Lors de la séance plénière consacrée à la Loi de finances rectificative (LFR), une polémique à l’Assemblée nationale a éclaté lorsque le député Saliou Ndione a attiré l’attention en arborant une écharpe en soutien au peuple palestinien. Face aux remarques du président de l’Assemblée nationale et à l’agitation sur les réseaux sociaux, l’élu a publié un message sur Facebook pour justifier son geste, arguant qu’aucun texte juridique ne l’interdisait.
Pourtant, au-delà de la légalité, se pose une question de bon sens institutionnel et de respect des lieux de la République. Ce geste, bien que motivé par une cause noble, constitue un manquement à l’éthique de neutralité que requiert une enceinte parlementaire.
Il ne s’agit pas ici de nier la gravité de la situation en Palestine, ni même de remettre en cause la solidarité historique du Sénégal avec ce peuple. Le soutien aux causes internationales, notamment en faveur des droits humains, fait partie intégrante de la diplomatie sénégalaise et de l’engagement moral de nombreux parlementaires. Cependant, il y a un lieu et un moment pour exprimer ce soutien. L’Assemblée nationale n’est pas une tribune personnelle. Elle est un cadre solennel qui exige réserve, impartialité et discipline, même en l’absence d’une interdiction formelle écrite.
Dans sa défense, Saliou Ndione tente de dissocier le rappel du président de l’Assemblée d’un blâme officiel, en insistant sur l’absence de texte réglementaire. Cette argumentation juridique occulte cependant l’essentiel : le respect des symboles et la dignité des institutions. L’hémicycle ne peut devenir un espace de manifestations visuelles au gré des combats personnels, fussent-ils légitimes. Accepter ce précédent, c’est ouvrir la voie à une politisation visuelle permanente de l’espace parlementaire, demain, ce pourrait être des foulards aux couleurs d’un parti, des pins en faveur de causes diverses, voire des habits à message. Où s’arrêtera-t-on ?
Les institutions publiques reposent sur la confiance et l’image qu’elles projettent. Leur autorité tient aussi à la retenue symbolique de leurs membres. Si chaque élu commence à revêtir l’apparence de son combat, l’Assemblée se transformera en théâtre d’agitation et perdra sa capacité à incarner l’intérêt général. La neutralité de l’espace parlementaire n’est pas un caprice protocolaire, c’est une exigence démocratique. Elle garantit que les débats se concentrent sur les idées, et non sur les démonstrations visuelles ou les injonctions morales personnelles.
En France, la question s’est posée lorsqu’un député a brandi un drapeau palestinien dans l’Assemblée nationale. Il a été immédiatement sanctionné, non pour son opinion, mais pour avoir introduit un symbole partisan dans un cadre républicain. Aux États-Unis, les codes vestimentaires stricts interdisent tout signe de ralliement à une cause. Ces règles ne visent pas à brider la liberté d’expression, mais à préserver l’impartialité et le sérieux des institutions.
Saliou Ndione aurait pu exprimer son soutien dans un communiqué de presse, lors d’une conférence, ou à travers son travail législatif. Cependant, la polémique à l’Assemblée nationale née de l’introduction d’un symbole partisan dans l’hémicycle montre qu’il a franchi une ligne. Nous appelons l’Assemblée nationale à clarifier son règlement intérieur pour éviter toute ambiguïté à l’avenir. Le respect des institutions commence par les actes des élus eux-mêmes. Le combat pour la justice ne justifie pas le désordre symbolique dans nos enceintes républicaines.
Article opinion écrit par la créatrice de contenu : Maty Faye.
Mis en ligne : 02/07/2025
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