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Dans un entretien récent, l’ancien président Macky Sall a évoqué les tournants de sa carrière politique, notamment sa rupture avec Abdoulaye Wade et son ascension vers la présidence. Pourtant, c’est bien sa gestion de la crise politique avec le parti Pastef, entre 2021 et 2024, qui restera comme l’un des épisodes les plus controversés de son mandat. Malgré son héritage d’ingénieur et d’homme d’État, Macky Sall a laissé s’installer une instabilité dont les conséquences pèsent encore sur le pays.
Son incapacité à anticiper et à contenir la montée du Pastef, puis sa réaction tardive et brutale, ont plongé le Sénégal dans une crise sans précédent. Une analyse des faits révèle une gestion politique défaillante, où l’indécision a cédé la place à la répression, sans jamais résoudre les tensions profondes.
Dès 2021, le parti Pastef, dirigé par Ousmane Sonko, est devenu le fer de lance de la contestation contre le régime de Macky Sall. Accusations de viol, arrestations arbitraires, dissolution du parti, report de l’élection présidentielle : chaque étape a été marquée par des décisions contestées, souvent perçues comme des manœuvres pour éliminer l’opposition plutôt que pour apaiser le jeu démocratique. Le « dialogue national » convoqué en 2023 n’a été qu’un leurre, incapable de rétablir la confiance ou de désamorcer la colère populaire. Pendant ce temps, les rues de Dakar et d’autres villes sénégalaises s’embrasaient, avec des dizaines de morts et des centaines de blessés, tandis que les forces de l’ordre étaient déployées pour contenir une contestation de plus en plus radicale.
Macky Sall a sous-estimé la détermination du Pastef et la profondeur de la crise sociale. En laissant le parti gagner en influence sans proposer de réponse politique crédible, il a créé un vide que la répression seule ne pouvait combler. La dissolution du Pastef, présentée comme une mesure contre un mouvement « insurrectionnel », n’a fait qu’exacerber les tensions et discréditer davantage son régime. Pire, les rapports de la Cour des comptes publiés après son départ révèlent une gestion financière désastreuse, avec une dette publique explosant entre 2019 et 2024, passant de 9,85 % à plus de 12 % du PIB, et des manquements graves dans la gestion des deniers publics. Ces éléments confirment que le problème n’était pas seulement politique, mais aussi économique et moral.
Aucun président ne peut tolérer une déstabilisation de la République, mais la méthode employée par Macky Sall a été contre-productive. En refusant le dialogue réel et en recourant systématiquement à la force, il a alimenté le cycle de la violence. Les arrestations massives, les procès expéditifs et la dissolution du Pastef ont été perçus comme des actes de faiblesse, non de fermeté. Aujourd’hui, le nouveau président, Diomaye Faye, issu du Pastef, doit gérer un héritage empoisonné : un pays fracturé, des finances publiques exsangues, et une jeunesse désabusée qui n’a plus confiance dans les institutions.
La crise sénégalaise n’est pas isolée. En Côte d’Ivoire, Alassane Ouattara a aussi été accusé de manipuler le processus électoral pour se maintenir au pouvoir. Au Mali et au Burkina Faso, les coups d’État ont été justifiés par l’incapacité des dirigeants à répondre aux attentes populaires. Mais le Sénégal, souvent cité en exemple pour sa stabilité démocratique, a vu son image ternie. Contrairement à d’autres pays, où la répression a conduit à des régimes autoritaires, le Sénégal a évité le pire grâce à son ancrage démocratique. Pourtant, l’alternance de 2024, bien que pacifique, a révélé la fragilité des institutions et la nécessité d’une refonte profonde de la gouvernance.
Macky Sall restera dans l’histoire comme le président qui a laissé le Pastef semer le trouble, puis a tenté de le réprimer sans succès. Son héritage est celui d’un pays divisé, endetté, et en quête de renouveau. Diomaye Faye, aujourd’hui à la tête de l’État, a promis une rupture. Mais pour réussir, il devra éviter les erreurs de son prédécesseur : écouter la jeunesse, restaurer la confiance dans les institutions, et surtout, ne pas répéter les mêmes schémas de gestion autoritaire. L’histoire jugera Macky Sall non seulement sur ses réalisations, mais aussi sur les crises qu’il n’a su ni prévenir ni résoudre.
La leçon est claire : en politique, l’inaction et la répression sont deux faces d’une même médaille, et aucune ne mène à la stabilité. Le Sénégal mérite mieux.
Article opinion écrit par le créateur de contenu : Laye Manga.
Mis en ligne : 04/10/2025
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