Le 10 juillet 2025, l’Ambassade américaine à Dakar a offert plus de 30 ordinateurs portables au Pôle Judiciaire Financier (PJF), organe sénégalais chargé de traquer les infractions économiques et les trafics liés à la drogue. Ce geste, présenté comme un appui technique pour renforcer les capacités de notre justice, est lourd de symboles et soulève de sérieuses inquiétudes.
Derrière l’apparente générosité se cache un malaise plus profond : la possible instrumentalisation de notre système judiciaire par des intérêts étrangers. Ce type de « coopération » compromet l’indépendance et la crédibilité de la justice sénégalaise.
Créé en 2024, le PJF a pour mission de traiter les crimes économiques de haut niveau : corruption, blanchiment d’argent, fraude fiscale, trafic de stupéfiants. En d’autres termes, il est au cœur des équilibres sensibles de l’État. Il traite les dossiers les plus explosifs, ceux qui touchent les puissants et les zones grises du pouvoir. Que ce soit ce service, précisément lui, qui bénéficie d’un don matériel ciblé par une puissance étrangère n’est pas un hasard, mais un signal politique fort.
Car il ne s’agit pas simplement d’une aide logistique. Ce don d’ordinateurs au PJF soulève une série de questions stratégiques : pourquoi un tel intérêt américain pour notre appareil judiciaire ? Pourquoi ne pas passer par un appui institutionnel global ? Que contiennent réellement ces ordinateurs ? Sont-ils exempts de tout logiciel d’espionnage ou de dispositifs de surveillance ? L’histoire récente regorge d’exemples où des équipements offerts par des puissances étrangères servaient en réalité à capter des informations sensibles.
L’ambiguïté du don d’ordinateurs au PJF alimente le doute dans l’opinion publique. Ce doute est toxique. Il jette une ombre sur la légitimité du PJF, qui risque désormais d’être perçu non plus comme un organe souverain, mais comme un relais d’intérêts étrangers. La perception d’une justice influencée par l’extérieur est une bombe à retardement dans un pays où la confiance dans les institutions est déjà fragile. Une justice soupçonnée d’être téléguidée perd son autorité. Elle devient suspecte, partiale, discréditée.
Des pays comme l’Éthiopie, le Brésil ou même certains États européens ont déjà vécu des controverses similaires. Partout, le constat est le même : la souveraineté judiciaire ne se négocie pas. Elle se protège. L’appui extérieur, s’il est nécessaire, doit se faire dans la transparence, la réciprocité, et sous contrôle strict des autorités locales. Aucun ordinateur, aussi sophistiqué soit-il, ne vaut la perte de la confiance citoyenne.
Il faut que l’État du Sénégal commande immédiatement un audit technique indépendant de ces équipements. Leurs systèmes doivent être scrutés ligne par ligne. De plus, une charte d’utilisation claire et un protocole de cybersécurité rigoureux doivent être adoptés avant même leur mise en service. Il en va de la crédibilité de notre justice.
Aujourd’hui, nous devons nous lever pour exiger une justice souveraine, à l’abri de toute influence étrangère. Le Sénégal n’est pas un terrain de jeu pour les intérêts géopolitiques. Sa justice ne doit être ni téléguidée, ni compromise. Le peuple sénégalais a droit à une institution judiciaire forte, digne et indépendante. À ce prix seulement, la démocratie pourra respirer.
Article opinion écrit par le créateur de contenu : khadim Samb.
Mis en ligne : 17/07/2025
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