L’État complice de la vulgarité ? : L’ère des insulteurs publics - Notre Continent
> NOTRE CONTINENT > - Politique | Par Eva | Publié le 08/05/2025 12:05:15

L’État complice de la vulgarité ? : L’ère des insulteurs publics

Il fut un temps où l’on aspirait à la grandeur dans la sphère publique. Où l’engagement, le savoir et l’exemplarité guidaient l’action politique. Ce temps semble révolu. À sa place émerge une ère étrange où les « insulteurs publics » accèdent au rang de notables, flanqués d’un vernis de respectabilité, parfois même de reconnaissance institutionnelle. Il ne s’agit plus de simples provocateurs isolés sur les réseaux sociaux, mais de véritables figures, recyclées par le pouvoir pour divertir, détourner ou salir.

Azoura Fall, pour ne citer que le dernier nom en date, n’est qu’un maillon de cette chaîne de dégradation. Loin d’être marginal, il est devenu un visage familier, naviguant dans les cercles proches du Premier ministre. Avant lui, d’autres ont été adoubés par le pouvoir, invités dans les palais, souriants aux côtés de ceux qui devraient incarner l’État. Kaliphone, tiktokeuses grossières, pseudo-humoristes de l’invective… Tous ont eu leur instant de gloire aux frais de la République.

La vraie question n’est pas pourquoi ils insultent. La vraie question est : pourquoi ceux qui gouvernent les élèvent-ils ? Pourquoi nos dirigeants préfèrent-ils la vulgarité au mérite, l’agitation au discernement, le buzz à la hauteur ? Ce n’est plus un simple problème de communication, c’est une faillite morale.

Mais que personne ne s’y trompe : ce climat est entretenu délibérément. On ne s’entoure pas d’insulteurs publics sans raison. Ils sont les chiens d’attaque d’un pouvoir qui refuse le débat mais adore l’intimidation. Ce sont des outils de disqualification, des armes de distraction massive.

Pourtant, quand ils dépassent les bornes, comme souvent, on feint la surprise. Pire, on utilise la justice à contre-emploi : lourdes poursuites ici, indifférence ailleurs. Un combattant de MMA crie « F*ck Macron » à Paris ? Rien ne se passe. Au Sénégal, un mot déplacé envers un dirigeant peut vous envoyer en prison. Deux poids, deux mesures. Non pas pour préserver l’ordre, mais pour maintenir une hiérarchie malsaine entre citoyens : ceux qui ont le droit de parler mal, et ceux qui doivent se taire.

Il faut dire les choses : la République sénégalaise s’abîme dans cette logique. En se compromettant avec la médiocrité, elle se ridiculise. En faisant la part belle aux injures, elle abdique sa mission éducative. Ce n’est pas à un État digne de ce nom de tendre le micro à ceux qui rabaissent la parole publique.

Nous ne devons plus nous taire. Il est temps de dénoncer cette stratégie cynique. Il est temps de refuser la banalisation de la vulgarité sous couvert de liberté d’expression. Il est temps de rappeler que la politique est une chose sérieuse, qui engage l’avenir de notre jeunesse, notre image collective, et la dignité de notre vivre-ensemble.

Ceux qui veulent un autre Sénégal doivent oser le dire : les insulteurs ne sont pas des modèles. Et ceux qui les promeuvent trahissent l’idée même de la République.

Article opinion écrit par le créateur de contenu : Pape Sané.
Mis en ligne : 08/05/2025

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