Le Parlement sud-coréen a adopté samedi 14 décembre une motion de destitution contre le président pour sa tentative ratée d’imposer la loi martiale le 3 décembre.
Un total de 204 députés ont voté en faveur de la motion et 85 contre. Trois députés se sont abstenus et huit bulletins ont été déclarés nuls, selon le résultat annoncé par le président de la Chambre.
À l’annonce de la destitution, les quelque 200 000 manifestants massés devant l’Assemblée nationale ont explosé de joie, dansant au son d’une K-pop assourdissante, s’embrassant parfois en larmes et agitant des bâtons lumineux, selon des journalistes de l’AFP sur place.
« N’est-il pas extraordinaire que nous, le peuple, ayons réalisé ceci ensemble ? », s’est exclamée Choi Jung-ha, une manifestante de 52 ans.
Plusieurs milliers de partisans de Yoon Suk-yeol se sont également rassemblés dans le centre de Séoul, brandissant des drapeaux sud-coréens et américains.
« Je suis profondément frustré (…), mais je dois me retirer », a déclaré Yoon Suk-yeol à la télévision, appelant à en finir avec « la politique de l’excès et de la confrontation » au profit d’une « politique de délibération et de considération ».
« La destitution d’aujourd’hui est la grande victoire du peuple et de la démocratie », s’est félicité de son côté Park Chan-dae, chef du groupe du Parti démocrate (principale force d’opposition) au Parlement.
Yoon Suk-yeol est désormais suspendu, en attendant que la Cour constitutionnelle valide ou non sa destitution. Celle-ci dispose pour cela de 180 jours. L’intérim sera assuré par le Premier ministre, Han Duck-soo.
Si la Cour confirme la destitution, Yoon Suk-yeol deviendra le deuxième président de l’histoire de la Corée du Sud à subir ce sort, après Park Geun-hye en 2017. Mais il existe aussi un précédent de destitution votée par le Parlement puis invalidée deux mois plus tard par la Cour constitutionnelle : celle de Roh Moo-hyun en 2004.
Vendredi, le parquet a annoncé l’arrestation du chef du commandement militaire de Séoul et un tribunal a lancé des mandats d’arrêt contre les chefs de la police nationale et de la police de Séoul, citant un « risque de destruction de preuves ».
L’ancien ministre de la Défense Kim Yong-hyun, considéré comme la personne ayant poussé le président à imposer la loi martiale, avait été le premier à être arrêté le 8 décembre. Il avait tenté deux jours plus tard de se suicider en détention.
Le chef de l’État est accusé d’avoir fait vaciller la démocratie sud-coréenne en imposant la loi martiale le 3 décembre et en envoyant l’armée au Parlement pour le museler. Outre la procédure de destitution, il est parallèlement visé par une enquête pour « rébellion » et a interdiction de quitter le pays.
Yoon Suk-yeol, 63 ans, a justifié son coup de force par son désir de « protéger la Corée du Sud libérale des menaces posées par les forces communistes nord-coréennes et éliminer les éléments hostiles à l’État », accusant le Parlement, où l’opposition est majoritaire, de bloquer complètement le pays.
Mais 190 élus avaient tout de même réussi à entrer dans le bâtiment, parfois en escaladant les clôtures. Ils avaient voté à l’unanimité une motion exigeant la levée de la loi martiale, pendant que leurs assistants empêchaient les soldats de faire irruption dans l’hémicycle en barricadant les portes à l’aide de tables, de chaises et de canapés.
Le président conservateur avait finalement obtempéré, abrogeant la loi martiale proclamée seulement six heures plus tôt et renvoyant les soldats dans leurs casernes.
Yoon Suk-yeol avait survécu à une première motion de destitution le 7 décembre. Le parti présidentiel avait boycotté le scrutin, le rendant invalide faute d’atteindre le quorum de 200 députés.
Article écrit par : Badara Tall
Mise en ligne : 14/12/2024
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