Dans une interview accordée à Albourakh TV, Balla Gaye 2, surnommé le Lion de Guédiawaye, a expliqué avoir choisi la France pour préparer son combat contre Siteu, prévu le 20 juillet. Il affirme que « tout est top » en France en matière d’entraînement, de nutrition et de récupération. Derrière ces mots, se dessine une réalité : le désaveu implicite de son propre pays. Ce choix traduit une forme d’aliénation et un manque flagrant de confiance envers les ressources sportives nationales.
La lutte sénégalaise, sport roi dans le pays, est un pilier culturel et identitaire. Les lutteurs comme Balla Gaye 2 ne sont pas de simples athlètes ; ils incarnent des modèles, des fiertés nationales, des icônes populaires. Leurs choix ont du poids, leurs gestes sont scrutés. Et lorsqu’un champion opte pour l’étranger pour se préparer, cela soulève des interrogations majeures sur la valorisation, ou plutôt le mépris, de l’expertise locale.
En affirmant que la France lui offre tout ce dont il a besoin, Balla Gaye 2 fait bien plus qu’un choix logistique : il envoie un message aux jeunes lutteurs, aux entraîneurs locaux, aux nutritionnistes sénégalais, et à l’ensemble de l’écosystème sportif national. Il dévalorise, peut-être sans s’en rendre compte, l’expertise sénégalaise, alors même qu’il est le produit de cette dernière. La lutte sénégalaise a forgé ses champions sur le sable, dans la sueur, au rythme des tam-tams et des prières. Ce déplacement vers l’Europe pour se « perfectionner » est une rupture inquiétante.
Le Sénégal n’est pas dépourvu d’infrastructures ni de compétences. Des centres d’entraînement existent, des entraîneurs de haut niveau y travaillent, souvent dans des conditions difficiles mais avec une passion authentique. De jeunes talents comme Reug Reug ou Franc ont montré qu’on peut briller en s’entraînant localement. Alors pourquoi chercher ailleurs ce que nous avons sous les yeux ?
Ce comportement participe d’un schéma plus large : celui d’une élite sportive et culturelle qui semble constamment chercher la validation étrangère. C’est une forme de néocolonialisme mental, où ce qui vient d’ailleurs est toujours jugé supérieur. Cette fuite vers la France ne fait qu’alimenter le complexe d’infériorité que beaucoup essaient pourtant de déconstruire. De plus, un entraînement local permettrait de redistribuer l’économie du sport dans les quartiers, de renforcer l’écosystème national et de créer des vocations.
Des pays comme le Nigeria ou le Maroc investissent massivement dans le sport local et encouragent leurs champions à rester sur place pour renforcer la formation nationale. Même en MMA ou en boxe, on observe une montée de structures locales performantes, prouvant que la réussite ne passe pas forcément par un exil vers l’Occident.
Le choix de Balla Gaye 2 n’est pas anodin. Il est symptomatique d’une mentalité qui considère l’étranger comme synonyme de qualité et le local comme médiocre. C’est une trahison silencieuse envers les jeunes lutteurs, les techniciens et l’esprit même de la lutte sénégalaise. Nos champions doivent prendre conscience de leur responsabilité dans la valorisation de nos ressources locales. Qu’ils soient des ambassadeurs de confiance, pas des exilés techniques. Le Sénégal a tout à offrir. Il faut juste croire en lui.
Investissons dans nos centres, faisons confiance à nos techniciens et exigeons de nos champions qu’ils soient les premiers à porter ce combat. La lutte se gagne aussi dans la tête, et celle de notre nation mérite d’être tenue haute, chez elle.
Article opinion écrit par le créateur de contenu : Médoune Sarr
Mis en ligne : 27/06/2025
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