Le gouvernement ghanéen vient de prendre une décision salutaire et courageuse : interdire le chalutage de fond et toute pêche industrielle dans l’ensemble de ses eaux territoriales. L’annonce a été faite par la ministre de la Pêche, Emilia Arthur, lors de la conférence des Nations unies sur les océans à Nice.
Cette décision, qui étend la zone d’exclusion côtière de 6 à 12 milles nautiques, mérite d’être saluée avec force. Elle marque un tournant décisif vers une gestion durable des ressources halieutiques, centrée sur les communautés locales.
Dans de nombreux pays d’Afrique de l’Ouest, les petits pêcheurs font face à une crise profonde causée par la surpêche industrielle, souvent autorisée sous couvert de licences opaques. Cette activité, principalement le chalutage de fond, détruit les habitats marins et épuise les stocks de poissons, menaçant la sécurité alimentaire et les moyens de subsistance de millions de personnes. Au Ghana, cette situation devenait intenable. Il fallait agir.
L’engagement du Ghana apporte une réponse concrète et structurée. D’un point de vue écologique, l’interdiction du chalutage de fond protège les écosystèmes marins les plus vulnérables. Ces zones côtières sont des nurseries essentielles pour de nombreuses espèces. En les préservant, le Ghana investit dans le renouvellement de ses ressources halieutiques. D’un point de vue social, il s’agit d’une reconnaissance du rôle central des pêcheurs artisanaux dans l’économie nationale et la sécurité alimentaire.
Les pêcheurs, par la voix de Nana Kweigyah, président de l’Association des propriétaires de pirogues, ont salué cette mesure. Depuis des années, ils dénonçaient l’incursion illégale des chalutiers industriels dans les zones réservées. Aujourd’hui, leur combat est enfin entendu. Et ce n’est pas un simple geste symbolique : la proposition de cogestion des zones d’exclusion montre la volonté d’associer pleinement les communautés locales aux décisions qui les concernent.
À l’échelle du continent, cette décision fait écho à des luttes similaires. Au Sénégal, en Mauritanie ou en Guinée-Bissau, les pêcheurs réclament depuis longtemps un meilleur contrôle des navires industriels étrangers, souvent responsables de la raréfaction des prises. Le Ghana, en montrant l’exemple, envoie un message fort : une autre politique des océans est possible, plus juste, plus durable, plus inclusive.
Les bénéfices attendus sont multiples. Une pêche artisanale renforcée et encadrée permet non seulement d’assurer l’autosuffisance alimentaire des villages côtiers, mais aussi de garantir des revenus stables pour les familles. Elle favorise également une transmission des savoir-faire et une cohabitation harmonieuse avec la nature. L’instauration d’une gouvernance locale et transparente, couplée à une vérification rigoureuse des licences de pêche industrielle, participe à cette dynamique vertueuse.
Il est donc impératif que d’autres nations s’inspirent de cette initiative. Les océans sont à un point critique. Le chalutage de fond est à la biodiversité marine ce que la déforestation est aux forêts : un fléau. L’Afrique a une opportunité unique de montrer qu’il est possible de concilier développement et préservation.
Le Ghana vient de poser un jalon historique. Il appartient désormais aux États voisins, à l’Union africaine, et aux partenaires techniques et financiers de soutenir cet élan. Replacer les communautés côtières au cœur de la gouvernance maritime. Le développement du continent en dépend.
Article opinion écrit par le créateur de contenu : Seydou Bodian.
Mis en ligne : 15/06/2025
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