Khartoum, capitale déjà exsangue après deux années d’un conflit sanglant, s’est retrouvée dans le noir total dans la nuit de mercredi à jeudi. En cause : de nouvelles frappes de drones qui ont visé les infrastructures électriques de la ville, comme le rapporte Africanews. L’attaque, qui a interrompu l’alimentation en électricité, marque un tournant dans la stratégie des Forces de soutien rapide (FSR) du général Hemetti, repoussées ces derniers mois hors du centre du pays.
Plutôt que des assauts terrestres, les FSR semblent désormais privilégier les attaques ciblées à distance. Objectifs : centrales électriques, barrages, réseaux stratégiques. Une tactique aux conséquences humanitaires dramatiques, selon Afrik.com, qui évoque une « capitale plongée dans l’obscurité » et « une nouvelle escalade dans cette guerre civile ».
La coupure de courant n’est que le symptôme visible d’une crise plus profonde : sans électricité, l’eau devient inaccessible, les hôpitaux dysfonctionnent, et la situation sanitaire, déjà catastrophique à cause de la famine et des épidémies, s’aggrave encore.
Pendant ce temps, à Kinshasa, la tension monte d’un cran sur la scène politique. Le retour annoncé de Joseph Kabila, officiellement pour des raisons académiques, soulève de nombreuses interrogations. Wakatsera, journal burkinabè, s’interroge : « Et si Tshisekedi jouait balle à terre avec Kabila ? » Le journal laisse entendre que l’ancien président congolais, en décidant de rentrer, savait parfaitement qu’il défierait ainsi le pouvoir actuel.
Pour Wakatsera, le chef de l’État Félix Tshisekedi, qui a autrefois bénéficié du soutien décisif de Kabila pour accéder à la présidence, semble vouloir tourner définitivement la page de cette alliance encombrante. Mais à quel prix ? « N’est-il pas à haut risque », s’inquiète le journal, « de vouloir écarter un acteur majeur dans un climat politico-militaire déjà explosif, sur fond de guerre contre le M23, soutenu par Kigali ? » Pour le média burkinabè, Tshisekedi pourrait bien se créer un ennemi de plus, à un moment où l’équilibre du pays reste extrêmement fragile.
Sur un tout autre front, Jeune Afrique publie une interview remarquée du ministre turc des Affaires étrangères, Hakan Fidan. Le chef de la diplomatie d’Ankara, considéré comme l’un des hommes les plus proches du président Erdogan, assume l’expansion stratégique de la Turquie sur le continent africain. De la Somalie au Tchad, en passant par le Niger, le Mali ou la Libye, la Turquie multiplie les partenariats, notamment dans le domaine militaire.
Interrogé sur l’idée d’une « diplomatie du drone », Fidan temporise : « Ce qui était de l’aide au développement s’est progressivement élargi à d’autres sphères, dont la sécurité ». Il défend une logique d’assistance face au terrorisme, et souligne que son pays dispose d’une « expertise reconnue » en la matière.
Quant aux accusations d’Emmanuel Macron, qui reproche à la Turquie d’attiser un sentiment anti-français en Afrique, le ministre turc botte en touche. « Nous ne propageons pas de telles idées », affirme-t-il, « ce sont les peuples africains qui ont leur propre histoire ; à eux de décider comment l’interpréter ».
Une nuit noire à Khartoum, un retour dangereux à Kinshasa, une influence qui s’étend depuis Ankara : le continent africain, sous le feu croisé des conflits, des ambitions et des alliances, se trouve à un carrefour critique de son histoire contemporaine.
Article écrit par : Mariama Ba
Mis en ligne : 16/05/2025
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