L’épidémie des décès prématurés : Astou Mbaye et les autres - Notre Continent
> NOTRE CONTINENT > - Société | Par Eva | Publié le 29/09/2025 08:09:00

L’épidémie des décès prématurés : Astou Mbaye et les autres

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L’annonce du décès de l’actrice Astou Mbaye, jeune étoile montante du théâtre sénégalais, a plongé le monde artistique dans la consternation. Sa disparition, à un âge où la vie devrait être synonyme de projets et d’espoir, rappelle une réalité de plus en plus inquiétante : ces dernières années, de nombreux jeunes, mais aussi des moins jeunes, s’effondrent brutalement, victimes de malaises ou de maladies fulgurantes. Pourtant, la vie continue, chacun vaque à ses occupations sans réellement s’interroger ni chercher de réponses. Autrefois, c’étaient surtout les personnes âgées qui nous quittaient ; aujourd’hui, c’est souvent l’inverse. Ce constat, aussi cruel qu’alarme, mérite une réflexion collective urgente.

Astou Mbaye, connue pour son rôle dans la série « Double Vie », incarnait le talent et la jeunesse. Sa mort prématurée, survenue à Paris dans des circonstances encore non élucidées, est un symbole de cette tendance lourde : la mortalité précoce frappe de plus en plus de jeunes adultes, au Sénégal comme ailleurs en Afrique. Les causes restent souvent floues, les réactions éphémères, et les questions sans réponse. Pourtant, les chiffres sont là : selon l’ANSD, l’espérance de vie au Sénégal reste inférieure à celle des pays développés, et les décès de jeunes adultes, autrefois exceptionnels, deviennent une triste routine. En Europe, on observe aussi une hausse des décès prématurés, mais avec une différence majeure : là-bas, chaque cas déclenche des enquêtes, des débats publics et des plans d’action. Chez nous, le silence et la résignation semblent trop souvent l’emporter.

La disparition d’Astou Mbaye n’est pas un cas isolé. Elle s’inscrit dans une série de drames similaires, où des jeunes, en pleine force de l’âge, sont emportés par des maladies ou des accidents dont les causes ne sont pas toujours clarifiées. Les réactions, bien que sincères, restent limitées à des hommages posthumes et à des condoléances sur les réseaux sociaux. Où sont les investigations approfondies ? Où sont les politiques publiques pour prévenir ces tragédies ? Le monde artistique et la société civile sénégalaise expriment leur tristesse, mais cette émotion collective ne se transforme que rarement en action concrète.

Plusieurs facteurs expliquent cette indifférence généralisée. D’abord, une certaine fatalité culturelle : on attribue trop vite ces décès à la volonté divine, sans chercher à comprendre les causes médicales, environnementales ou sociales. Ensuite, un système de santé souvent défaillant, où les négligences médicales et le manque de moyens sont régulièrement pointés du doigt. Enfin, l’absence de transparence : les circonstances de nombreux décès restent mystérieuses, comme celui d’Astou Ndour, fille d’un ancien haut fonctionnaire, dont la famille réclame une autopsie pour élucider les causes. Comment lutter contre un fléau quand on refuse d’en identifier les racines ?

La comparaison avec l’Europe est édifiante. En France, une hausse de 2,1 % des décès quotidiens en 2025 a immédiatement déclenché des analyses et des mesures préventives. En Afrique, les mêmes signaux d’alerte sont trop souvent ignorés. Pourtant, les enjeux sont les mêmes : stress, pollution, alimentation, accès aux soins. Mais chez nous, ces problèmes sont aggravés par le chômage des jeunes (34,4 % au premier trimestre 2024), la précarité et un système de santé sous-financé.

En Afrique subsaharienne, la mortalité des jeunes adultes est six fois plus élevée qu’en Amérique du Nord. Les causes ? Des maladies évitables, des accidents, des négligences médicales, et un manque criant de prévention. En Europe, chaque décès prématuré est considéré comme un échec collectif ; en Afrique, il est trop souvent perçu comme une fatalité. Cette différence d’approche explique en partie pourquoi les progrès sont si lents.

La mort d’Astou Mbaye doit servir de déclic. Il est temps de briser le silence, d’exiger des réponses et d’agir. Les jeunes ne devraient pas mourir avant leurs aînés. La société sénégalaise, et plus largement africaine, doit cesser de considérer ces disparitions comme inévitables. Il est urgent d’investir dans la santé, la recherche et la prévention, et de refuser l’indifférence. Sinon, combien d’autres talents, combien d’autres vies seront encore sacrifiées sur l’autel de la résignation ?

Article opinion écrit par la créatrice de contenu : Eve Sagna.
Mis en ligne : 29/09/2025

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