Le Rwanda affirme être en pourparlers avec l’administration Trump concernant l’accueil des migrants expulsés des États-Unis. Ce projet, encore à l’état embryonnaire, s’inscrirait dans une démarche similaire à celle, avortée, conclue avec le Royaume-Uni, qui prévoyait l’installation de demandeurs d’asile sur le sol rwandais.
Les négociations actuelles témoignent d’une volonté américaine d’externaliser davantage sa politique migratoire, en envoyant des migrants vers des pays tiers. Si des accords ont été conclus avec des États d’Amérique centrale comme le Costa Rica ou le Panama, aucune entente majeure n’avait encore été annoncée avec des pays d’Afrique, d’Asie ou d’Europe.
Le ministre rwandais des Affaires étrangères, Olivier Nduhungirehe, a confirmé les discussions avec Washington, précisant qu’elles s’inscrivent dans l’engagement du Rwanda en faveur de solutions durables en matière migratoire. Toutefois, les détails de l’accord, notamment sur le financement, l’intégration sociale ou la sécurité juridique des personnes concernées, n’ont pas été rendus publics.
Ce projet d’accueil des migrants expulsés soulève de nombreuses critiques. Amnesty International a exprimé de vives inquiétudes, évoquant des risques de violations des droits fondamentaux, en particulier le principe de non-refoulement inscrit dans la Convention de Genève. L’organisation rappelle que le Rwanda est régulièrement accusé de réprimer violemment les dissidents, y compris des exilés rwandais à l’étranger.
« Ce type d’accord présente un risque élevé de violations du droit international », avertit Christian Rumu, responsable des campagnes à Amnesty. Il cite notamment les lacunes persistantes dans le traitement des demandes d’asile au Rwanda, malgré des réformes annoncées.
Le précédent accord entre le Rwanda et le Royaume-Uni a été annulé après des recours juridiques et un changement de gouvernement à Londres. Bien que jamais mis en œuvre, il a coûté aux contribuables britanniques plus de 700 millions de livres. Le Rwanda, de son côté, a déclaré ne pas être tenu de rembourser ces sommes.
À l’heure où Kigali se positionne comme un partenaire de choix pour l’accueil des migrants expulsés, des zones d’ombre subsistent sur sa capacité réelle à offrir des conditions sûres, équitables et durables aux personnes déplacées. Plusieurs centres de transit ont été ouverts, mais leur capacité reste limitée, et la durée de séjour censée être temporaire dépasse parfois les prévisions.
En parallèle, le Rwanda est confronté à des accusations de soutien à des groupes rebelles dans l’est de la République démocratique du Congo. Ces tensions régionales, couplées aux critiques persistantes sur son bilan en matière de droits humains, jettent une ombre sur sa volonté de devenir un acteur central de l’accueil des migrants expulsés.
Alors que les discussions avec les États-Unis se poursuivent, la communauté internationale et les organisations de défense des droits humains restent vigilantes. L’accueil des migrants expulsés ne peut se faire, rappellent-elles, sans garanties solides de protection, de transparence et de respect des normes internationales.
Article écrit par : Mariama Ba
Mis en ligne : 13/05/2025
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