C’est un palmarès attendu, scruté, commenté. Le magazine Jeune Afrique vient de dévoiler son classement des vingt pays africains les plus performants, une hiérarchie construite autour de trois piliers : la gouvernance, l’innovation et l’influence. L’objectif ? Mettre en lumière les nations qui tracent la voie d’un nouveau leadership sur le continent.
Sans réelle surprise, l’Afrique du Sud s’impose au sommet. « La nation Arc-en-ciel jouit d’une aura singulière », écrit Jeune Afrique. Forte de son appartenance aux BRICS, au G20 — qu’elle préside cette année — et de sa diplomatie sans équivalent en Afrique, Pretoria incarne un leadership assumé.
Sur le terrain économique, elle conserve son rang de première puissance industrielle du continent, s’appuyant sur des secteurs de pointe comme l’automobile ou la chimie, mais aussi sur un sous-sol riche en ressources (or, platine, charbon…). Des infrastructures de classe mondiale renforcent encore son attractivité. Seul bémol : la gouvernance, où une dizaine de pays lui volent la vedette.
L’Égypte et le Maroc complètent le podium. Deux poids lourds d’Afrique du Nord, aux trajectoires distinctes mais convergentes. Le Caire s’appuie sur une économie en croissance, portée notamment par le secteur du BTP, tandis que le canal de Suez demeure un levier d’influence stratégique. Le royaume chérifien, lui, s’affirme comme un carrefour logistique et financier, grâce notamment au port de Tanger Med, devenu l’un des hubs les plus dynamiques de la Méditerranée et du continent.
Derrière ce trio de tête, le classement déroule ses surprises et ses confirmations : le Botswana et le Kenya s’invitent aux 4ᵉ et 5ᵉ places. Maurice, l’Éthiopie, la Tanzanie et le Nigeria se tiennent dans un mouchoir de poche. Mais c’est du côté francophone que les regards se tournent avec attention.
En 10ᵉ position, la Côte d’Ivoire s’impose comme le meilleur élève d’Afrique de l’Ouest francophone. Et cette performance n’est pas passée inaperçue outre-Atlantique. Washington multiplie les annonces d’investissements, pour un total record avoisinant les 7 milliards de dollars, concentrés dans l’industrie pétrolière et minière. De nouveaux blocs offshore, une raffinerie en construction… Abidjan devient, selon Le Monde Afrique, un laboratoire de la nouvelle doctrine économique américaine.
Exit la diplomatie des valeurs : place à une approche purement commerciale. « Le commerce, pas l’aide », résume le journal, en référence au slogan non officiel de la stratégie prônée par Donald Trump. Une politique qui semble séduire le pouvoir ivoirien, en quête de diversification économique, mais aussi une jeunesse de plus en plus sensible aux discours sur la souveraineté. « La nouvelle politique américaine, qui ne s’occupe plus des droits LGBT, ne s’intéresse pas à la politique intérieure et coupe les financements électoraux, trouve un certain écho auprès des dirigeants », confie un diplomate à Abidjan.
Autre dossier brûlant : la succession d’Akinwumi Adesina à la présidence de la Banque africaine de développement (BAD). Le Nigérian achève son second mandat. Cinq candidats sont en lice pour diriger la plus puissante institution financière du continent, dans un contexte marqué par un désengagement croissant des bailleurs occidentaux. En mai, l’administration Trump a d’ailleurs retiré une contribution de 555 millions de dollars au Fonds africain de développement, principal guichet concessionnel de la BAD.
Résultat : tous les prétendants s’accordent sur un objectif commun — mobiliser davantage de capitaux privés —, tout en orientant résolument leur regard vers l’Est. Chine, Golfe, Asie : les futurs partenaires de la BAD ne se situeront peut-être plus à Washington ou à Paris.
En filigrane de ce classement, se dessine ainsi une nouvelle géographie du pouvoir africain. Plus affirmée, plus stratégique, et résolument connectée aux enjeux du siècle.
Article écrit par : Mariama Ba
Mis en ligne : 28/05/2025
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