Alors que Guy Marius Sagna, député de la coalition Yewwi Askan Wi, s’insurge contre l’achat de nouveaux véhicules à l’Assemblée nationale, cette réaction aussi juste soit-elle soulève une question plus profonde : pourquoi maintenant ? Et surtout, où est passée la rigueur morale tant revendiquée lorsqu’il était dans l’opposition ? Nous saluons certes sa sortie, mais dénonçons avec force la lenteur, l’ambiguïté et le manque de cohérence de ceux qui, une fois au pouvoir, peinent à incarner l’exemplarité promise.
Alors que le Sénégal fait face à une crise économique sévère, marquée par une dette publique croissante, une inflation pesante et une jeunesse abandonnée à elle-même, les représentants du peuple semblent évoluer dans une bulle dorée, bien loin des réalités du quotidien. L’annonce de l’acquisition de nouveaux véhicules pour les députés par le président de l’Assemblée nationale, El Hadji Malick Ndiaye, révèle une déconnexion insoutenable entre les aspirations des citoyens et les pratiques du pouvoir législatif.
Guy Marius Sagna, connu pour ses engagements militants, a publié une déclaration ferme, dénonçant cette décision. Il rappelle avoir adressé une question écrite dès janvier 2025 pour interdire ou encadrer ces dépenses injustifiables. Soit. Mais cette prise de position publique n’intervient que six mois plus tard. Pourquoi avoir attendu ? Pourquoi n’avoir pas mobilisé plus tôt les leviers médiatiques, militants et politiques dont il dispose ?
Ce qui dérange ici, ce n’est pas tant le contenu du message salutaire que sa temporalité et sa tonalité. Où est passée la voix puissante et rapide du Guy Marius Sagna de la Place de l’Indépendance ? Celle qui ne tergiversait pas lorsqu’il s’agissait de dénoncer les dérives de l’ancien régime ? Son intervention, bien que pertinente, apparaît floue, presque calculée, là où une déclaration nette et immédiate aurait été attendue. La transparence ne souffre pas du silence diplomatique ; elle exige de la clarté, de la constance, du courage.
Il ne suffit pas de dénoncer les privilèges. Il faut y renoncer concrètement. La crédibilité politique ne se mesure pas aux discours, mais aux actes. La rationalisation des dépenses publiques ne peut être un slogan creux ; elle doit se traduire par des gestes forts : refus de certains avantages, audits indépendants, comptes rendus publics. Or, malgré l’appel à une « saine émulation » entre les pouvoirs, les députés continuent de jouir d’avantages injustifiés, aux frais du contribuable.
Dans d’autres pays africains en crise, des dirigeants ont fait le choix de renoncer à certains privilèges en signe de solidarité nationale. Au Malawi, par exemple, le président Lazarus Chakwera a réduit son propre salaire de 30 % et interdit les voyages en première classe pour les fonctionnaires. Au Sénégal, en revanche, les pratiques continuent comme si de rien n’était, malgré les cris de détresse d’un peuple à bout.
Nous ne voulons plus de déclarations tardives. Nous exigeons des actes clairs, rapides et cohérents. Guy Marius Sagna et ses collègues doivent comprendre que la légitimité populaire n’est pas un acquis : elle se mérite chaque jour. Renoncer aux véhicules de luxe, imposer une transparence réelle sur les dépenses, instaurer une gouvernance exemplaire voilà les seules voies crédibles pour répondre à l’exigence morale qui a porté au pouvoir ceux qui prétendaient incarner la rupture.
Assez de discours. Place à l’intégrité.
Article opinion écrit par le créateur de contenu : Abdoulaye Sène.
Mis en ligne : 20/06/2025
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