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La découverte macabre de cinq bébés morts dans les poubelles d’Ouest-Foire, à Dakar, n’est pas un simple fait divers. C’est le symptôme d’une société qui a failli à sa mission la plus élémentaire : protéger ses plus vulnérables. Derrière ce drame se cache l’échec collectif d’un État, d’une communauté et d’un système censés garantir la dignité et la sécurité de chaque enfant. Ce n’est pas seulement l’histoire de cinq vies perdues, mais celle d’une humanité en crise, où l’indifférence, la précarité et l’absence de politiques publiques efficaces transforment des décharges en tombes pour innocents.
Le Sénégal, souvent cité pour sa stabilité démocratique et sa croissance économique, compte près de 19 millions d’habitants en 2025, avec une natalité élevée et une jeunesse en quête d’avenir.
Pourtant, derrière ces chiffres se cachent des réalités brutales : des quartiers surpeuplés comme Ouest-Foire, où les déguerpissements massifs et l’absence de recasement ont aggravé la misère, l’insalubrité et l’insécurité. Les familles y vivent entassées, sans accès à des services de base, dans un environnement où le désespoir l’emporte sur l’espoir. Les mères en détresse, souvent seules et sans soutien, se retrouvent face à des choix impossibles, faute de structures d’accueil, de planning familial accessible ou de filets sociaux solides.
La présence de ces bébés dans les ordures n’est pas un hasard. Elle est le résultat d’une chaîne de défaillances : absence de prévention, manque de centres d’accueil pour les mères en difficulté, stigmatisation des grossesses non désirées, et surtout, une protection de l’enfance réduite à des promesses creuses. Les politiques publiques, malgré les engagements internationaux et les stratégies nationales, peinent à se concrétiser.
Les enfants, bien que placés au cœur des discours, restent les premières victimes de l’inertie des institutions. Pourtant, des solutions existent ailleurs : des pays comme la France ou l’Allemagne ont mis en place des « boîtes à bébés » ou des numéros d’urgence anonymes pour éviter les abandons tragiques. Au Sénégal, rien de tel n’est systématiquement déployé.
L’État porte une lourde responsabilité. Malgré les appels répétés des acteurs de la protection de l’enfance, les budgets alloués restent insuffisants, les campagnes de sensibilisation inexistantes, et les mécanismes de prise en charge défaillants. Mais la société civile, les voisins, les leaders religieux et les médias sont aussi complices par leur silence. Comment expliquer qu’un bébé puisse finir sa vie dans une poubelle sans que personne n’intervienne ? La réponse est simple : parce que la vie des plus pauvres, des plus invisibles, compte moins.
Au Maroc, 24 bébés sont abandonnés chaque jour, souvent dans des conditions similaires. Aux États-Unis, dans des États comme le Texas, l’interdiction de l’avortement a conduit à une recrudescence des abandons de nourrissons dans les poubelles. Pourtant, des mécanismes comme les « boîtes à bébés » ou les lois sur l’abandon anonyme ont permis, ailleurs, de sauver des vies. Ces exemples montrent qu’il est possible d’agir, à condition que la volonté politique soit au rendez-vous.
Il faut cesser les discours et passer à l’action. L’État doit créer des centres d’accueil d’urgence pour les mères en détresse et les nouveau-nés abandonnés, renforcer les campagnes de sensibilisation sur les droits des femmes et la protection de l’enfance, mettre en place des numéros verts anonymes pour permettre aux mères de confier leur enfant en toute sécurité, et sanctionner l’inaction : les responsables politiques doivent rendre des comptes.
La découverte de ces cinq bébés morts doit servir d’électrochoc. Une société qui abandonne ses enfants dans les ordures a perdu son âme. On doit retrouver notre humanité, briser le silence et exiger des actes concrets. Sinon, la prochaine poubelle pourrait bien devenir le tombeau d’un autre innocent. La question n’est pas de savoir si nous pouvons nous le permettre, mais si nous pouvons nous permettre de ne rien faire.
Article opinion écrit par la créatrice de contenu : Salimata Ndour.
Mis en ligne : 01/10/2025
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