À Lomé, chefs d’État, ministres des Finances et experts ont une nouvelle fois mis en scène une grande messe diplomatique sur la dette publique africaine. Une rencontre de plus, des promesses de plus, et toujours les mêmes constats : l’Afrique s’enfonce dans une spirale d’endettement insoutenable. Cette fois encore, on réclame des annulations « au cas par cas », des « réformes structurelles » et une « meilleure coopération internationale ».
Mais combien de décennies faudra-t-il encore attendre avant que les peuples africains cessent d’être pris au piège d’un système économique conçu pour les maintenir sous tutelle ?
Le sommet de Lomé n’a rien changé à l’essentiel : nos dirigeants continuent de demander la permission au lieu d’imposer des choix souverains. Alors que vingt-cinq pays africains sont aujourd’hui dans une situation de détresse liée à leur dette, on préfère parler de « réforme de l’architecture financière internationale » que de rupture réelle avec les logiques prédatrices des marchés. Cette lâcheté politique a un coût : celui du sous-développement entretenu. Chaque année, ce sont près de 90 milliards de dollars qui fuient le continent via les flux financiers illicites, pendant que les citoyens n’ont ni routes, ni hôpitaux, ni écoles dignes de ce nom.
À quoi bon emprunter, si l’argent est aussitôt siphonné par la corruption ou englouti dans des projets opaques sans bénéfices concrets pour les populations ? Au Togo, des voix citoyennes osent poser les vraies questions : « Où est passé l’argent ? Qu’avons-nous obtenu en échange ? » La réponse est brutale : presque rien. Le peuple togolais, comme tant d’autres sur le continent, se noie dans les dettes contractées sans débat, sans contrôle, sans transparence. Et pendant ce temps, les dirigeants affichent leur autosatisfaction dans des conférences climatisées, loin de la réalité des marchés, des dispensaires délabrés et des écoles surpeuplées.
Le surendettement n’est pas une fatalité, c’est une stratégie délibérée d’asservissement. Tant que nos dirigeants accepteront de gérer nos économies comme des comptables au service des créanciers, et non comme des bâtisseurs au service de la justice sociale, nous serons condamnés à mendier des rééchelonnements et des réductions partielles de dette. Ce qu’il faut, c’est un électrochoc politique. Le courage de rompre avec les institutions financières internationales qui dictent les priorités budgétaires. Le courage d’investir massivement dans des économies locales productives, autosuffisantes et centrées sur les besoins réels des citoyens.
L’Afrique n’a pas besoin de sommets de façade. Elle a besoin d’actes souverains. Il ne s’agit plus de demander, mais de reprendre ce qui nous appartient : notre droit à décider, à produire, à dépenser selon nos propres priorités. Refuser de payer une dette illégitime n’est pas un crime, c’est un devoir moral. Le continent regorge de ressources, de talents et de force collective. Ce n’est pas l’argent qui manque, mais la volonté politique de désobéir. À Lomé, comme ailleurs, les peuples attendent des réponses. Pas des discours.
Article opinion écrit par le créateur de contenu : Salif Bodian.
Mis en ligne : 22/05/2025
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