Attouchements présumés : La rue juge avant les tribunaux - Notre Continent
> NOTRE CONTINENT > - Fait divers | Par Eva | Publié le 30/08/2025 02:08:15

Attouchements présumés : La rue juge avant les tribunaux

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Dans la nuit du 20 au 21 août 2025, la plage jouxtant la Cour de cassation de Dakar a été le théâtre d’une scène inquiétante. Trois hommes, identifiés comme E. Diop, M. Touré et Pape O. Mbaye, ont été surpris par des passants alors qu’ils s’adonnaient à des attouchements dans l’eau. Alertée, la foule s’est rapidement rassemblée, menaçant de lyncher les suspects. L’intervention de la police a permis d’éviter un drame, bien que l’un des mis en cause ait été blessé au bras. Une enquête judiciaire est en cours pour déterminer les circonstances de l’incident.

Cet événement soulève une question fondamentale : où est la limite entre indignation légitime et justice sauvage ? La réaction de la foule, prête à lyncher les suspects sans preuve tangible, rappelle les heures sombres de l’histoire, où la « loi de Lynch » permettait à des groupes de citoyens d’exécuter sommairement des individus présumés coupables .

La présomption d’innocence, principe fondamental du droit pénal, stipule que toute personne est réputée innocente tant que sa culpabilité n’a pas été légalement démontrée . En agissant ainsi, la foule a non seulement bafoué ce principe, mais a également mis en danger la vie de citoyens, fragilisant ainsi les fondements de l’État de droit.

La tentation de rendre justice soi-même, face à des actes jugés immoraux ou répréhensibles, est compréhensible. Cependant, céder à cette tentation ouvre la voie à une justice expéditive, où la violence devient le seul moyen d’expression. Ce phénomène, observé dans de nombreuses sociétés, est souvent alimenté par des rumeurs, des émotions collectives et une méfiance envers les institutions judiciaires.

En 2020, au Mali, un jeune homme accusé à tort de vol avait été battu à mort par une foule, avant que son innocence ne soit révélée. En 2023, en Côte d’Ivoire, un autre cas de lynchage avait défrayé la chronique, après qu’un homme, soupçonné de pédophilie, avait été brûlé vif. Ces exemples montrent que la justice populaire n’est ni rare ni marginale, elle est devenue, pour certains, une réponse « normale » à des crimes perçus comme intolérables. Pourtant, chaque fois, les conséquences sont les mêmes : des vies brisées, des familles détruites, et une société qui s’enfonce un peu plus dans la barbarie.

En outre, cette justice populaire peut être sélective et discriminatoire, ciblant des individus ou des groupes spécifiques en fonction de préjugés sociaux, ethniques ou économiques. Elle risque ainsi de renforcer les divisions au sein de la société, au lieu de promouvoir l’unité et la cohésion.

Il faut rappeler que la justice appartient aux institutions légales et non à la rue. Les citoyens doivent être éduqués à respecter les procédures judiciaires, à faire confiance aux autorités compétentes et à rejeter toute forme de violence comme moyen de résolution des conflits. Les médias, les leaders d’opinion et les éducateurs ont un rôle crucial à jouer dans cette sensibilisation.

L’incident survenu à Dakar n’est pas un simple fait divers. Il est le reflet d’une dérive inquiétante vers une justice expéditive et violente. Il est de notre devoir à tous de veiller à ce que la loi et l’ordre ne soient pas remplacés par la loi du plus fort. La dignité humaine et le respect des droits fondamentaux doivent primer sur la colère et l’émotion.

Article opinion écrit par le créateur de contenu : Samba Coulibaly.
Mis en ligne : 30/08/2025

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