Mise en scène de réconciliation : La loi du plus fort règne encore - Notre Continent
> NOTRE CONTINENT > - Afrique | Par Eva | Publié le 14/08/2025 02:08:15

Mise en scène de réconciliation : La loi du plus fort règne encore

Le processus de désarmement, démobilisation et réinsertion (DDR) en République centrafricaine (RCA) semble avoir franchi une étape importante avec la reddition volontaire d’anciens combattants du groupe armé UPC dans le village de Maloum, à la suite de l’accord de paix signé le 19 avril à N’Djamena. L’opération, appuyée par la MINUSCA et coordonnée par l’UEPNDDRR, est saluée comme un tournant décisif vers la paix. Cependant, derrière cette mise en scène de réconciliation, se cache une inquiétante fragilité. Si les armes sont déposées aujourd’hui, rien ne garantit qu’elles ne seront pas reprises demain. Le DDR, dans sa forme actuelle, ne s’attaque pas aux véritables racines du conflit.

Depuis 2018, plus de 13 000 ex-combattants ont été désarmés et plus de 3 000 armes collectées. Pourtant, la RCA reste l’un des pays les plus instables du continent africain. Malgré les cérémonies de désarmement et les discours d’engagement, les régions frontalières avec le Tchad et le Soudan restent des zones de non-droit, où la loi du plus fort continue de régner.

Les groupes armés y trouvent toujours refuge, ressources et recrues. Le désarmement à Maloum, aussi symbolique soit-il, ne peut faire oublier que la paix véritable repose moins sur la reddition des armes que sur la reconstruction de l’État et la confiance des citoyens dans les institutions.

Le DDR actuel mise essentiellement sur une approche technique : remise des armes, examens médicaux, primes de réinsertion, formations. Or, l’insécurité qui pousse les jeunes comme Abdoulay Atair à rejoindre des milices ne se résume pas à une absence d’emploi ou à un manque de soins médicaux. Elle résulte d’une accumulation de frustrations : marginalisation politique, pauvreté endémique, absence de services publics, sentiment d’injustice. Tant que ces facteurs persistent, les anciens combattants resteront vulnérables à la tentation de reprendre les armes à la moindre étincelle.

L’expérience d’autres pays comme le Mali ou la République démocratique du Congo démontre d’ailleurs les limites de cette stratégie. Dans ces contextes, de nombreux ex-combattants ayant suivi un processus DDR sont revenus dans des groupes armés quelques mois ou années plus tard, faute d’alternatives viables, ou en raison de promesses non tenues par l’État. Le DDR devient alors un cycle sans fin, où l’on désarme pour re-armer, puis désarmer à nouveau. Cette répétition montre l’échec d’une approche superficielle qui traite les symptômes sans s’attaquer aux causes.

Il faut se poser la vraie question : que vaut un désarmement s’il n’est pas accompagné d’une refondation politique et économique du pays ? La collecte des armes est une étape, pas une solution. Sans justice, sans gouvernance légitime, sans développement, la paix restera un mirage. L’enthousiasme autour de l’opération de Maloum ne doit pas faire perdre de vue cette réalité.

Nous devons donc cesser de nous contenter de succès à court terme, de bilans chiffrés et de cérémonies médiatisées. Ce dont la Centrafrique a besoin, c’est d’une stratégie globale de stabilisation, centrée sur les communautés, respectueuse des droits humains et dotée de ressources durables. Tout autre scénario revient à préparer le terrain pour la prochaine rébellion.

La communauté internationale et les autorités centrafricaines doivent revoir en profondeur leur approche du DDR. Car une paix de façade ne vaut rien si elle cache les braises encore ardentes du conflit.

Article opinion écrit par la créatrice de contenu : Anonyme.
Mis en ligne : 14/08/2025

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