Quand le député Guy Marius Sagna réplique au député Ismaïla Diallo en affirmant n’avoir pour « agenda » que la sauvegarde de la réputation de son parti et la défense d’Ousmane Sonko, il veut faire croire qu’il n’a pas changé d’un iota. L’ancien symbole de la contestation populaire s’est transformé en professionnel de la manœuvre politique, trahissant les idéaux qui faisaient de lui une figure respectée.
Il fut pourtant l’icône des luttes sociales : arrêté en juillet 2019 pour avoir dénoncé l’influence française et la gestion opaque des ressources naturelles, il devint le prisonnier politique que les associations de défense des droits humains exigeaient de libérer.
Porte-voix du mouvement FRAPP-France Dégage, il fustigeait l’impérialisme, la corruption et toute compromission avec l’ordre établi. Dans la rue, il brandissait le drapeau de la souveraineté populaire, loin des ors institutionnels.
Cinq ans plus tard, le même homme siège au Parlement de la CEDEAO et brigue sans ciller un second mandat de député.
Entre-temps, il a publiquement soutenu la Loi de finances rectificative 2024 du gouvernement alors qu’il vilipendait jadis chaque budget « complice du néocolonialisme »
Plus grave : sa récente confession il était prêt à se présenter à la présidentielle si Sonko était écarté, avant de remettre le pouvoir « six à dix mois » plus tard révèle une disponibilité pour le jeu institutionnel qu’il méprisait hier. Derrière la posture altruiste se devine l’ambition personnelle : devenir, même provisoirement, chef de l’État.
Le tournant le plus flagrant est survenu le 14 mai 2025 : vêtu d’un Faso Dan Fani, Guy Marius Sagna s’est rendu à l’ambassade du Burkina Faso pour adouber la junte d’Ibrahim Traoré, régime qui emprisonne journalistes et interdit les partis politiques.
Soutenir un pouvoir militaire liberticide quand on se disait défenseur intransigeant des droits humains : voilà la faute politique majeure. La riposte outrée d’activistes burkinabè et de proches de Guy Hervé Kam, avocat croupissant en prison, illustre l’ampleur de la déception.
L’histoire est remplie de figures passées de la rue aux palais : du sud-africain Julius Malema, resté fidèle à son discours radical malgré son siège parlementaire, au Grec Alexis Tsipras, qui s’est assagi une fois au pouvoir. Sagna a choisi la seconde trajectoire : endosser costumes officiels et privilèges parlementaires, jusqu’à invoquer son immunité pour retarder une procédure pour diffusion de fausses nouvelles.
Guy Marius Sagna méconnaissable, il n’est plus le camarade qui, en 2019, défiait l’État pour défendre les sans-voix. Ses alliances avec des juntes répressives, son goût pour les fauteuils capitonnés de la CEDEAO et son opportunisme présidentiel dessinent une rupture nette avec ses promesses d’hier.
Aux citoyens épris de cohérence, il appartient désormais de lui rappeler que la légitimité se nourrit d’exemplarité : Il faut qu’il renonce à soutenir des régimes liberticides et qu’il choisisse enfin clairement entre la rue et la real-politik.
Article opinion écrit par le créateur de contenu : Aliou Fall.
Mis en ligne : 25/06/2025
—
La plateforme NOTRECONTINENT.COM permet à tous de diffuser gratuitement et librement les informations et opinions provenant des citoyens. Les particuliers, associations, ONG ou professionnels peuvent créer un compte et publier leurs articles Cliquez-ici.
