Condamnée pour un choix désespéré : Son partenaire reste intouchable - Notre Continent
> NOTRE CONTINENT > - Justice | Par Eva | Publié le 28/08/2025 08:08:30

Condamnée pour un choix désespéré : Son partenaire reste intouchable

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Une lycéenne de 23 ans, mère de deux enfants et divorcée, risque la prison pour avoir avorté. Son amant, lui, court toujours. L’affaire de R. Faye, jugée cette semaine à Mbour, est un nouveau symbole de l’injustice flagrante qui frappe les femmes au Sénégal. Alors que la jeune femme est traînée devant les tribunaux pour avoir mis fin à une grossesse non désirée, l’homme responsable de cette situation un chauffeur de Sindia qui l’a abandonnée après l’avoir mise enceinte n’est même pas inquiété.

Ce cas n’est pas isolé : il révèle une société où les femmes paient le prix fort de la grossesse, de l’avortement et de la honte, tandis que les hommes bénéficient d’une impunité systémique. La loi, les mœurs et la justice sont complices de cette inégalité. Il faut le dire haut et fort : au Sénégal, une femme qui avorte est une criminelle. Un homme qui abandonne sa compagne est un homme libre.

Au Sénégal, l’avortement est interdit sauf en cas de danger pour la vie de la mère. Une loi héritée de la colonisation, jamais révisée, qui condamne les femmes à la clandestinité et aux risques mortels. Chaque année, des milliers d’entre elles recourent à des méthodes dangereuses, faute d’alternative légale et sûre. Pourtant, qui parle des hommes qui les mettent enceinte et disparaissent ? Qui poursuit ceux qui menacent, abandonnent ou nient leur paternité ? Dans l’affaire de R. Faye, tout est dit : elle a avorté sous la pression de menaces, elle est arrêtée ; lui a fui ses responsabilités, il est introuvable. La justice sénégalaise a des yeux seulement pour les femmes.

R. Faye a 23 ans, elle est lycéenne, divorcée et mère de deux enfants. Sa grossesse non désirée est le résultat d’une relation avec un chauffeur rencontré pendant la Tabaski. Dès qu’elle tombe enceinte, l’homme disparaît. Pire, selon ses déclarations, il l’aurait menacée de mort pour qu’elle avorte. Pourtant, devant le tribunal de Mbour, seule R. Faye est sur le banc des accusés. Le procureur requiert contre elle l’application stricte de la loi. Mais où est la plainte contre l’amant pour abandon de famille ? Où est l’enquête sur ses menaces ? Rien. Silence radio.

Les stéréotypes genrés font leur œuvre : la femme est coupable de tout. Coupable d’avoir été « séduisante », coupable d’être tombée enceinte, coupable d’avoir avorté. L’homme, lui, est absent du procès, absent des débats, absent des responsabilités. La société sénégalaise, dans son ensemble, valide cette inégalité. Les femmes sont les gardiennes de la morale, les hommes les éternels irresponsables. Et la loi les couvre.

R. Faye a nommé son amant. Elle a décrit ses menaces. Pourtant, aucune poursuite n’est engagée contre lui. Pourquoi ? Parce que, au Sénégal, un homme qui abandonne une femme enceinte n’est pas un délinquant. Il est simplement un homme qui exerce son « droit » à l’irresponsabilité. Les gendarmes de Diass ont arrêté R. Faye en urgence, mais personne ne semble pressé de retrouver le chauffeur de Sindia. La justice a des priorités : punir la femme, protéger l’homme.

Les hommes sénégalais savent qu’ils peuvent menacer, abandonner ou nier leur paternité sans conséquence. Les lois sur l’abandon de famille existent, mais elles sont rarement appliquées. Les tribunaux préfèrent poursuivre les femmes pour avortement que les hommes pour désertion. Résultat : les femmes se retrouvent seules face à la grossesse, à la honte et à la répression judiciaire. R. Faye n’est pas une exception. Elle est la victime d’un système qui considère que la sexualité des femmes doit être contrôlée, tandis que celle des hommes reste sans limite ni sanction.

Comparons avec d’autres pays. En Tunisie, l’avortement est légal depuis des décennies, et les pères sont tenus de contribuer à l’entretien de l’enfant. En France, un homme qui abandonne une femme enceinte peut être poursuivi pour non-représentation d’enfant. Au Sénégal, la loi est claire : la femme porte seule le fardeau. Même quand elle est mineure, même quand elle est victime de viol, même quand sa vie est en danger. La justice sénégalaise est une justice patriarcale : elle punit les femmes et excuse les hommes.

En Afrique du Sud, l’avortement est légal et gratuit. Au Maroc, malgré une loi restrictive, les associations luttent pour faire reconnaître les droits des femmes. Même au Bénin, voisin du Sénégal, des avancées ont été faites pour dépénaliser l’avortement en cas de viol ou de risque pour la santé. Mais au Sénégal, rien. Pire : on recule. Les femmes sont criminalisées, les hommes protégés.

Et que dire des pays occidentaux ? En Suède, un homme qui abandonne une femme enceinte peut être condamné pour « négligence parentale ». En Espagne, la loi sur l’égalité impose aux pères d’assumer leurs responsabilités. Au Sénégal, on préfère enfermer les femmes et laisser courir les hommes.

L’affaire R. Faye doit être un électrochoc. Tant que les hommes ne seront pas tenus pour responsables de leurs actes, les femmes continueront à payer le prix fort. Tant que la justice sénégalaise fermera les yeux sur l’abandon de famille et les menaces, les R. Faye seront condamnées à se débrouiller seules, dans la clandestinité et la peur.

Il faut exiger :
Des poursuites systématiques contre les pères qui abandonnent leurs enfants ou menacent leurs compagnes.
Une éducation sexuelle obligatoire pour briser les stéréotypes et prévenir les grossesses non désirées.

La justice ne doit plus être l’outil d’une société qui humilie les femmes et protège les hommes. R. Faye ne doit pas être la seule sur le banc des accusés. Son amant doit répondre de ses actes. Et le Sénégal doit enfin reconnaître que les droits des femmes ne sont pas négociables.

Article opinion écrit par le créateur de contenu : Samba Diop.
Mis en ligne : 28/08/2025

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