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Récemment, une opération de la Brigade de recherches a permis l’interpellation de deux individus, Aliou N. et Moussa D., pour escroquerie au visa et falsification de documents. Ces hommes auraient trompé plusieurs personnes en leur promettant des visas pour la Turquie, utilisant de faux passeports, des cachets de l’ODCAV, des relevés bancaires et des registres de commerce falsifiés. Si l’arrestation des présumés escrocs est une bonne nouvelle, elle révèle une réalité bien plus inquiétante : les victimes de ces arnaques risquent de se retrouver doublement pénalisées.
Non seulement elles ont perdu des sommes importantes, mais elles pourraient aussi être poursuivies pour usage de faux documents, alors qu’elles n’étaient que des proies faciles pour des réseaux criminels bien organisés.
L’escroquerie au visa n’est pas un cas isolé au Sénégal. Des affaires similaires se multiplient, avec des réseaux qui prospèrent grâce à la vulnérabilité de ceux qui rêvent d’une vie meilleure à l’étranger. En août 2025, la Division nationale de lutte contre le trafic de migrants (DNLT) a encore démantelé un réseau spécialisé dans la fourniture de faux visas pour la France, impliquant des faux documents et des promesses mensongères. Les victimes, après avoir versé des centaines de milliers de francs CFA, se voient remettre des documents contrefaits, souvent détectés trop tard, parfois même à l’aéroport, au moment de l’embarquement. Pire, certaines se retrouvent impliquées malgré elles dans des procédures judiciaires pour usage de faux, alors qu’elles ignoraient la supercherie.
Le problème ne se limite pas à l’escroquerie initiale. Les victimes, souvent issues de milieux modestes et peu informées des procédures administratives, sont les premières à subir les conséquences. Au Canada, par exemple, l’usage de faux documents dans une demande de visa peut entraîner une interdiction de territoire de cinq ans, voire une annulation définitive de toute demande d’immigration. Au Sénégal, bien que les textes prévoient des sanctions contre les fraudeurs, les victimes sont rarement protégées. Elles peuvent être fichées, interdites de voyage, ou même poursuivies, alors qu’elles ont été manipulées par des professionnels de la fraude.
Premièrement, l’État sénégalais manque de mécanismes de protection pour les victimes d’escroquerie au visa. Les autorités se contentent souvent de démanteler les réseaux après coup, sans prévenir ni accompagner ceux qui ont été trompés. Deuxièmement, les ambassades et les services consulaires pourraient faire plus pour informer les candidats aux visas des risques et des voies légales, plutôt que de laisser des intermédiaires douteux prospérer. Enfin, la justice sénégalaise doit distinguer clairement les coupables des victimes : aujourd’hui, une personne escroquée qui utilise un faux document sans le savoir peut se retrouver dans le collimateur de la loi, alors que les vrais responsables restent parfois en liberté.
Dans d’autres pays, comme le Canada, les autorités mettent l’accent sur la prévention et la protection des victimes, en ciblant surtout les organisateurs de fraudes. Au Sénégal, la réponse reste trop souvent répressive, sans distinction entre ceux qui ont agi en toute bonne foi et les véritables criminels. En Afrique de l’Ouest, des réseaux transnationaux d’escroquerie au visa opèrent en toute impunité, exploitant les failles des systèmes administratifs et l’absence de coopération régionale efficace.
Il faut que l’État sénégalais prenne ses responsabilités. Protéger les victimes doit être une priorité : cela passe par une meilleure information, un accompagnement juridique, et une justice qui ne confonde pas les bourreaux et leurs proies. Les ambassades, les services de l’immigration et les forces de l’ordre doivent travailler ensemble pour démanteler les réseaux avant qu’ils ne fassent plus de dégâts, et pour garantir que les victimes ne paient pas deux fois, une fois en argent, une fois en dignité.
Nous exigeons que les autorités renforcent la sensibilisation sur les risques d’escroquerie au visa, mettent en place des cellules d’assistance pour les victimes afin qu’elles ne soient pas abandonnées à leur sort et réforment la justice pour qu’elle distingue clairement les escrocs de ceux qui ont été trompés.
Les victimes de l’escroquerie au visa méritent justice, pas une double peine. L’heure est venue d’agir.
Article opinion écrit par la créatrice de contenu : Sarata Fall.
Mis en ligne : 15/09/2025
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