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Récemment, un scandale immobilier d’une ampleur inédite a secoué les sphères étatiques du Sénégal. L’acquisition controversée, en 2018, d’un immeuble de huit étages situé au Point E, ancien siège du Haut conseil des collectivités territoriales (HCCT), pour la somme de 23 milliards de francs CFA, soulève plus de questions que de réponses. À travers cette affaire, révélée par les enquêtes du directeur général de la Sogepa, Elimane Pouye, ce ne sont pas seulement des dysfonctionnements ponctuels qui sont mis en lumière, mais un système de contrôle et de supervision des transactions publiques défaillant, voire inexistant. C’est ce manquement grave qui doit interpeller chaque citoyen soucieux de la bonne gestion des biens publics.
L’État sénégalais, dans le cadre de ses besoins immobiliers, a acquis cet immeuble sous la houlette de l’ancien ministre délégué au Budget, Birima Mangara. Officiellement acheté pour 14 milliards de Fcfa grâce à un prêt contracté auprès de Diamond Bank, cette opération s’est ensuite vue alourdie par des intérêts, portant le coût total à près de 20 milliards.
Pourtant, la transaction s’est déroulée en dehors des procédures réglementaires : ni la Direction des Domaines ni l’Agence de gestion du patrimoine immobilier de l’État (Agpe) n’ont été informées, et le bien n’a pas été enregistré officiellement au nom de l’État pendant plusieurs années. Pendant tout ce temps, l’État a continué à verser près de 3 milliards Fcfa de loyers à son propre propriétaire, Cheikh Ahmeth Tidiane Seck, dans un cercle kafkaïen d’illégalité.
Au-delà des chiffres impressionnants, c’est la carence totale des mécanismes de contrôle qui doit retenir notre attention. L’absence d’enregistrement officiel et le contournement flagrant de la Commission de contrôle des opérations domaniales traduisent un laxisme institutionnel inacceptable. Pire encore, les alertes lancées par des responsables compétents, tels que l’ancien directeur général de l’Agpe Abdoul Yaya Kane, sont restées lettre morte. Ces dysfonctionnements illustrent clairement un déficit criant de supervision, une gouvernance faible et un manque évident de transparence.
Le fait que cette affaire n’ait été officiellement portée à la connaissance du Président Bassirou Diomaye Faye qu’en février 2025, près de sept ans après l’achat initial, dénote un système où les contrôles ne jouent pas leur rôle de garde-fous. Comment peut-on tolérer qu’une telle somme soit engagée dans des conditions aussi opaques, alors que des immeubles aux dimensions bien plus importantes sont acquis à prix similaires ?
L’État, gestionnaire du patrimoine public, doit être exemplaire dans la transparence de ses opérations. Ce scandale révèle que des transactions de plusieurs milliards peuvent se dérouler dans l’ombre, sans aucun suivi ni contrôle effectif.
La Commission de contrôle des opérations domaniales, la Direction des Domaines et l’Agpe ont été soit contournées, soit ignorées. Cette faiblesse institutionnelle favorise l’opacité et, potentiellement, la corruption.
Au moment où le Sénégal cherche à optimiser ses ressources pour répondre aux besoins des populations, gaspiller ainsi l’argent public alimente le mécontentement et mine la confiance dans les autorités.
Sans réformes profondes, ce type d’affaire risque de se multiplier, chaque scandale renforçant l’idée que la gestion publique est laxiste, voire complice.
Ce type de scandale n’est malheureusement pas exclusif au Sénégal. Dans plusieurs pays en développement, le manque de contrôle sur les transactions publiques est une cause majeure de gaspillage des ressources. Par exemple, au Kenya ou au Nigeria, des enquêtes similaires ont révélé des opérations immobilières opaques, entraînant des pertes financières colossales pour l’État. Dans ces contextes, les mesures les plus efficaces ont toujours été un renforcement des institutions de contrôle, la transparence accrue des marchés publics, et la responsabilisation stricte des acteurs impliqués.
Cette affaire immobilière du Point E est une alarme retentissante qui doit pousser le Sénégal à revoir en profondeur ses mécanismes de contrôle. Il ne s’agit plus seulement de réparer une erreur isolée, mais de rétablir la confiance entre l’État et ses citoyens par des réformes structurelles ambitieuses. L’État doit impérativement renforcer l’indépendance, les moyens et la capacité d’action de ses institutions de contrôle. Les procédures doivent être systématiquement respectées, et toute tentative d’opacité sévèrement sanctionnée.
Si rien n’est fait, le patrimoine public continuera à être une proie facile pour les pratiques douteuses, au détriment du développement national. Les Sénégalais méritent une gouvernance transparente et responsable, garantissant que chaque franc investi serve réellement l’intérêt général et non des intérêts particuliers.
Article opinion écrit par la créatrice de contenu : Anonyme.
Mis en ligne : 12/08/2025
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