La récente déclaration du président turc Recep Tayyip Erdogan concernant l’accueil des réfugiés, faite lors de sa rencontre avec le chancelier allemand Olaf Scholz, a de quoi surprendre.
Alors que la Turquie a officiellement tourné la page de sa politique d’ouverture aux réfugiés, Erdogan a affirmé que les portes de la Turquie restent « toujours ouvertes », notamment pour ceux venant de Syrie ou du Liban en cette période de conflit dans la région. Une déclaration surprenante qui semble en décalage avec le discours officiel turc de ces derniers mois.
Depuis quelques années, la Turquie a adopté une ligne plus stricte en matière d’immigration. Le ministère de l’Intérieur turc a déclaré ne plus enregistrer de réfugiés syriens depuis juin 2022 et a présenté le retour de près de 690 000 Syriens comme une mesure volontaire et réussie. Le pays, qui abrite encore plus de trois millions de réfugiés syriens, affiche un discours ferme : « plus aucun réfugié ». Cependant, les propos d’Erdogan lors de cette conférence de presse marquent un tournant dans ce discours, à un moment où la guerre au Proche-Orient s’intensifie et où la Turquie se retrouve en première ligne des flux migratoires.
Cette prise de position peut être interprétée de plusieurs manières. D’un côté, Erdogan pourrait chercher à rappeler à l’Europe l’importance du rôle que joue la Turquie dans la gestion des flux migratoires, notamment dans le cadre de l’accord de 2016 entre Ankara et Bruxelles, qui visait à limiter l’arrivée de réfugiés en Europe.
En maintenant que la Turquie reste ouverte aux réfugiés, Erdogan semble adresser un message indirect aux Européens : la gestion des migrants reste une question clé dans les relations avec l’Union européenne, et un soutien à la Turquie dans cette gestion, notamment sur le plan économique et politique, pourrait être exigé en contrepartie.
D’un autre côté, ces propos risquent de créer des tensions internes. La population turque, de plus en plus hostile aux réfugiés, perçoit ces derniers comme des concurrents économiques dans un contexte de crise économique marquée par l’inflation et la hausse du chômage.
Cette hostilité a déjà conduit à des violences anti-syriennes et à une montée du sentiment xénophobe dans certaines régions du pays. En insistant sur l’ouverture des frontières, Erdogan pourrait s’attirer des critiques au sein de la société turque, mais aussi de la part de l’opposition politique, qui a régulièrement critiqué sa gestion des réfugiés.
Cependant, Erdogan est un fin stratège. En choisissant de tenir un tel discours devant Olaf Scholz, il pourrait chercher à utiliser cette question comme levier dans les négociations avec l’Europe. Le président turc sait que la majorité des réfugiés en Turquie ne souhaite pas y rester.
Leur objectif est souvent de rejoindre l’Europe, où les conditions d’accueil et les perspectives d’avenir semblent plus favorables. En maintenant une politique d’ouverture apparente, Erdogan pourrait ainsi mettre la pression sur les pays européens pour qu’ils prennent leur part de responsabilité dans la gestion des flux migratoires.
Article opinion écrit par le créateur de contenu : Faye’s
Mis en ligne : 24/10/2024
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