pendant un mois sans entrave sur le calendrier scolaire.

Visiblement préoccupé par la sauvegarde de sa culture, Mamadou Aidara Diop n’a pas manqué de déplorer la ‘’profanation’’ du Kankourang dans certaines activités commerciales. Cette pratique, déplore-t-il, n’est en aucune manière liée à une ‘’manifestation culturelle’’, mais constituerait une ‘’banalisation’’ de cet objet mystique chez les mandingues.

Parlant d’un modèle d’éducation qui devrait permettre de retourner à l’orthodoxie, le secrétaire général de la collectivité mandingue invite les Etats africains à davantage utiliser ‘’les ressources culturelles’’ dans les processus de résolution des conflits sur le continent.

Il faisait notamment allusion à la présence de la communauté Mandingue dans beaucoup de pays africains, à l’instar du Burkina Faso, du Mali, du Sénégal, de la Gambie, de la Guinée, de la Guinée Bissau, de la Côte d’ivoire, entre autres.

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