Les élections récentes en Afrique marquent un tournant inattendu. Plusieurs régimes dominants sont balayés par des oppositions résilientes. Toutefois, ce vent de changement révèle des failles profondes et des questions inquiétantes sur la pérennité de cette évolution. Peut-on espérer une véritable transformation ou s’agit-il d’un simple cycle temporaire ?
En l’espace de 12 mois, l’Afrique a enregistré cinq transferts pacifiques de pouvoir. Le Ghana, le Botswana, Maurice, le Sénégal et le Somaliland ont vu leurs oppositions triompher.
Ces événements créent un précédent historique, car jamais autant de régimes n’avaient cédé face à des élections libres dans un laps de temps aussi court. Le Ghana, par exemple, a marqué l’année avec une défaite écrasante du Nouveau Parti Patriotique (NPP).
Le parti, au pouvoir depuis 2016, est tombé sous les 45 % des voix pour la première fois depuis 1996. Cette sanction électorale illustre la frustration des électeurs face à la corruption, aux scandales financiers et à une crise économique paralysante.
Le Ghana n’est pas un cas isolé. Au Botswana, le Parti Démocratique (BDP), qui dirigeait depuis l’indépendance en 1966, a connu une chute vertigineuse. Avec seulement quatre sièges remportés sur 69 au Parlement, le parti autrefois hégémonique lutte aujourd’hui pour sa survie. Le Sénégal offre un scénario tout aussi significatif.
Malgré des tentatives d’écarter ses opposants par des emprisonnements politiques, le régime de Macky Sall a été balayé par une opposition unie et déterminée. Ce scrutin a non seulement été une victoire électorale, mais aussi un triomphe contre l’abus de pouvoir.
Trois facteurs clés expliquent cette vague de victoires pour l’opposition. Tout d’abord, l’économie est un moteur central. La hausse du coût de la vie, liée à des prix élevés des denrées alimentaires et du carburant, a accru la colère des populations. Par exemple, au Kenya, cette situation a déclenché des manifestations massives contre le président William Ruto.
Ensuite, la lutte contre la corruption est devenue une priorité pour les citoyens. Les électeurs rejettent de plus en plus les dirigeants perçus comme népotiques ou inefficaces. Enfin, l’unité des oppositions a joué un rôle décisif. Au Botswana, plusieurs partis ont formé une coalition solide pour battre le BDP. Cette stratégie semble inspirer d’autres nations.
Malgré ces avancées, le tableau n’est pas entièrement rose. Certains gouvernements, bien que fragilisés, continuent d’éroder les principes démocratiques. En Namibie, par exemple, le parti au pouvoir a conservé sa majorité, mais avec des accusations de fraudes électorales. De même, les conditions d’élection dans des pays comme le Rwanda ou le Mozambique restent loin d’être équitables.
Un autre risque est que ces oppositions victorieuses ne soient pas préparées à gouverner. Si elles reproduisent les erreurs des régimes qu’elles ont remplacés, la confiance des populations pourrait rapidement s’effondrer. L’histoire africaine récente regorge d’exemples de gouvernements réformateurs qui ont échoué.
Ce « vent de rupture démocratique », bien qu’encourageant, pourrait n’être qu’un cycle. Le véritable test sera la capacité des nouveaux gouvernements à tenir leurs promesses. Ils doivent s’attaquer aux racines des problèmes : inégalités économiques, corruption et manque d’infrastructures.
Des propositions pour consolider cette évolution sont : mettre en place des mécanismes indépendants pour surveiller la gestion des ressources publiques, donner aux populations les outils pour s’exprimer et surveiller les institutions, intégrer diverses forces politiques pour bâtir des coalitions solides et sensibiliser les citoyens à leurs droits et responsabilités démocratiques.
L’Afrique semble être à un carrefour décisif. Si le vent de la rupture démocratique se poursuit, le continent pourrait devenir un modèle de résilience à l’échelle mondiale. Mais pour que ce rêve devienne réalité, les dirigeants et les citoyens doivent saisir cette opportunité pour réinventer la gouvernance et construire des nations prospères et équitables.
Article opinion écrit par le créateur de contenu : Rahime Pipita
Mis en ligne : 17/12/2024
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