Le Sommet Afrique-États-Unis, qui s’est tenu à Washington du 9 au 11 juillet à l’initiative du président américain, a réuni cinq chefs d’État africains. Officiellement dédié aux enjeux commerciaux, sécuritaires et migratoires, ce rendez-vous diplomatique est présenté par Washington comme le début d’une nouvelle ère dans les relations avec l’Afrique. Pourtant, à y regarder de plus près, cette soudaine attention américaine dissimule mal une stratégie intéressée, sélective et empreinte d’hypocrisie.
L’Afrique, longtemps reléguée en bas de la liste des priorités géopolitiques américaines, est désormais courtisée par les grandes puissances mondiales. La Chine y a déjà pris une avance considérable, notamment dans les secteurs des infrastructures, de l’énergie et des minerais stratégiques. Face à ce constat, l’administration américaine cherche à revenir dans la course, non par conviction sincère, mais par calcul géopolitique.
Le président américain, qui avait manifesté un mépris évident envers l’Afrique lors de son premier mandat, opère aujourd’hui un revirement stratégique. Il affirme désormais que les pays africains représentent des « opportunités commerciales incroyables ». Un changement de ton opportun, mais peu crédible, tant il semble dicté par la peur de voir la Chine creuser l’écart. Plus encore, cette « ouverture » ne concerne que « certains pays », sélectionnés sans grande transparence ni logique économique évidente.
Le choix des invités à ce sommet, Sénégal, Mauritanie, Guinée-Bissau, Gabon et Liberia, soulève de sérieuses questions. Pourquoi ces pays, et non des poids lourds économiques du continent comme le Nigeria, l’Afrique du Sud, le Kenya ou encore l’Égypte ? Ce casting partiel renforce l’idée d’un sommet qui n’a rien de véritablement panafricain, mais qui obéit à des intérêts politiques, sécuritaires ou diplomatiques circonstanciels. Ces pays ont-ils été choisis parce qu’ils sont plus enclins à se montrer conciliants avec la politique étrangère américaine ?
Au lieu de considérer l’Afrique dans son ensemble comme un partenaire stratégique égal, l’administration américaine reproduit une approche paternaliste, fondée sur la fragmentation et l’instrumentalisation. Le sommet n’a d’ailleurs pas été précédé d’un travail de concertation large avec les institutions régionales africaines. L’annonce précipitée de l’accord de paix entre la RDC et le Rwanda, quelques jours avant la tenue du sommet, ressemble à un coup diplomatique de dernière minute, destiné à légitimer l’intérêt soudain de Washington pour le continent.
À la différence des sommets Chine-Afrique ou Russie-Afrique, qui mobilisent régulièrement un grand nombre de chefs d’État et proposent des plans d’investissement structurants, cette initiative américaine paraît bien modeste, voire improvisée. Elle traduit moins un désir sincère de partenariat qu’une volonté de contenir l’influence d’adversaires géopolitiques.
Ce sommet Afrique-États-Unis, loin d’être une avancée majeure dans les relations entre Washington et le continent africain, ressemble davantage à une opération de communication. Le revirement soudain du président américain, la sélection arbitraire des pays invités, et l’absence de vision globale pour le continent laissent un goût amer. Si l’Afrique doit s’ouvrir à de nouveaux partenariats, elle ne doit pas devenir le terrain de jeux cynique des grandes puissances. À elle aussi de poser ses conditions, de parler d’une seule voix et d’exiger le respect d’un partenariat équitable.
Article opinion écrit par la créatrice de contenu : Maimouna Sow.
Mis en ligne : 20/07/2025
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