Le récent communiqué du directeur général de l’Aéroport international Blaise Diagne (AIBD), Abiboulaye Dièye, tentant de justifier les licenciements en cours, soulève plus d’interrogations que de réelles assurances. Alors que 66 agents viennent de perdre leur emploi dans un climat économique déjà tendu, l’on nous parle de restructuration et de redressement.
Derrière les mots techniques et les chiffres, c’est une vérité crue qui se dessine : la direction cherche à faire payer aux travailleurs les erreurs de gouvernance commises en haut lieu.
Entre 2022 et 2024, l’AIBD a procédé à des recrutements massifs, portant les effectifs à 938 agents. Une inflation de personnel qui, selon les mots mêmes du directeur général, a « lourdement impacté » les finances de l’entreprise. Comment expliquer une telle politique de recrutement dans une entreprise publique censée être pilotée avec rigueur ? Quelle analyse stratégique a mené à l’embauche d’autant de personnes en si peu de temps ? Et surtout, où était la direction lorsqu’il s’agissait d’anticiper les conséquences de ces choix hasardeux ?
Les licenciements à l’AIBD ne relèvent pas d’une fatalité conjoncturelle, mais bien des conséquences d’une gestion interne déconnectée de toute logique économique durable. Licencier aujourd’hui pour compenser des décisions irréfléchies d’hier est non seulement injuste, mais profondément irresponsable.
Réduction du budget de 23 à 18 milliards FCFA, suppression de subventions, coupe drastique dans les charges téléphoniques, baisse des dépenses en carburant : la direction semble aujourd’hui prendre conscience des excès d’hier. Mais cette nouvelle rigueur, tardive, se fait au détriment des salariés. Plutôt que de rechercher des alternatives structurelles ou de demander des comptes à ceux qui ont validé ces recrutements inutiles, on préfère agir vite et fort sur la masse salariale. Une solution de facilité, qui évite surtout de remettre en cause les véritables responsables.
Dans d’autres contextes, comme à l’aéroport international d’Abidjan ou à celui de Kigali, les mesures d’austérité ont été combinées avec des stratégies de reconversion et de formation du personnel excédentaire. Ici, on tranche dans le vif, sans réelle politique d’accompagnement.
Derrière les licenciements à l’AIBD, la réalité que tente d’escamoter la direction, c’est que le véritable problème de AIBD est avant tout un problème de gouvernance. Comment une entreprise aussi stratégique a-t-elle pu laisser dériver ses effectifs de manière aussi incontrôlée ? Pourquoi le Conseil d’administration a-t-il validé ces embauches sans une évaluation claire des besoins réels ? Si le sureffectif est aujourd’hui reconnu, il est tout aussi impératif de reconnaître l’irresponsabilité de ceux qui l’ont provoqué.
Ce n’est pas aux employés, souvent recrutés dans un contexte d’espoir professionnel et familial, de payer les pots cassés d’une direction défaillante.
Le redressement d’une entreprise publique ne peut et ne doit pas passer par la précarisation des salariés. L’AIBD a besoin d’une réforme de sa gouvernance, d’une culture de la transparence et d’un engagement fort envers la responsabilité managériale. Avant de parler de viabilité, il faut parler de justice. Il faut rompre avec cette logique où les erreurs des dirigeants se soldent par des pertes d’emploi pour les plus faibles. Le Sénégal mérite mieux que cela.
Article opinion écrit par la créatrice de contenu : Maimouna Hann.
Mis en ligne : 11/07/2025
—
La plateforme NOTRECONTINENT.COM permet à tous de diffuser gratuitement et librement les informations et opinions provenant des citoyens. Les particuliers, associations, ONG ou professionnels peuvent créer un compte et publier leurs articles Cliquez-ici.
