Depuis le début de la guerre à Gaza, l’émirat du Golfe est l’acteur-clé de la médiation entre le Hamas palestinien et Israël. Ses efforts, soutenus par l’Égypte et les États-Unis, ont permis une trêve et des libérations d’otages en novembre 2023. Mais depuis, les discussions n’ont donné aucun résultat.
Les bombardements israéliens meurtriers de ces derniers jours à Rafah, dans le sud de la bande de Gaza, ont entraîné le report de négociations prévues en cette fin du mois de mai au Qatar.
Elles avaient été convenues dans la foulée d’une rencontre à Paris entre le chef des renseignements israéliens (Mossad), David Barnea, son homologue américain de la CIA, William Burns, et le Premier ministre du Qatar, Mohammed ben Abderrahmane Al-Thani.
Pour le Hamas palestinien, hors de question d’accepter des pourparlers indirects avec Israël en pleine escalade. Ce n’est pas la première fois qu’un pic de violence dans la guerre à Gaza paralyse le processus de négociation, déjà extrêmement fragile et incertain.
Le Qatar héberge le Bureau politique du Hamas depuis bientôt deux décennies. Et c’est à la demande des États-Unis que le richissime émirat gazier a endossé ce rôle de médiation entre le mouvement islamiste palestinien et Israël. Une démarche qui s’inscrit dans l’ADN diplomatique du pays, toujours prompt à travailler comme intermédiaire entre des interlocuteurs opposés, parfois ennemis.
Quelques semaines après les attaques du Hamas du 7 octobre 2023 et le déclenchement de la guerre à Gaza, les discussions indirectes incluant la médiation du Qatar ont permis une trêve d’une semaine, assortie de la libération de 80 otages israéliens retenus à Gaza, en échange de la libération de 240 détenus palestiniens par Israël. Aujourd’hui, les discussions portent sur le sort de 125 otages israéliens détenus à Gaza, dont 37 sont considérés comme morts, chiffre qui pourrait s’avérer plus élevé.
Si la situation militaire à Gaza pèse sur les négociations pour une trêve, elles achoppent depuis des mois sur un obstacle essentiel : pour le Hamas, l’issue des pourparlers doit impérativement être la fin de la guerre, ce sur quoi Israël refuse de s’engager.
Au sein du Hamas, seule la direction politique, avec Ismaïl Haniyeh à sa tête, dialogue avec les médiateurs qatariens. Mais le Hamas à Gaza, dirigé par Yahya Sinwar et par l’énigmatique Mohammed Deif pour la branche militaire, est consulté par leurs partenaires en exil. Ce qui occasionne parfois des délais de plusieurs jours dans la circulation des propositions et des réponses, les chefs du Hamas à Gaza étant cachés depuis des mois dans le dédale de tunnels creusés par le mouvement.
Le Qatar est régulièrement critiqué – en Israël et en Occident – pour sa proximité avec le Hamas. Il lui est souvent reproché son soutien financier aux Palestiniens de Gaza au cours de la décennie écoulée. Des centaines de millions de dollars qui auraient servi in fine à financer les armes et les tunnels du Hamas.
Un reproche qui fait bondir les officiels qatariens, qui assurent que les millions de dollars versés chaque mois étaient soigneusement contrôlés. Des sommes affectées à la reconstruction, à la fourniture en énergie et à la subsistance de familles gazaouies parmi les plus pauvres. Des versements obéissant à un mécanisme « très strict », approuvé « par Israël et par l’ONU » selon le Qatar.
Face aux critiques – venues notamment de parlementaires américains – le Qatar a récemment menacé de « réévaluer » son rôle de médiateur entre Israël et le Hamas, rappelant dans un communiqué qu’il œuvrait à la demande de son allié américain (dont il héberge par ailleurs la plus importante base militaire dans la région). L’incident semble désormais clos et le Qatar poursuit ses efforts, avec l’Égypte et les États-Unis.
Doha se projette aussi dans l’après-guerre : avec d’autres pays arabes (Arabie saoudite, Émirats arabes unis, Égypte, Jordanie), le Qatar planche sur l’idée d’un gouvernement palestinien de technocrates, choisis par les différents partis palestiniens, pour gouverner la Cisjordanie (occupée par Israël) et la bande de Gaza pendant deux ans. Période à l’issue de laquelle des élections palestiniennes seraient organisées (la dernière présidentielle remonte à 2005, les dernières législatives à 2006).
Article écrit par : Cira Sow
—
La plateforme NOTRECONTINENT.COM permet à tous de diffuser gratuitement et librement les informations et opinions provenant des citoyens. Les particuliers, associations, ONG ou professionnels peuvent créer un compte et publier leurs articles Cliquez-ici.





