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La semaine dernière, la France a convoqué l’ambassadrice d’Italie, Emanuela D’Alessandro, pour exprimer son désaccord face aux propos jugés « inacceptables » de Matteo Salvini à l’encontre d’Emmanuel Macron. Le vice-Premier ministre italien avait moqué l’idée d’envoyer des troupes européennes en Ukraine, en invitant le président français à « mettre un casque, un gilet pare-balles et un fusil » et à partir lui-même sur le terrain.
Ce qui aurait pu passer pour un simple échange d’invectives diplomatiques cache en réalité une menace plus sérieuse : chaque querelle entre partenaires européens renforce la position de Vladimir Poutine et fragilise l’Union européenne.
Paris et Rome, en s’affrontant publiquement, offrent à Moscou l’image d’un continent divisé, incapable de faire front commun face à l’agresseur russe. Ce désaccord n’est pas anodin : il souligne l’échec collectif de l’Europe à dépasser ses égos pour protéger ses intérêts stratégiques.
Depuis le début du conflit en Ukraine, l’Europe s’est efforcée de montrer une unité de façade, notamment à travers les sanctions économiques contre la Russie et le soutien militaire à Kiev. Cependant, cette cohésion fragile a rapidement montré ses limites dès que l’idée d’un engagement direct, tel que l’envoi de troupes européennes, a été évoquée. La France, soutenue par le Royaume-Uni, propose une « coalition des volontaires » afin d’assurer la sécurité de l’Ukraine après un éventuel accord de paix. Cette initiative, ambitieuse mais risquée, divise profondément le continent. L’Italie, en revanche, exclut toute participation, tandis que Matteo Salvini, chef de la Ligue et partisan historique du Kremlin, choisit la provocation pour relayer un message d’hostilité envers Paris. Ses déclarations outrancières, qualifiant les propositions françaises de « macronades », n’ont rien d’anodin et visent à discréditer l’idée même d’une défense collective européenne.
Salvini n’est pas un provocateur isolé ; il agit en relais, volontaire ou non, de la propagande russe. Ses attaques reprennent les éléments de langage du Kremlin, qui dépeint l’Europe comme divisée, belliqueuse et dirigée par des responsables irresponsables. L’ancrage pro-russe de la Ligue se confirme par des liens réguliers avec le parti Russie unie, de Vladimir Poutine, et par une rhétorique systématiquement alignée sur les intérêts russes. Refuser toute implication militaire, présenté comme un acte de réalisme, s’inscrit donc directement dans la stratégie de Moscou : exploiter les divisions occidentales pour affaiblir Kiev et prolonger le conflit à son avantage.
De son côté, Emmanuel Macron, en appelant à une possible intervention, commet une erreur symétrique. En mettant sur la table la menace militaire, il fournit à Moscou un prétexte pour dénoncer une Europe « agressive » et justifier sa propre militarisation. Ce paradoxe cruel illustre la difficulté pour l’Union européenne de coordonner ses actions : tandis que la France cherche à renforcer la dissuasion, elle se retrouve isolée et peine à rallier ses partenaires, même au sein de l’OTAN. L’initiative française, au lieu de fédérer, divise et affaiblit la crédibilité européenne sur la scène internationale.
Plus préoccupant encore, cette querelle franco-italienne met en lumière l’incapacité chronique de l’Europe à parler d’une seule voix. Entre les pays prônant une fermeté absolue comme la Pologne ou les États baltes et ceux qui freinent des quatre fers, comme l’Italie ou la Hongrie, l’UE se retrouve paralysée. Ce scénario rappelle d’autres crises passées, telles que la guerre en ex-Yougoslavie ou la crise migratoire, où les divisions internes ont systématiquement profité aux régimes autoritaires et aux adversaires de l’Europe. Aujourd’hui, Kiev a besoin d’une stratégie claire, de soutien militaire et économique, mais l’Europe se perd dans des débats stériles.
La crise actuelle doit servir d’électrochoc. Paris et Rome ne peuvent plus se contenter d’affrontements rhétoriques. Il est impératif de recentrer le débat sur ce qui unit encore l’Europe : soutien économique et militaire à l’Ukraine, sanctions contre la Russie et préparation d’un plan de paix crédible. Les dirigeants italiens, en particulier Giorgia Meloni, doivent assumer leurs responsabilités et clarifier leur position, au risque de voir leur pays devenir un maillon faible de l’UE.
La querelle franco-italienne dépasse largement le cadre diplomatique. Si Paris et Rome continuent à s’affronter, ce ne seront pas Macron ou Salvini qui paieront le prix, mais l’Ukraine et, à terme, la sécurité de tout le continent. L’Europe a déjà perdu assez de temps : il est urgent qu’elle retrouve l’unité et la cohérence dont elle a cruellement besoin pour contrer Moscou et protéger ses intérêts stratégiques.
Article opinion écrit par le créateur de contenu : Philippe G.
Mis en ligne : 01/09/2025
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