Je n’en suis pas fier, mais il est temps que je parle. Aujourd’hui, je veux confier ce lourd secret que je porte depuis cinq ans. Je suis une femme d’une trentaine d’années, mariée, mère de deux enfants, et je vis à Dakar. Mon histoire est celle d’un cœur rongé par la jalousie, d’un esprit affaibli par les comparaisons constantes, et d’un acte que je regrette chaque jour : avoir eu recours aux pratiques mystiques contre ma propre sœur.
Depuis l’enfance, ma sœur cadette et moi avons toujours été comparées. Elle, plus claire de peau, plus sociable, plus brillante à l’école, suscitait sans le vouloir des remarques blessantes : « Pourquoi tu n’es pas comme ta sœur ? » ou encore « Elle va réussir, toi tu es trop discrète ». Ces paroles ont planté les graines d’un mal-être que je n’ai jamais su surmonter.
Avec le temps, le fossé s’est creusé. Elle a obtenu une bourse pour étudier à l’étranger, puis décroché un bon poste dans une ONG à son retour. Moi, je vivais avec un mari absent et des fins de mois difficiles. Lorsqu’elle m’appelait pour m’annoncer ses bonnes nouvelles, je riais au téléphone, mais pleurais intérieurement.
Un jour, poussée par l’aigreur, j’ai franchi la ligne. Je suis allée voir un marabout recommandé par une voisine. Je n’avais jamais mis les pieds dans ce genre d’endroit. Là-bas, j’ai demandé que la chance de ma sœur soit « bloquée », qu’elle connaisse au moins un peu de difficultés dans sa vie. Je voulais qu’elle ressente ce que moi je vivais.
Le marabout m’a donné des poudres à jeter discrètement devant sa porte. Je l’ai fait une nuit, alors qu’elle dormait chez nos parents. Rien ne s’est passé tout de suite, mais quelques mois plus tard, elle a perdu son emploi, son compagnon l’a quittée, et elle a commencé à souffrir d’une dépression dont elle ne parlait qu’à demi-mot. J’avais obtenu ce que j’avais demandé… mais à quel prix ?
Depuis, je vis avec une culpabilité qui me ronge. Je la regarde souffrir en silence, sans pouvoir l’aider, car je suis responsable. J’ai coupé les liens avec le marabout, je me suis beaucoup rapprochée de la religion, j’ai prié, pleuré, supplié Dieu de me pardonner. Mais chaque sourire triste de ma sœur est un rappel de mon péché.
Aujourd’hui, si je parle, c’est pour prévenir d’autres femmes comme moi : la jalousie n’est pas une solution. Le recours au maraboutage, même s’il semble offrir des réponses faciles, détruit bien plus qu’il ne résout. Ce que j’ai fait n’est pas une preuve de force, mais de faiblesse.
Ma sœur commence à se relever doucement. Elle ignore tout de ce que j’ai fait. Peut-être qu’un jour je lui avouerai, ou peut-être que je vivrai toujours avec ce poids. Mais une chose est sûre : je ne recommencerai jamais.
Article opinion écrit par le créateur de contenu : Anonyme.
Mis en ligne : 19/07/2025
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