Au Sénégal, la politique est devenue la voie la plus rapide vers la richesse, bien plus que l’entrepreneuriat, les carrières techniques ou même les professions libérales. Dans ce pays où l’on glorifie l’effort en façade, mais où l’enrichissement sans cause est devenu la norme, l’État semble fonctionner comme une machine à distribuer des privilèges à une élite politique paresseuse, arrogante et totalement déconnectée des réalités du peuple.
Il faut oser le dire sans détour : la politique et l’enrichissement illicite au Sénégal sont désormais des réalités indissociables. Les exemples pullulent : d’obscurs militants devenus milliardaires en quelques années, d’anciens étudiants devenus ministres roulant en 4×4 de luxe, ou encore de simples responsables de cellules politiques qui se paient des villas en bord de mer. Le tout sans qu’aucune autorité ne se donne la peine de demander d’où viennent ces fortunes éclairs.
Dans ce contexte, la politique n’est plus un engagement au service de l’intérêt général, mais un investissement personnel à retour rapide. Pourquoi créer une entreprise, affronter l’administration, payer des impôts, se battre pour faire croître une activité quand un simple poste politique ouvre les portes d’un enrichissement fulgurant et sans contrôle ? C’est cette mentalité de rente qui gangrène notre démocratie.
L’inflation des partis politiques au Sénégal est l’un des symptômes les plus révélateurs de cette dérive. À quoi bon plus de 350 partis pour un pays de 18 millions d’habitants ? Cette prolifération n’a rien à voir avec un pluralisme démocratique sain. Elle reflète au contraire une stratégie de parasitisme politique : des coquilles vides, sans programme, sans ancrage réel dans la population, qui ne vivent que dans l’attente d’une coalition à rejoindre, d’un poste à négocier ou d’une rente à capter.
Pire encore, même les nouveaux venus, souvent portés par des discours de rupture et de moralisation, finissent par céder au confort du système. L’humilité qu’ils affichaient au départ se dissipe dès les premières nominations. Ils adoptent les codes de ceux qu’ils critiquaient hier : arrogance, clientélisme, mépris des citoyens, culte de la posture. Dans un tel climat, parler de mission publique relève presque de la fiction. Comment peut-on prétendre servir la Nation tout en faisant de la politique matin, midi et soir, en occupant les plateaux télé, les réseaux sociaux et les salons feutrés des lobbys d’affaires ?
La vérité, c’est que la paresse règne en maître dans les hautes sphères de l’État. Le travail concret, la rigueur, la planification à long terme sont absents. À leur place, on trouve des discours creux, des promesses recyclées et des stratégies d’évitement. L’administration, elle-même paralysée par cette culture du laxisme, est instrumentalisée pour entretenir cette économie politique de la paresse.
Face à ce constat alarmant, il devient impératif d’ouvrir un débat national sérieux sur le lien toxique entre politique et enrichissement illicite au Sénégal. Cela passe par un renforcement des dispositifs de déclaration de patrimoine, par un contrôle strict du train de vie des élus, et surtout par une réforme profonde de l’éthique publique. Il ne suffit plus de voter. Il faut surveiller, auditer, sanctionner.
Le peuple sénégalais ne doit pas se résigner. Il doit refuser d’être complice par le silence ou la complaisance. Refuser d’être ébloui par les apparences et les discours. Exiger que l’engagement politique redevienne ce qu’il n’aurait jamais dû cesser d’être : un service et non un commerce.
Article opinion écrit par le créateur de contenu : Mamady Camara.
Mis en ligne : 16/05/2025
—
La plateforme NOTRECONTINENT.COM permet à tous de diffuser gratuitement et librement les informations et opinions provenant des citoyens. Les particuliers, associations, ONG ou professionnels peuvent créer un compte et publier leurs articles Cliquez-ici.