Article opinion écrit par le créateur de contenu : Lino.
Depuis son arrivée au pouvoir, le gouvernement du Président Bassirou Diomaye Faye tente de désencombrer Dakar, la capitale sénégalaise : un chantier qu’aucun de ses prédécesseurs n’a réussi à mener à bien.
Occupation anarchique des trottoirs, installations encombrantes des marchands sur les espaces publics…
Le gouvernement, sous la houlette du Premier Ministre Ousmane Sonko, veut rendre Dakar plus salubre. Mais les différentes expulsions engagées ces dernières semaines peinent à porter leurs fruits.
Des milans à bec jaune et des corbeaux pie survolent à basse altitude le ciel de Colobane. Ce quartier de Dakar, la métropole d’Afrique de l’Ouest aux 4 millions d’habitants, célèbre pour son grand marché, est l’un des symboles de l’encombrement de la capitale. Les trottoirs des routes adjacentes sont totalement occupés par des marchands qui ont élu domicile sous des tentes de fortune.
Des articles de toutes sortes, parmi lesquels de la friperie, des chaussures, sont proposés à des piétons qui doivent partager la chaussée avec des véhicules. Les passants zigzaguent entre les voitures qui avancent au pas dans ce quartier situé à trois kilomètres du centre-ville de Dakar.
Fin juin, l’État a tenté de mettre de l’ordre dans le capharnaüm de Colobane en initiant une opération de déguerpissement. Tables démantelées et amoncelées dans la rue en pleine nuit, les marchands ont retrouvé, le 29 juin au petit matin, un marché méconnaissable et ont manifesté leur incompréhension.
Le 30, le Premier ministre Ousmane Sonko s’est rendu sur les lieux pour échanger avec les commerçants en leur assurant que ces opérations se feront désormais plus subtilement. « Le président de la République invite les mairies à assouplir les opérations de déguerpissement et de libération de la voie publique, en privilégiant la communication et le dialogue avec les marchands ambulants », a-t-il affirmé devant des centaines de marchands.
Trois semaines plus tard, Colobane a renoué avec son effervescence. Les marchands qui avaient déguerpi sont revenus. Babacar, debout sur le bord de la route, à proximité du grand rond-point du quartier, vend des tee-shirts aux passants. Ce commerçant travaille ici depuis près de vingt ans. Âgé de 38 ans, il a quitté son village de Kaymor, au centre-ouest du Sénégal, pour venir travailler à Dakar. « J’envoie chaque mois 60 000 francs CFA (environ 90 euros) par mois à ma famille grâce à ce travail », affirme-t-il. Aujourd’hui, il s’inquiète de se retrouver au chômage si les autorités reviennent à la charge.
« On veut juste qu’ils nous recasent ailleurs s’ils nous font partir d’ici. » Ce sera très dur s’ils ne trouvent pas une solution pour nous, les marchands. Il serait même plus intéressant de créer un centre commercial moderne pour nous permettre d’avoir des places permanentes, plaide-t-il.
Quelques dizaines de mètres plus loin, Baye Ndiaye, assis sur sa mototaxi, attend des clients pour des courses dans la région de Dakar. L’homme de 34 ans reconnaît que l’insalubrité est grandissante à Colobane. « C’est normal, c’est logique que les autorités veuillent assainir le marché. » Pour qu’on remette le Sénégal sur les rails, il faut une meilleure organisation. C’est anormal que la voie publique soit ainsi occupée. Les conducteurs sont souvent entravés dans leur circulation à cause de cette anarchie. Ce qui crée souvent des accidents, constate-t-il.
Fidèle à l’adage « Faites ce que je dis, pas ce que je fais », Baye est arrêté dans un virage, à côté de ses collègues, sur la chaussée où le stationnement est en principe interdit. « C’est toujours lié au manque d’organisation », se justifie-t-il. « On aurait pu aménager des espaces pour les motos, mais rien n’a été fait pour nous ». Nous nous sommes battus, on s’est sacrifié pour que Bassirou Diomaye Faye et Ousmane Sonko arrivent au pouvoir. J’ai moi-même participé aux différentes manifestations violentes à Dakar en 2023. On attend toujours qu’ils fassent quelque chose pour les jeunes en retour. Jusqu’à présent, on ne voit rien, déplore-t-il.
Le Président Bassirou Diomaye Faye est ainsi face à un grand défi : rendre la capitale sénégalaise plus salubre sans retirer leur emploi aux jeunes vivant du commerce informel, un secteur sur lequel il sera très attendu durant son quinquennat.
L’encombrement de Dakar n’épargne quasiment aucun quartier, aucune ruelle. L’occupation anarchique de la voie publique est punie par le Code pénal sénégalais jusqu’à un mois de prison et 20 000 francs CFA (30 euros) d’amende. Des peines qui ne sont pas appliquées et totalement ignorées dans les espaces publics. À l’image de Colobane, le grand parking du Stade Léopold Sédar Senghor est un autre endroit emblématique de l’insalubrité de la capitale.
Début juin, laveurs de voitures, mécaniciens, camionneurs, bus de transports interurbains avaient tous été priés de vider les lieux. Mais pas moins de deux semaines plus tard, ils sont tous revenus comme ils étaient partis.
« Il y a un manque de suivi. » La nature a horreur du vide. Quand on déplace des gens d’un lieu public, il faut y mettre quelque chose à la place. Il faut réaménager le parking, le mettre en valeur, faire des travaux, le repeindre… Si rien n’est fait pour occuper l’espace, c’est tout à fait normal qu’en une semaine ils reviennent, analyse-t-il.
Le ministère de l’urbanisme, qui développe depuis 2020 un programme d’aménagement des espaces publics à Dakar, n’a pas souhaité répondre à nos sollicitations.
Article opinion écrit par le créateur de contenu : Lino
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