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Depuis le 5 août 2025, une nouvelle procédure imposée par l’ambassade des États-Unis à Dakar suscite un malaise grandissant. Les demandeurs de visas F, M ou J, principalement des étudiants, stagiaires ou chercheurs sénégalais, doivent désormais ouvrir intégralement leurs réseaux sociaux aux autorités consulaires. Officiellement justifiée par des motifs de sécurité, cette mesure cache mal une orientation idéologique préoccupante. Elle marque une dérive discriminatoire qui restreint, de façon insidieuse, la liberté d’expression.
Cette politique s’inscrit dans un contexte global où les tensions géopolitiques autour du Moyen-Orient, notamment de la Palestine, polarisent de plus en plus les positions internationales. Le retour de Donald Trump à la Maison Blanche a ravivé une ligne dure sur les questions migratoires et sécuritaires. Cette mesure de surveillance numérique n’est donc pas anodine : elle traduit une volonté de filtrer les individus non seulement sur des critères objectifs, mais aussi sur la base de leurs opinions politiques.
Les visas F, M et J ne s’adressent pas à des migrants économiques ou clandestins, mais à des profils généralement bien identifiés, encadrés, et à haut potentiel académique. Pourtant, ce sont ces mêmes jeunes qui deviennent aujourd’hui les cibles d’une surveillance numérique intrusive. L’obligation d’ouvrir ses comptes Facebook, X, TikTok ou LinkedIn revient à offrir aux autorités un accès complet à sa pensée, ses prises de position, ses engagements, voire ses doutes.
On franchit ici un cap dangereux : la vérification d’identité devient prétexte à un tri idéologique. Ce ne sont plus seulement les actes, mais les opinions, même passées, qui deviennent suspectes. Une simple critique d’une opération militaire américaine ou un partage de contenu pro-palestinien peut désormais valoir un refus de visa. Une telle approche relève moins d’une logique sécuritaire que d’une volonté de conditionner l’accès à l’espace américain à une forme d’alignement politique.
Cette mesure encourage de facto l’autocensure. L’étudiante sénégalaise ayant supprimé ses publications critiques sur Israël ou les États-Unis incarne cette réalité : pour obtenir une bourse, mieux vaut renier ses convictions. Le message est clair : être admis sur le sol américain implique désormais de renoncer à toute prise de position jugée trop critique ou trop engagée. C’est une violation silencieuse mais grave de la liberté d’opinion.
Bien que la politique semble s’appliquer uniformément, les cibles réelles sont clairement identifiables : les individus ayant manifesté un soutien à la Palestine ou critiqué l’attitude des États-Unis dans les conflits du Moyen-Orient. Cette mesure ne filtre pas les risques sécuritaires mais les pensées dissidentes. Ce n’est pas une précaution, c’est une sanction déguisée.
Des politiques similaires ont été observées dans d’autres pays sous l’administration Trump, notamment envers des ressortissants iraniens ou syriens. Ces pratiques avaient alors été dénoncées par plusieurs organisations de défense des droits humains pour leur caractère discriminatoire.
Si cette logique se généralise, elle risque de transformer durablement l’usage que les jeunes Africains et Sénégalais en particulier font des réseaux sociaux. Le débat, l’engagement, la critique, pourtant essentiels à toute vie démocratique, laisseront place à une prudence silencieuse. Un espace d’expression deviendra un terrain miné.
Le renforcement de la sécurité ne peut, en aucun cas, justifier une atteinte aux libertés fondamentales. La politique actuelle de l’ambassade américaine à Dakar est non seulement excessive, mais elle est idéologiquement orientée. Elle discrimine, elle exclut, elle conditionne. Il doit la dénoncer pour ce qu’elle est : une tentative de sélection politique masquée sous couvert de vérification administrative.
Le Sénégal ne doit pas tolérer cette dérive. Les étudiants et chercheurs ne doivent pas être obligés de choisir entre une opportunité académique et leur intégrité intellectuelle. Refusons que la liberté d’opinion devienne une monnaie d’échange pour obtenir un visa.
Article opinion écrit par la créatrice de contenu : Aminata D. Sy.
Mis en ligne : 14/08/2025
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