La canicule ne justifie pas tout : Senelec esquive les vrais problèmes - Notre Continent
> NOTRE CONTINENT > - Société | Par Eva | Publié le 07/10/2025 08:10:30

La canicule ne justifie pas tout : Senelec esquive les vrais problèmes

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Face aux rumeurs de hausse des tarifs de l’électricité, la Senelec a rapidement démenti, attribuant l’augmentation des factures à la canicule et à une consommation accrue des ménages. Si personne ne conteste la réalité des fortes chaleurs, cette explication, trop facile, masque les vrais problèmes du secteur électrique sénégalais : un réseau vétuste, un gaspillage endémique et un manque criant d’investissements dans les énergies renouvelables.

Plutôt que de s’attaquer aux causes structurelles, la Senelec se contente de pointer du doigt la météo, laissant les Sénégalais payer le prix d’un système à bout de souffle.

Chaque année, le Sénégal subit des vagues de chaleur prolongées, et chaque année, les factures d’électricité flambent. Pourtant, aucune stratégie d’anticipation n’est mise en place pour limiter l’impact de ces épisodes sur les ménages. Les coupures d’électricité se multiplient, les infrastructures peinent à résister aux intempéries, et les solutions proposées se résument à des communiqués rassurants et à des appels à la modération des consommateurs (lanouvelletribune.info).

La canicule n’est pas une surprise : elle est un phénomène récurrent, dont les effets pourraient être atténués par une meilleure préparation et des infrastructures adaptées. Mais à défaut d’investissements massifs dans la modernisation du réseau et dans les énergies durables, la Senelec se contente de gérer la crise au jour le jour, laissant les citoyens supporter le poids d’un système défaillant.

La Senelec explique que l’augmentation des factures est liée à une consommation accrue due à la chaleur. Pourtant, cette justification occulte plusieurs réalités :

Les coupures fréquentes, souvent attribuées à des causes extérieures (vents, pluies, travaux), révèlent en réalité la fragilité d’un réseau mal entretenu et peu résilient (lanouvelletribune.info). Les Sénégalais paient ainsi le prix d’un manque d’entretien et d’investissements dans les infrastructures.

Le vol d’électricité, via des branchements clandestins et des fraudes, coûte des milliards à la Senelec chaque année, fragilisant encore davantage le système et alourdissant la facture des clients honnêtes. En 2024, les pertes dues à la fraude ont été estimées à plus de 100 milliards de FCFA, soit une hémorragie financière qui aurait pu servir à moderniser le réseau ou à subventionner les tarifs pour les plus modestes.

Malgré des engagements forts en faveur des énergies renouvelables, le Sénégal dépend encore à plus de 70 % du thermique (fioul, diesel, charbon), une énergie coûteuse et polluante. Les projets solaires et éoliens peinent à décoller, faute de financements suffisants et d’une volonté politique claire. Les 73 milliards de FCFA annoncés pour les renouvelables en 2025 restent une goutte d’eau face aux besoins réels.

Alors que la canicule est un phénomène prévisible, aucune mesure structurelle n’est prise pour adapter le réseau aux défis climatiques. Les pays voisins, comme le Maroc ou l’Afrique du Sud, ont mis en place des stratégies pour réduire l’impact des vagues de chaleur sur la consommation énergétique (isolation des bâtiments, tarifs incitatifs, développement des énergies propres). Pourquoi le Sénégal tarde-t-il à suivre cet exemple ?

Le manque d’investissements dans les renouvelables : Avec seulement 27,89 % d’énergies renouvelables dans son mix énergétique en 2023, le Sénégal est loin derrière ses objectifs (energie-mines.gouv.sn). Pourtant, le potentiel solaire et éolien du pays est immense. Le partenariat pour une transition énergétique juste (JETP), signé en 2023, prévoit 2,5 milliards d’euros d’investissements, mais les résultats se font attendre.

Plutôt que de se contenter de démentir les rumeurs, la Senelec et la CRSE devraient expliquer clairement comment les tarifs sont fixés, comment les subventions sont utilisées, et quelles mesures sont prises pour protéger les ménages les plus vulnérables. La transparence est la première victime de cette crise.

Des pays comme le Maroc ou le Kenya ont su diversifier leur mix énergétique et réduire leur dépendance aux énergies fossiles, tout en maîtrisant les coûts pour les consommateurs. Le Maroc, par exemple, a investi massivement dans le solaire (centrale de Noor) et l’éolien, réduisant ainsi sa facture énergétique et limitant l’impact des canicules sur les prix. Au Sénégal, les projets similaires (comme la centrale solaire de Diaroumé) restent marginaux et insuffisants pour répondre à la demande.

La Senelec ne peut indéfiniment se cacher derrière la canicule pour justifier des factures élevées et un service défaillant. Les Sénégalais méritent mieux qu’un réseau électrique à la merci du thermomètre et des communiqués de dernière minute. Il faut investir massivement dans les énergies renouvelables, de lutter efficacement contre le gaspillage, et de moderniser les infrastructures pour les rendre résilientes face au climat. Sans cela, chaque été sera synonyme de factures salées et de coupures à répétition, et la confiance des citoyens dans les institutions s’érodera un peu plus.

La canicule n’est pas une fatalité, mais un rappel urgent : le Sénégal doit accélérer sa transition énergétique, sous peine de voir ses citoyens payer toujours plus cher pour un service toujours moins fiable. La balle est dans le camp des pouvoirs publics et de la Senelec. À eux de prouver qu’ils sont à la hauteur des défis.

Article opinion écrit par le créateur de contenu : Alphonse S.
Mis en ligne : 07/10/2025

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