Le voile n’est pas un filtre Instagram : Le cas de Faynara - Notre Continent
> NOTRE CONTINENT > - People | Par Emmanuel | Publié le 12/07/2025 11:07:45

Le voile n’est pas un filtre Instagram : Le cas de Faynara

Ce week-end, l’influenceuse sénégalaise Faynara a provoqué une onde de choc sur les réseaux sociaux en annonçant, via Snapchat, sa décision de retirer son hijab. Connue pour ses prises de parole engagées et suivie par des centaines de milliers de fans, elle a expliqué ce choix comme une démarche personnelle, intime, spirituelle. Mais si la forme se veut douce et réfléchie, le fond soulève des interrogations.

Peut-on exposer publiquement une décision aussi symbolique tout en refusant les réactions qu’elle suscite ? Peut-on revendiquer une foi sans assumer les conséquences de son instrumentalisation médiatique ? Ce retrait public du voile, quand il a été porté comme étendard, ne peut être neutre. Il est irresponsable, car il s’adresse à une jeunesse en quête de repères.

Au Sénégal, société profondément attachée à l’islam, le port du voile n’est pas une simple affaire de mode ou de goût personnel. Il symbolise un engagement spirituel, une discipline, une modestie affichée. Depuis plusieurs années, les réseaux sociaux ont vu émerger une nouvelle génération d’influenceuses voilées, qui mêlent entrepreneuriat, vie privée et références religieuses. Faynara faisait partie de ces figures. À ce titre, ses choix vestimentaires ne sont pas de simples gestes personnels : ils ont un écho social et éducatif.

Le message de Faynara se veut apaisé, spirituel, assumé. Mais il est aussi éminemment public. Ce n’est pas une décision silencieuse, faite dans la discrétion, mais une déclaration ouverte sur les réseaux sociaux. Or, en adoptant une telle posture, elle n’échappe pas aux contradictions : comment présenter le voile comme une décision spirituelle profonde, puis le retirer publiquement sans ouvrir la porte au doute, voire au malaise, chez celles qui s’en inspiraient ? Quand t’as mis ton voile, t’as pas demandé l’avis de la foule. Mais tu l’as fait devant elle. Alors, en le retirant, ne fais pas comme si le regard des autres n’avait plus d’importance.

Article Similaire

D’abord, la question de la responsabilité : en tant que personnalité publique, suivie par une jeunesse féminine nombreuse, Faynara ne peut faire abstraction de son influence. Retirer son voile sans clarifier davantage le message au nom de la seule « cohérence intérieure » risque de semer la confusion. Ensuite, l’acte pourrait être interprété comme une banalisation d’un symbole sacré, réduit à un accessoire interchangeable selon l’humeur du jour. Enfin, cela alimente une lecture superficielle de la foi : celle d’une religion à la carte, où l’engagement fluctue au rythme des émotions.

Des études menées dans des contextes similaires, notamment en France ou en Égypte, ont montré que les décisions publiques d’influenceuses musulmanes de retirer le voile provoquent souvent un malaise, voire une crise de conscience chez leurs suiveuses. Certaines se sentent trahies, d’autres doutent de leurs propres choix. Au Sénégal, où la foi reste profondément ancrée dans le tissu social, cette décision prend un poids encore plus symbolique.

Dans d’autres contextes comme en Iran ou en Arabie Saoudite, le port du hijab est imposé, et le retirer devient un acte de rébellion politique. Ici, nous sommes à l’inverse : dans un pays libre, une femme qui a volontairement choisi ce chemin fait marche arrière, en pleine lumière. C’est ce contraste qui trouble. La liberté d’enlever son voile existe, mais la manière dont elle est exposée ici pose question.

Le geste de Faynara n’est pas anodin. Il nous interroge sur la banalisation des symboles religieux à l’ère des réseaux sociaux. Quand on choisit de porter un signe aussi fort que le hijab devant des centaines de milliers de personnes, on prend une responsabilité. Le retirer, ce n’est pas simplement « aligner son être intérieur », c’est aussi envoyer un signal. Et ce signal est flou, déroutant, voire dangereux pour des jeunes qui voyaient en elle un modèle. Il faut rappeler que la foi n’est pas un filtre Instagram que l’on ajoute ou retire à sa convenance. Elle engage. Elle oblige. Elle ne se performe pas. Elle se vit, en silence ou avec constance.

À toutes les figures publiques qui parlent de foi : si vous décidez d’en faire un message, soyez conscientes de votre impact. Sinon, taisez-vous. Car la foi, elle, n’a pas besoin de likes pour exister.

Article opinion écrit par le créateur de contenu : Seydina Sow.
Mis en ligne : 12/07/202
5

La plateforme NOTRECONTINENT.COM permet à tous de diffuser gratuitement et librement les informations et opinions provenant des citoyens. Les particuliers, associations, ONG ou professionnels peuvent créer un compte et publier leurs articles Cliquez-ici.


Réagir à cet article

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *

0 commentaires

Réagir à cet article

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *

0 commentaires

Copyright © 2023 www.notrecontinent.com

To Top