« Ils ont pris la maison » : Le combat d’un frère - Notre Continent
> NOTRE CONTINENT > - Confidence | Par Eva | Publié le 15/08/2025 10:08:30

« Ils ont pris la maison » : Le combat d’un frère

Je m’appelle Moustapha, j’approche de la trentaine. Je suis l’aîné d’une fratrie de quatre enfants. Notre vie a basculé il y a quatre ans, lorsque mon père est décédé brutalement. Il n’était pas parfait, mais il était le pilier de notre maison. Son départ a laissé un vide immense… et bien plus encore.

À Dakar, notre maison familiale, située dans un quartier modeste mais respectable, a été immédiatement récupérée par les membres de la famille paternelle. Leur décision fut sans appel : mettre les lieux en location et redistribuer les bénéfices… sans nous consulter. Pourtant, j’étais celui qui avait toujours accompagné mon père dans la gestion de ses biens. C’est moi qui avais repéré les locataires potentiels pour ses studios, c’est moi qui connaissais les moindres détails. Mais depuis sa mort, ma voix n’a plus eu de poids.

Avec ma mère et ma petite sœur, encore au lycée, nous avons dû quitter la maison. Direction une autre ville, plus éloignée, moins chère. Un exil imposé. Avant de partir, une demi-sœur, fille de mon père, nous avait promis de l’aide. Elle parlait de « solidarité familiale »… Ces mots sonnaient alors comme une promesse d’espoir. Mais un an s’est écoulé. Pas un franc. Pas un appel.

Pire encore : certains de nos oncles et tantes insinuent aujourd’hui que ma sœur a quitté l’école, que nous « exagérons » nos besoins, et qu’à ce titre, nous ne méritons plus leur soutien. Une tante, jadis très proche de notre mère, ignore désormais ses appels. D’autres, plus cyniques, vont jusqu’à se moquer de notre situation.

Mais dans cette tourmente, une seule chose me donne de la force : ma sœur. Malgré les épreuves, j’ai trouvé un petit boulot dans un garage. Ce n’est pas grand-chose, mais cela me permet de payer ses frais de scolarité. Aujourd’hui, elle est en Terminale. Et chaque jour, je la regarde réviser avec acharnement, le visage tendu vers l’avenir. C’est ma plus belle victoire.

Du côté de la famille maternelle, l’attitude est différente. Pas riche, mais toujours présente. Un mot de soutien, un plat envoyé par une cousine, un transfert modeste de 10.000 francs CFA… Cela n’a pas de prix. Ce n’est pas la quantité, c’est l’humanité.

Ce que je retiens de cette expérience ? Qu’au Sénégal, comme ailleurs, la mort ne révèle pas seulement la douleur, elle révèle aussi les visages. Certains sourires n’étaient que de façade. Certaines promesses n’étaient que du vent.

Mais malgré les trahisons, malgré le rejet, je reste debout. Car je ne veux pas que ma sœur hérite de notre douleur. Je veux qu’elle hérite d’une chance. Et même si je dois tout reconstruire avec mes seules mains, je le ferai. Pour elle. Pour ma mère. Pour la dignité que mon père, malgré ses erreurs, nous avait transmise.

Article opinion écrit par le créateur de contenu : Anonyme.
Mis en ligne : 15/08/2025

La plateforme NOTRECONTINENT.COM permet à tous de diffuser gratuitement et librement les informations et opinions provenant des citoyens. Les particuliers, associations, ONG ou professionnels peuvent créer un compte et publier leurs articles Cliquez-ici.


Réagir à cet article

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *

0 commentaires

Réagir à cet article

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *

0 commentaires

Copyright © 2023 www.notrecontinent.com

To Top