Des mois de labeur réduits à néant : Incident à Goudomp - Notre Continent
> NOTRE CONTINENT > - Fait divers | Par Eva | Publié le 26/09/2025 11:09:45

Des mois de labeur réduits à néant : Incident à Goudomp

Les opinions exprimées dans cet article sont celles d’un contributeur externe. NotreContinent.com est une plateforme qui encourage la libre expression, la diversité des opinions et les débats respectueux, conformément à notre charte éditoriale « Sur NotreContinent.com chacun est invité à publier ses idées »

Un match de football entre les équipes de Mancolycounda et de Badobare, dans le département de Goudomp, s’est achevé dans les rizières. Des supporters mécontents ont vandalisé des champs de riz arrivés à maturité, réduisant à néant des mois de labeur de femmes agricultrices. Cet incident, rapporté par le site Kuma Koyo, n’est malheureusement pas un cas isolé.

Il révèle une réalité alarmante : au Sénégal, la passion sportive se transforme trop souvent en violence aveugle, tandis que les responsables, supporters, clubs et autorités, restent spectateurs, sans assumer leurs devoirs. Il est temps de dénoncer cette culture de l’impunité et d’exiger des comptes.

Les débordements post-match ne sont pas une nouveauté au Sénégal. Chaque année, des incidents similaires éclatent, surtout lors des compétitions locales où l’encadrement est défaillant. À Goudomp, comme ailleurs, les matchs de football drainent des foules passionnées, mais aussi des tensions mal gérées. Pourtant, malgré les risques connus, peu de mesures sont prises pour prévenir ces violences. Les forces de l’ordre brillent par leur absence, les clubs ferment les yeux, et les autorités locales se contentent de réactions tardives, voire inexistantes. Pendant ce temps, ce sont toujours les mêmes qui paient le prix : des citoyens innocents, dont le seul crime est d’être au mauvais endroit au mauvais moment.

Dans ce cas précis, les victimes sont des femmes, piliers de l’agriculture familiale, dont les rizières, presque prêtes pour la récolte, ont été saccagées avec une brutalité inouïe. Des épis jetés sur la route, des plants arrachés à coups de bâtons et de coupe-coupes… Une scène qui rappelle que, trop souvent, la fête sportive tourne au cauchemar pour les plus vulnérables.

Ce qui s’est passé à Goudomp est le symptôme d’un mal plus profond : la banalisation de la violence dans le football local. Les supporters, sûrs de ne jamais être inquiétés, agissent en toute impunité. Les clubs, focalisés sur les performances sportives, négligent leur rôle éducatif et leur responsabilité envers les communautés. Quant aux autorités, leur inertie envoie un message clair : au Sénégal, on peut détruire, humilier, et ruiner des vies sans craindre de conséquences.

Pire encore, cet incident met en lumière l’hypocrisie d’un système qui célèbre le sport comme vecteur de cohésion sociale, tout en tolérant ses excès. Comment expliquer que des hommes, fiers de soutenir leur équipe, n’éprouvent aucune honte à piétiner le travail d’autrui ? Comment justifier que des institutions chargées de protéger les citoyens restent silencieuses face à de tels actes ? La réponse est simple : parce que personne n’est tenu responsable. Ni les supporters, ni les dirigeants de clubs, ni les forces de l’ordre, ni les élus locaux.

Le contraste est saisissant : l’énergie déployée pour encourager une équipe ne trouve aucun écho quand il s’agit de réparer les dégâts causés. Les femmes de Goudomp, qui ont « usé la paume de leurs mains pendant des mois », n’ont reçu ni excuses, ni soutien, ni promesse de justice. Leur souffrance semble moins importante que le score d’un match.

Dans d’autres pays africains, comme le Rwanda ou le Ghana, les débordements post-match sont sévèrement réprimés. Les supporters violents sont identifiés, poursuivis, et les clubs sanctionnés financièrement. Au Sénégal, rien de tel. Les auteurs de ces actes savent qu’ils ne risquent rien, ce qui encourage la récidive.

Où sont les campagnes de sensibilisation sur le fair-play et le respect des biens publics ? Où sont les dispositifs de sécurité adaptés aux matchs à risque ? Les autorités attendent-ils vraiment qu’un drame humain se produise pour agir ?

Les agricultrices de Goudomp ne demandent pas l’aumône. Elles réclament justice et réparation. Pourtant, aucune voix officielle ne s’est élevée pour condamner ces actes ou leur offrir un soutien concret. Cette indifférence est une seconde violence.

Au Rwanda, après des incidents similaires dans les années 2000, les autorités ont mis en place des tribunaux spéciaux pour les violences sportives et des programmes de sensibilisation dans les écoles et les clubs. Résultat : une baisse significative des débordements. En Côte d’Ivoire, les clubs sont tenus financièrement responsables des dégâts causés par leurs supporters. Pourquoi le Sénégal ne s’inspire-t-il pas de ces exemples ?

En Europe, des pays comme l’Angleterre ont transformé leur culture footballistique grâce à des mesures strictes : interdiction de stade, amendes salées, et même peines de prison pour les auteurs de violences. Ces politiques ont permis de rendre les stades plus sûrs et de redonner au football sa dimension festive et inclusive.

L’affaire de Goudomp doit servir de déclic. Il est inacceptable que, en 2025, des citoyens voient leur moyen de subsistance détruit par des supporters irresponsables, sans que personne ne soit tenu pour responsable. Les clubs doivent être sanctionnés, les auteurs de ces actes identifiés et poursuivis, et les victimes indemnisées. Les autorités locales et nationales ont le devoir d’agir, non pas demain, mais maintenant.

Le football est une passion qui doit rassembler, pas diviser. Mais pour que cela soit possible, il faut briser le cycle de l’impunité. Sinon, le prochain match pourrait bien se terminer dans un autre champ, une autre maison, ou pire, dans le sang. Le Sénégal mérite mieux que des promesses creuses. Il mérite des actes. La balle est dans le camp des responsables, à eux de jouer.

Article opinion écrit par le créateur de contenu : Doudou Sy.
Mis en ligne : 26/09/2025

La plateforme NOTRECONTINENT.COM permet à tous de diffuser gratuitement et librement les informations et opinions provenant des citoyens. Les particuliers, associations, ONG ou professionnels peuvent créer un compte et publier leurs articles Cliquez-ici.


Réagir à cet article

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *

0 commentaires

Réagir à cet article

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *

0 commentaires

Copyright © 2023 www.notrecontinent.com

To Top