Il y a des silences qui blessent plus que des mots, des absences qui trahissent plus que des décisions. Tel est le sentiment qui se dégage du sort réservé aux 300 anciens travailleurs des bases militaires françaises. Regroupés au sein du Syndicat des travailleurs du personnel civil des éléments français au Sénégal (EFS), ces hommes et femmes, aujourd’hui sans emploi, attendent toujours un signe clair de l’État sénégalais.
Leur situation illustre un grave manquement à la responsabilité sociale de l’État envers ses citoyens. En tournant le dos à ces travailleurs des bases françaises, l’État du Sénégal a failli à son devoir.
La fermeture des bases françaises, conséquence d’une volonté souveraine de réappropriation nationale, était saluée par nombre de Sénégalais comme un acte de courage politique. Cependant, toute décision, aussi légitime soit-elle, doit s’accompagner de mesures d’atténuation pour ceux qu’elle affecte directement. Or, depuis leur licenciement officiel il y a deux semaines, les ex-agents des EFS n’ont reçu aucune proposition concrète de reclassement, de soutien à la reconversion, ou même de dialogue sincère avec les autorités.
Le drame est d’autant plus grand que bon nombre de ces travailleurs des bases françaises cumulent plus de vingt ans de service loyal au sein des installations militaires françaises. Ils n’étaient pas de simples employés, mais les rouages invisibles d’un dispositif stratégique qui a longtemps servi les intérêts de l’État sénégalais, directement ou indirectement. De la logistique à la maintenance technique, ils ont exercé des métiers essentiels avec rigueur et dévouement. Et aujourd’hui ? L’oubli.
D’autres pays confrontés à des reconversions similaires ont su mettre en place des dispositifs de transition dignes de ce nom. En Allemagne, après le retrait des troupes américaines de certaines régions, des programmes publics ont permis la reconversion des employés locaux via des formations qualifiantes, des aides à l’entrepreneuriat et un accompagnement psychologique. Pourquoi le Sénégal, qui revendique sa souveraineté avec tant de fierté, se montre-t-il aussi défaillant dans l’exercice de ses devoirs les plus fondamentaux ?
Il ne s’agit pas ici d’une question de budget, mais de volonté politique. Le gouvernement aurait pu anticiper, engager des concertations, créer des passerelles vers la fonction publique, ou favoriser leur intégration dans des entreprises partenaires de l’État. Ces hommes et femmes n’ont pas demandé de privilèges, mais un simple accompagnement pour retrouver leur place dans une société qu’ils ont servie dans l’ombre.
En réalité, ce silence étatique trahit une forme de mépris, un désengagement sournois que rien ne justifie. Laisser ces citoyens dans la précarité revient à compromettre le tissu social et à saper la confiance entre l’État et ceux qui le servent.
Il faut d’agir. Le gouvernement sénégalais doit rompre le silence et assumer ses responsabilités. Il en va non seulement de la dignité de ces anciens travailleurs des bases francaises, mais aussi de l’image d’un État qui se veut juste et souverain. Les mots doivent désormais céder la place à des actes concrets. Réparation, accompagnement, reconnaissance : ces travailleurs le méritent. L’État sénégalais ne peut plus se dérober.
Article opinion écrit par le créateur de contenu : Abdoulaye Diatta.
Mis en ligne : 24/07/2025
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