Le Comité national de gestion de la lutte (CNGL) a interdit le port de tenues militaires, d’effigies de marabouts et même des couleurs nationales dans l’arène, promettant des « sanctions non négociables » à tout contrevenant. Cette décision autoritaire, assortie de punitions disproportionnées, menace l’identité populaire de la lutte sénégalaise et trahit l’esprit même de ce sport.
La lutte traditionnelle n’est pas qu’un divertissement ; elle incarne un patrimoine où spiritualité, patriotisme et spectacle se côtoient. Depuis quelques années, toutefois, le CNGL multiplie les mesures disciplinaires. En 2024, Balla Gaye 2 et Tapha Tine ont écopé d’amendes dépassant deux millions de FCFA pour d’autres « infractions ». Le message est constant : frapper fort plutôt qu’éduquer.
Le communiqué, lapidaire, confond réglementation et muselière. Rien n’indique des critères objectifs pour définir un “écart vestimentaire”. Pire : bannir les couleurs du drapeau revient à proscrire un symbole d’unité nationale que les lutteurs brandissent pour galvaniser le public. Plutôt qu’un correctif, le CNGL impose un carcan rigide, brandissant la menace d’amendes ou de suspensions sans préciser de barème ni de recours, une opacité incompatible avec la transparence sportive moderne.
Disproportion des peines. Des amendes de plusieurs millions, l’équivalent de mois de préparation pour un lutteur moyen, menacent directement leur subsistance.
Atteinte à la liberté d’expression culturelle. L’effigie d’un marabout n’est pas un slogan politique ; c’est souvent un repère spirituel. Criminaliser ces signes, c’est nier une dimension essentielle de la lutte.
Inefficacité prouvée. À chaque nouvelle interdiction, les « dérives » ressurgissent sous d’autres formes, preuve que la répression seule ne règle rien.
Isolement réglementaire. Même la FIFA, pourtant sourcilleuse, a fini par desserrer son interdiction du coquelicot après la polémique et les amendes infligées à l’Angleterre en 2016. Le dialogue a prévalu, pas la répression.
Sur d’autres continents, les fédérations de sports de combat privilégient désormais des campagnes de sensibilisation, ateliers sur la signification des symboles, chartes co‑rédigées avec les athlètes, plutôt que des sanctions pécuniaires immédiates. Dans l’UFC, par exemple, la transition vers un équipement uniforme s’est faite sur deux saisons avec compensations financières et consultations publiques ; résultat : acceptation quasi générale et controverse minimale.
Le CNGL dispose d’un arsenal bien plus constructif :
Programme de sensibilisation avant chaque saison pour expliquer les raisons culturelles et sécuritaires des restrictions. Comité paritaire lutteurs‑CNGL chargé de valider les tenues cas par cas. Paliers disciplinaires progressifs (avertissement, puis amende symbolique, puis sanction sportive) laissant le temps d’ajuster les pratiques.
Le CNGL prétend protéger l’arène ; en réalité, il risque de la défigurer par des sanctions aveugles et une posture inflexible. Il faut exiger l’ouverture immédiate de discussions public‑privé, la suspension des amendes automatiques et l’adoption d’un code vestimentaire co‑élaboré. La lutte appartient au peuple ; qu’aucune bureaucratie ne la dépouille de ses couleurs, de ses croyances et de son âme.
Article opinion écrit par le créateur de contenu : Diallo Samba.
Mis en ligne : 28/06/2025
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