Libérer Farba Ngom ? : Une insulte aux Sénégalais spoliés - Notre Continent
> NOTRE CONTINENT > - Politique | Par Eva | Publié le 14/09/2025 03:09:30

Libérer Farba Ngom ? : Une insulte aux Sénégalais spoliés

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L’actualité sénégalaise est une fois de plus secouée par l’affaire Farba Ngom, où la Commission nationale des droits de l’homme (CNDH), sous la houlette de sa présidente Amsatou Sow Sidibé, vient de solliciter la libération provisoire du député-maire des Agnam, inculpé pour détournement de fonds publics à hauteur de 125 milliards de francs CFA. Cette demande, justifiée par des raisons médicales, intervient alors que la justice s’apprête à rendre sa décision. Mais derrière cette manœuvre se cache une question lancinante : où étiez-vous, Madame Sidibé ? Pourquoi une telle sollicitude pour un homme accusé d’avoir pillé les caisses de l’État, alors que des milliers de citoyens peinent à accéder à des soins de base ? Cette intervention de la CNDH est une insulte à la mémoire des victimes de la corruption et une tentative éhontée de saboter le cours de la justice.

Farba Ngom, ancien responsable de l’Alliance pour la République (APR), est au cœur d’un scandale financier sans précédent. Accusé de détournement de deniers publics, blanchiment de capitaux et escroquerie, il incarne à lui seul le système de prédation qui a saigné le Sénégal pendant des années. Les montants en jeu 125 milliards de francs CFA représentent des écoles non construites, des hôpitaux jamais équipés, des routes jamais tracées. Pourtant, malgré l’ampleur des preuves et des expertises médicales confirmant son incompatibilité avec la détention, la question n’est pas de savoir s’il doit être soigné, mais bien de comprendre pourquoi il n’a pas été empêché de nuire plus tôt. La levée de son immunité parlementaire, son inculpation et son incarcération sont des étapes tardives, presque symboliques, dans un pays où la corruption a longtemps été une règle plutôt qu’une exception.

L’affaire Ngom n’est pas isolée. Elle s’inscrit dans une longue liste de détournements massifs qui ont fait du Sénégal un terrain de jeu pour une élite politique assoiffée de richesses. Des coffres-forts remplis de liquidités chez ses proches, des sociétés écrans, des transactions opaques : le modus operandi est toujours le même. Pourtant, la réaction des institutions chargées de défendre les droits humains, comme la CNDH, semble sélective. Pourquoi une telle célérité pour défendre un homme accusé d’avoir volé l’argent public, alors que les victimes de ce pillage attendent toujours justice ?

La demande de libération provisoire adressée par Amsatou Sow Sidibé au président du Collège des juges d’instruction soulève des interrogations légitimes. La CNDH, censée veiller au respect des droits fondamentaux, semble ici jouer le rôle d’avocat des nantis. Certes, le respect des droits humains est un principe intangible, mais il ne doit pas servir de paravent pour protéger ceux qui ont bafoué les droits économiques et sociaux de tout un peuple. La présidente de la CNDH, pourtant réputée pour son engagement en faveur de la justice et de la transparence, aurait dû exiger des comptes bien avant que les tribunaux ne s’emparent du dossier. Où était-elle lorsque des milliards disparaissaient dans des comptes offshore ? Pourquoi ne pas avoir dénoncé, avec la même vigueur, les mécanismes qui ont permis à Farba Ngom et à ses complices de s’enrichir sur le dos des plus pauvres ?

La réponse est simple : au Sénégal, comme ailleurs en Afrique, la lutte contre la corruption est souvent un combat inégal. Les puissants bénéficient de réseaux d’influence, de complicités au sein de l’appareil judiciaire et de stratégies de diversion pour échapper à leur responsabilité. La santé de Farba Ngom, aussi préoccupante soit-elle, ne doit pas occulter l’urgence de rendre justice aux Sénégalais spoliés. La CNDH, en intervenant ainsi, risque de donner l’impression d’une justice à deux vitesses : une pour les riches et les bien connectés, une autre pour le reste de la population.

Si l’état de santé de Farba Ngom est effectivement préoccupant, rien n’empêche de lui accorder des soins appropriés en détention, sous surveillance médicale stricte. La libération provisoire, dans ce contexte, sendrait comme une récompense pour un homme qui a contribué à affaiblir les institutions du pays.

La CNDH invoque le respect de la présomption d’innocence. Mais celle-ci ne signifie pas impunité. Elle doit s’accompagner d’une enquête rigoureuse et transparente, sans pression ni ingérence.

Libérer Farba Ngom enverrait un message désastreux : au Sénégal, on peut détourner des milliards et compter sur des appuis influents pour éviter la prison. Cela sapera la confiance des citoyens dans les institutions et encouragera d’autres prédateurs à agir en toute impunité.

En Afrique, les affaires de détournement de fonds publics sont légion. Au Cameroun, des milliards d’euros ont été détournés entre 1998 et 2004, avec des condamnations exemplaires à la clé. En France, des personnalités politiques ont été condamnées pour des montants bien moindres. Pourquoi le Sénégal ferait-il exception ?

À l’échelle internationale, les affaires de détournement de fonds publics sont traitées avec une fermeté qui contraste avec la clémence dont bénéficient souvent les élites africaines. En France, Marine Le Pen a été condamnée à de la prison ferme et à l’inéligibilité pour des montants bien inférieurs à ceux reprochés à Farba Ngom. Au Cameroun, l’opération Épervier a permis de condamner plusieurs ex-ministres et hauts fonctionnaires pour corruption. Ces exemples montrent qu’il est possible de lutter efficacement contre la corruption, à condition que la volonté politique soit au rendez-vous. Au Sénégal, en revanche, les affaires traînent, les procédures s’enlisent, et les coupables bénéficient de traitements de faveur.

Madame Amsatou Sow Sidibé, votre silence assourdissant face aux détournements massifs de fonds publics est une tache indélébile sur votre réputation. Votre intervention en faveur de Farba Ngom, alors que la justice est sur le point de rendre son verdict, est une erreur stratégique et morale. La CNDH doit défendre les droits de tous les Sénégalais, pas seulement ceux des puissants.

La libération provisoire de Farba Ngom serait une victoire pour les vampires du trésor public et une défaite pour la démocratie. Il est temps que la justice sénégalaise montre qu’elle est capable de sanctionner les crimes économiques, quels que soient les auteurs. Sinon, le message sera clair : au Sénégal, on peut voler, tant qu’on a les bonnes relations.

La balle est dans le camp des juges. À eux de prouver que personne n’est au-dessus des lois.

Article opinion écrit par le créateur de contenu : Mamadou Diagne.
Mis en ligne : 14/09/2025

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