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Le récit de M. Diongue, une commerçante de 66 ans arrêtée à Touba pour trafic de chanvre indien, glace le sang. Coincée alors qu’elle transportait un demi-bloc de drogue et retrouvée en possession de 4,7 kg chez elle, cette sexagénaire a enfreint non seulement la loi, mais aussi les valeurs de respectabilité et de piété liées à son âge et à la Ville sainte. Son cas dépasse le simple fait divers judiciaire : il symbolise une trahison morale.
Une aînée, supposée incarner sagesse et exemplarité, s’adonne à une activité qui menace les fondements mêmes de sa communauté. Cette histoire soulève une interrogation : quand les gardiens des valeurs deviennent eux-mêmes auteurs de leur déclin, que reste-t-il de notre moralité collective ?
Touba n’est pas une ville comme les autres. Cité religieuse et cœur spirituel du Sénégal, elle incarne pour des millions de fidèles la discipline, la dévotion et le respect. Chaque geste y est observé, chaque comportement évalué, car Touba se veut un modèle, un phare de vertu dans un monde souvent perçu comme corrompu. Les aînés occupent une place particulière : dépositaires de la tradition et guides des jeunes générations, ils doivent inspirer par leurs actes et leurs paroles.
Dans ce contexte, l’affaire M. Diongue prend une dimension particulièrement douloureuse. Comment une femme de 66 ans, commerçante et figure supposée respectable, peut-elle se retrouver impliquée dans le trafic de drogue ? Si même ceux que l’on considère comme piliers moraux succombent à l’illégal, qui peut encore incarner l’intégrité ?
Le chanvre indien, loin d’être une substance anodine, est un fléau qui ronge les sociétés, déstabilise les familles et corrompt les esprits. À Touba, où la lutte contre les vices est une priorité, son introduction par une personne censée protéger ces valeurs est d’autant plus choquante. La surveillance communautaire a permis de démasquer la sexagénaire, mais au-delà de l’efficacité de cette action, c’est l’acte lui-même qui interpelle : comment une personne de son âge en est-elle arrivée là ?
M. Diongue n’est pas une jeune personne égarée ou influençable. À 66 ans, elle a vécu suffisamment longtemps pour connaître le bien et le mal, comprendre les dommages causés par la drogue et mesurer l’impact de ses choix sur sa communauté. Pourtant, elle a choisi de transporter et de stocker une quantité importante de chanvre indien. Son argument selon lequel un certain Ousseynou lui aurait remis la drogue ne suffit pas à la disculper. Qui pourrait croire qu’une femme de son expérience ignorait la nature de ce qu’elle manipulait ? Qui peut imaginer qu’elle ne savait pas participer à un réseau destructeur ?
Cette affaire révèle une vérité inquiétante : la corruption morale n’a pas d’âge. M. Diongue n’est pas une victime, elle est actrice et complice d’un trafic qui trahit la confiance de sa communauté. Elle a trahi l’image de la grand-mère protectrice et de l’aînée respectée. Elle a trahi Touba. Ce qui rend son histoire encore plus troublante, c’est le contraste entre son statut et ses actes. Une commerçante, proche des clients, des voisins et des enfants, choisit une voie qui menace directement ces mêmes personnes. Comment expliquer aux jeunes que la drogue est un danger quand une figure maternelle en devient la pourvoyeuse ?
Les aînés ont une responsabilité particulière. Ils sont des symboles et leurs actes influencent les comportements, les mentalités et les normes. Quand une grand-mère trafique de la drogue, elle ne commet pas seulement un délit : elle normalise l’idée que les interdits peuvent être franchis et que les valeurs sont négociables. Des exemples similaires dans d’autres sociétés montrent que la chute morale des figures d’autorité a des conséquences dévastatrices. À Touba, où la cohésion sociale repose sur le respect des aînés, l’impact est encore plus fort. M. Diongue, en agissant ainsi, a sapé les fondements mêmes de cette cohésion.
L’histoire regorge d’exemples de figures respectées trahissant leur mission : religieux impliqués dans des scandales, enseignants corrompus ou leaders abusant de leur autorité. Chaque fois, la consternation est grande et la confiance s’érode. Au Sénégal, d’autres affaires ont montré qu’aucune institution n’est à l’abri. L’affaire M. Diongue s’inscrit dans cette lignée et rappelle que la vigilance doit être constante et que personne, quel que soit son âge ou son statut, ne peut se prévaloir de son autorité pour échapper à la critique ou à la sanction.
L’affaire M. Diongue est un électrochoc nécessaire. Touba ne peut tolérer de telles dérives si elle veut rester fidèle à ses valeurs. Les aînés doivent être des modèles, pas des exemples à ne pas suivre. Leur rôle est de guider, protéger et inspirer, non de corrompre. Ceux qui trahissent la confiance de leur communauté doivent en assumer les conséquences. M. Diongue ne mérite aucune indulgence au nom de son âge ; son histoire doit servir d’avertissement. À Touba comme ailleurs, la respectabilité se mérite et se défend. La dignité n’a pas de prix, et quand elle est bafouée, c’est toute la société qui en paie le prix.
Article opinion écrit par la créatrice de contenu : Anta B.
Mis en ligne : 05/10/2025
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