Actes de naissance vendus au plus offrant : L’enquête qui secoue le Sénégal - Notre Continent
> NOTRE CONTINENT > - Fait divers | Par Eva | Publié le 28/09/2025 09:09:15

Actes de naissance vendus au plus offrant : L’enquête qui secoue le Sénégal

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La récente arrestation de cinq individus, dont deux officiers d’état civil, impliqués dans un vaste réseau de fraude aux registres d’état civil à Thiaroye-sur-Mer, a révélé un scandale d’une gravité inquiétante. Pendant près de trente ans, des registres parallèles, non authentifiés et illégaux, ont servi à fabriquer des actes de naissance contre rémunération, profitant à des élèves tricheurs, des étrangers en situation irrégulière, ou des adultes souhaitant rajeunir leur âge.

Ce système, démasqué grâce à la Direction de l’automatisation des fichiers, illustre une réalité accablante : au Sénégal, des documents officiels, garants de l’identité et des droits des citoyens, se monnayent comme des marchandises. Ce dysfonctionnement n’est pas un cas isolé, mais le symptôme d’une banalisation de la corruption au sein des institutions censées protéger l’intérêt général. Il est temps de dénoncer cette marchandisation de l’état civil et ses conséquences désastreuses pour la confiance entre les citoyens et l’État.

Les dysfonctionnements de l’état civil au Sénégal ne datent pas d’hier. Malgré des investissements importants pour la digitalisation et des campagnes de sensibilisation, les fraudes persistent, privant des milliers de citoyens de leurs droits fondamentaux. Les cas de duplications de numéros de registre, d’usurpations d’identité, ou d’absence de déclaration de naissance sont légion, avec des répercussions dramatiques sur l’accès à l’éducation, à la santé, et même à la nationalité.

À Dakar, des citoyens découvrent avec stupeur que leur identité a été usurpée, tandis que des élèves non déclarés à la naissance se voient autorisés à passer des examens sans papiers valides, encourageant ainsi les dérives. Pire, ces fraudes sapent la crédibilité du Sénégal à l’international, où des actes sénégalais sont désormais regardés avec méfiance, notamment à l’étranger, où des compatriotes voient leur nationalité remise en cause à cause de la fiabilité douteuse de leurs documents.

L’affaire de Thiaroye-sur-Mer met en lumière un système organisé, où des officiers d’état civil, censés incarner la rigueur administrative, deviennent des commerçants de faux papiers. Les 26 registres frauduleux saisis, ouverts entre 1995 et 2024, révèlent une fraude à grande échelle, touchant des catégories variées : élèves trop âgés pour passer des examens, adultes cherchant à modifier leur âge, ou étrangers obtenant illégalement une identité sénégalaise. Ces pratiques ne profitent qu’à une minorité de malins, au détriment des honnêtes citoyens, qui voient leurs droits bafoués et leur confiance dans les institutions ébranlée.

Pour l’éducation : des candidats honnêtes sont lésés par des tricheurs qui occupent des places dans les écoles ou aux examens.

Pour la société : la fraude généralisée crée un climat de défiance, où chacun doute de la légitimité des diplômes, des identités, et même des droits de ses concitoyens.

Pour l’État : chaque faux acte est une faille dans la sécurité nationale, une porte ouverte à des abus de toutes sortes, et un frein au développement.

Le Sénégal n’est malheureusement pas un cas unique en Afrique de l’Ouest. En Côte d’Ivoire, l’Office national de l’état civil a dû créer un réseau de référents pour lutter contre la fraude documentaire, tant le phénomène est répandu. Au Bénin, au Nigeria, ou au Mozambique, les fraudes à l’identité et les faux documents se multiplient, souvent facilités par des systèmes de vérification obsolètes ou corrompus. Partout, les mêmes causes produisent les mêmes effets : des institutions fragilisées, une économie informelle dopée par la fraude, et des citoyens qui paient le prix de l’impunité.

Face à cette situation, les demi-mesures ne suffiront plus. Il est urgent que l’État sénégalais :

Sanctionne exemplairement les responsables, y compris les hauts fonctionnaires complices, pour envoyer un signal clair : la corruption ne paiera plus. Renforce les contrôles et accélère la digitalisation, non pas comme un simple outil technique, mais comme une révolution administrative, avec des audits réguliers et indépendants. Restaure la confiance en garantissant à chaque citoyen un accès transparent et sécurisé à son état civil, sans passe-droits ni trafics.

La fraude à l’état civil n’est pas une fatalité. Elle est le résultat de lâchetés collectives et d’un manque de volonté politique. Il est temps que le Sénégal montre l’exemple, en faisant de la lutte contre la corruption une priorité absolue. Les citoyens, les élèves, les familles honnêtes le méritent. L’État doit cesser d’être complice, par son inaction, de ceux qui pillent les droits des autres. La crédibilité de la nation en dépend.

Article opinion écrit par la créatrice de contenu : Anta D. Diop.
Mis en ligne : 28/09/2025

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