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La récente annulation du concert de Ky-Mani Marley, fils de la légende Bob Marley, au 59ᵉ festival de Carthage, illustre avec éclat les dangers d’une culture soumise aux logiques politiques et aux pressions du public. Selon le comité d’organisation, le chanteur jamaïcain ne se produira plus « en raison de son soutien présumé à Israël », bien que les motifs précis n’aient jamais été explicités. À la place, un hommage sera rendu à l’artiste tunisien Fadhel Jaziri, décédé cette semaine. Si l’intention peut paraître honorable, la décision soulève de sérieuses questions sur la liberté artistique et la place de l’art dans un espace censé être ouvert au dialogue.
Le soutien à la cause palestinienne constitue un enjeu sensible, particulièrement dans les réseaux sociaux où l’opinion publique s’exprime avec vigueur. Dans ce climat, la programmation artistique devient un champ de bataille politique. La même logique a conduit à l’annulation du concert d’Hélène Ségara, accusée de liens supposés avec Israël, malgré ses déclarations publiques niant tout positionnement. Ce zèle moralisateur transforme le festival en instrument de conformité, là où il devrait être un lieu de célébration et de diversité.
La culture comme simple relais de pressions sociopolitiques. La chasse aux sorcières intellectuelle et artistique s’installe progressivement sous couvert de valeurs supposées. Qui décide quels artistes ont le droit de s’exprimer ? Sur quels critères ? À quel moment le soutien à une cause justifie-t-il la mise au ban d’un créateur ? La réponse devrait toujours pencher du côté de la liberté, mais ici, elle bascule dans la censure. On assiste à un précédent qui pourrait bien engendrer une culture de l’autocensure, où artistes et programmateurs préfèreront éviter tout risque plutôt que de défendre la pluralité des voix.
Le danger du boycott culturel n’est pas une abstraction. À l’échelle internationale, l’histoire regorge d’exemples où la censure, même partielle, a étouffé le débat et appauvri l’expression artistique. De l’Europe de l’Est sous le rideau de fer aux boycotts idéologiques en Amérique, la leçon est claire : soumettre la culture à des critères politiques mène inévitablement à une uniformisation de la pensée et à la perte de l’âme des festivals et institutions artistiques. Et c’est exactement ce qui est en train de se produire à Carthage.
Un festival se doit d’être un lieu de dialogue, de confrontations d’idées et de diversité. En annulant des concerts sous pression, les organisateurs trahissent cette mission. La culture ne peut être l’otage des réseaux sociaux ni d’un conformisme politique passager. Comme le souligne avec justesse une réflexion partagée : « Quand la culture se soumet à la pression des réseaux sociaux, elle perd son âme. »
La décision d’écarter Ky-Mani Marley et d’autres artistes supposément « controversés » témoigne d’une dérive inquiétante. Entre hypocrisie des valeurs proclamées et logique du boycott, la liberté artistique est en péril. Plutôt que d’être un symbole d’ouverture et de dialogue, le festival de Carthage se transforme en un théâtre de la pensée unique. Il faut que les organisateurs réaffirment le rôle fondamental de l’art : créer, provoquer, rassembler, et non censurer sous la pression d’opinions fluctuantes.
Article opinion écrit par le créateur de contenu : Ibrahima Ba.
Mis en ligne : 24/08/2025
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