Le 1er juillet 2025, un rapport de la banque britannique Barclays, relayé par Bloomberg, a dressé un constat accablant : la dette du Sénégal atteint désormais 119 % du PIB, faisant du pays le plus endetté d’Afrique.
Cette révélation ne surprend guère ceux qui, depuis des années, alertent sur la dérive budgétaire du pays. Ce n’est pas un simple accident de parcours, mais bien le résultat d’une politique financière hasardeuse, menée au mépris des règles élémentaires de bonne gouvernance.
En 2023, le ratio dette/PIB frôlait déjà les 100 %, mais l’audit de la Cour des comptes publié en février 2025 a levé le voile sur une vérité encore plus inquiétante. Le déficit public et la dette du Sénégal avaient été volontairement minimisés par l’ancien régime. Ce maquillage comptable a creusé un trou fiscal abyssal, obligeant le gouvernement actuel à adopter une loi de finances rectificative marquée par des coupes budgétaires sévères. Derrière ce réajustement, se cache une austérité non dite, imposée à une population qui n’en est aucunement responsable.
Ce niveau d’endettement n’est pas le fruit d’une crise mondiale imprévue. Il découle directement d’un choix politique : financer des projets surdimensionnés, mal préparés, souvent inutiles, par une frénésie d’emprunts sans vision à long terme. L’ancien pouvoir a misé sur une communication d’ »émergence » vide de contenu, tandis que la dette du Sénégal explosait dans l’ombre.
Aujourd’hui, le FMI suspend son programme d’appui de 1,8 milliard de dollars, exigeant des clarifications sur les finances publiques. Le pays, privé de soutien extérieur, n’a d’autre recours que le marché sous-régional, à des conditions plus risquées.
Ce qui choque le plus dans cette affaire, ce n’est pas tant le chiffre brut de la dette du Sénégal, aussi alarmant soit-il, mais l’absence de transparence, de contrôle et de responsabilité politique. Le silence des institutions de veille financière, l’inertie des contre-pouvoirs et la complicité tacite d’une élite politique ont permis à cette situation de dégénérer. Le peuple, lui, réalise que les promesses d’un État moderne n’étaient que des mirages.
La trajectoire actuelle de la dette du Sénégal rappelle tristement celles de pays comme le Ghana ou la Zambie, piégés par leur propre endettement. Dans ces cas, l’explosion de la dette a entraîné une crise sociale profonde : réduction des dépenses sociales, grèves, désaffection populaire. Le Sénégal, s’il persiste dans cette voie, n’échappera pas à ce sort. Il est possible de changer de cap, mais cela suppose du courage politique, de la rigueur budgétaire, et une rupture nette avec les pratiques du passé.
La dette du Sénégal est aujourd’hui bien plus qu’un indicateur économique : c’est le symptôme d’une trahison politique et morale. Le pays a été conduit à l’abîme par une gouvernance opaque, centrée sur l’image plutôt que sur l’intérêt national. Il ne suffira pas d’assainir les chiffres : il faut des comptes, des responsabilités, une justice financière. Sinon, ce fardeau continuera de peser sur les générations futures, transformant chaque franc emprunté hier en une souffrance sociale demain.
Article opinion écrit par le créateur de contenu : Saliou Mané.
Mis en ligne : 08/07/2025
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