Adieu aux diktats du FMI : Dakar écrit ses propres règles - Notre Continent
> NOTRE CONTINENT > - Economie | Par Eva | Publié le 02/09/2025 08:09:30

Adieu aux diktats du FMI : Dakar écrit ses propres règles

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La récente tribune d’Ibrahima Thiam, président de l’Alliance pour la Citoyenneté et le Travail (ACT), pointe du doigt l’absence du Premier ministre sénégalais lors de la mission du FMI à Dakar comme un « signe politique fort », voire une tentative de se soustraire à des réformes difficiles. Pourtant, une lecture plus attentive de la situation révèle une tout autre réalité : cette absence est bien davantage le signe d’une autonomie retrouvée et d’une volonté de gérer les priorités nationales sans se soumettre aux rituels diplomatiques imposés par les institutions internationales.

Contrairement à ce que suggère Thiam, le gouvernement sénégalais ne fuit pas ses responsabilités il les assume, mais selon ses propres termes.

La mission du FMI au Sénégal, du 19 au 26 août 2025, s’est déroulée dans un contexte économique complexe : une dette publique révisée à 118,8 % du PIB fin 2024, une croissance portée à 12,1 % grâce aux hydrocarbures, et des réformes structurelles en cours pour assainir les finances publiques et renforcer la transparence. Thiam y voit une occasion manquée de montrer l’engagement du gouvernement. Mais cette vision ignore une donnée essentielle : le Sénégal n’est plus un État sous tutelle, et le Premier ministre n’a pas à justifier sa présence ou son absence devant le FMI. Les échanges techniques ont été menés par les ministères compétents, et les autorités ont réaffirmé leur engagement en faveur de la transparence et de la responsabilité budgétaire, comme l’a souligné le chef de la délégation du FMI, Edward Gemayel.

Thiam semble nostalgique d’une époque où les gouvernements africains devaient se plier aux attentes des bailleurs de fonds pour obtenir leur validation. Or, le Sénégal d’aujourd’hui refuse cette logique. Le gouvernement actuel a clairement indiqué sa volonté de négocier un nouveau programme avec le FMI, mais en définissant lui-même les priorités : renforcement de la gestion des finances publiques, relance des secteurs stratégiques, amélioration du capital humain et résilience climatique. L’absence du Premier ministre n’est donc pas un aveu de faiblesse, mais une affirmation de souveraineté : le Sénégal gère ses affaires avec ses partenaires, sans se laisser dicter sa conduite.

Le Sénégal a déjà prouvé sa capacité à lever des fonds sur les marchés régionaux (plus de 700 milliards de FCFA entre mars 2024 et mai 2025) et à engager des réformes sans attendre l’aval du FMI Le gel temporaire des décaissements du FMI, souvent présenté comme une sanction, est en réalité le prix d’une gestion souveraine des finances publiques. Comme le note un analyste, cette suspension illustre le choc entre deux visions : celle d’une gestion autonome et celle des standards internationaux.

Le gouvernement concentre ses efforts sur des réformes structurelles (diversification économique, lutte contre la corruption, optimisation des dépenses publiques) plutôt que sur des symboles diplomatiques La suppression progressive des subventions à l’énergie, souvent citée par Thiam comme un exemple de réformes impopulaires, est en réalité une mesure de bon sens économique, déjà engagée par d’autres pays africains sans crise majeure.

Le Rwanda et la Côte d’Ivoire ont tous deux réduit leur dépendance au FMI en menant des réformes ambitieuses, sans pour autant sombrer dans le chaos. Le Rwanda, malgré une dette limitée, a su diversifier son économie et préserver sa stabilité en gardant le contrôle de son agenda. La Côte d’Ivoire, bien que plus endettée, a maintenu une croissance solide en misant sur des investissements stratégiques et une gestion rigoureuse. Pourquoi le Sénégal n’y parviendrait-il pas ?

Thiam, en insistant sur l’absence du Premier ministre, révèle son propre attachement à une vision dépassée des relations avec le FMI. Son parti, ACT, prône une « opposition responsable », mais ses critiques semblent davantage motivées par des calculs politiques que par une réelle volonté de contribuer à des solutions.

L’absence du Premier ministre lors de la visite du FMI n’est pas un signe de faiblesse, mais au contraire une preuve de maturité politique. Le Sénégal montre qu’il est capable de dialoguer avec ses partenaires sans renoncer à sa souveraineté. Plutôt que de s’attarder sur des symboles, Thiam ferait mieux de proposer des alternatives concrètes ou de reconnaître que le gouvernement actuel a choisi la voie de l’autonomie et de la responsabilité. Le vrai signal envoyé est clair : le Sénégal ne sera plus le « bon élève » passif du FMI, mais un partenaire exigeant, déterminé à tracer sa propre voie.

Article opinion écrit par le créateur de contenu : Abdou Diouf.
Mis en ligne : 02/09/2025

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