Une présomption d'innocence confisquée : Affaire Madiambal Diagne - Notre Continent
> NOTRE CONTINENT > - Justice | Par Eva | Publié le 09/10/2025 08:10:00

Une présomption d'innocence confisquée : Affaire Madiambal Diagne

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L’annonce de la saisie des biens mobiliers, immobiliers et bancaires de Madiambal Diagne, de son épouse et de ses fils, sur ordre du juge Idrissa Diarra, a de quoi indigner. Sous couvert de lutte contre la corruption, la justice sénégalaise semble s’engager dans une dérive dangereuse : celle de punir avant de juger. L’Observateur révèle que villas, immeubles, comptes et véhicules ont été saisis, alors même que Diagne, visé par un mandat d’arrêt international, n’a pas encore été entendu ni condamné.

Ce zèle judiciaire, qui frappe un homme présumé innocent, interroge sur les méthodes employées et les véritables motivations de cette procédure. Cette saisie est une atteinte aux droits fondamentaux et une manœuvre pour forcer un homme à se soumettre, quitte à bafouer les principes les plus élémentaires de la justice.

Madiambal Diagne, patron de presse et figure critique du pouvoir actuel, est accusé d’association de malfaiteurs, d’escroquerie sur deniers publics et de blanchiment de capitaux, dans le cadre d’un contrat de 250 milliards de FCFA lié à la modernisation des infrastructures judiciaires. Selon la CENTIF, des flux financiers suspects, estimés à 21 milliards de FCFA, auraient transité par ses proches et ses sociétés. Pourtant, Diagne clame son innocence et affirme vouloir se défendre depuis la France, où il s’est réfugié après avoir quitté le Sénégal malgré une interdiction de sortie du territoire. La précipitation avec laquelle ses biens ont été saisis, avant même qu’il ne soit jugé, pose question : s’agit-il vraiment de rendre justice, ou de museler un opposant gênant ?

La saisie des biens d’un individu présumé innocent, avant toute condamnation, est une violation flagrante de la présomption d’innocence, principe sacré du droit international et sénégalais. Le Code de procédure pénale sénégalais, comme la Convention européenne des droits de l’homme, rappelle que nul ne peut être traité comme coupable avant un jugement définitif. Pourtant, le juge Diarra a ordonné la saisie de tout ce qui appartient à Diagne et à sa famille, y compris les comptes de son entreprise et ceux de son épouse, sans attendre l’issue d’un procès. Cette précipitation est d’autant plus choquante que Diagne n’a pas déféré à une première convocation, ce qui ne saurait justifier une telle sanction collective. La justice ne devrait-elle pas d’abord prouver sa culpabilité avant de le priver de ses biens ?

La comparaison avec d’autres affaires similaires en Afrique est édifiante. En Guinée, des anciens ministres accusés de corruption ont vu leurs biens saisis après leur condamnation, non avant. Au Sénégal même, d’autres personnalités politiques ou économiques ont bénéficié de procédures plus respectueuses de leurs droits. Pourquoi Diagne est-il traité avec une telle sévérité ? La réponse est politique : Diagne a été un farouche opposant au duo Bassirou Diomaye Faye-Ousmane Sonko, avant leur arrivée au pouvoir. Son arrestation et la saisie de ses biens s’inscrivent dans une logique de règlement de comptes, où la justice devient un instrument de pression.

La saisie des biens de Madiambal Diagne, avant toute condamnation, est une atteinte à la présomption d’innocence et un signe inquiétant de l’instrumentalisation de la justice. Si la lutte contre la corruption est nécessaire, elle ne doit pas servir de prétexte pour piétiner les droits fondamentaux. La justice doit être impartiale, équitable et respectueuse des procédures. En agissant ainsi, le Sénégal risque de glisser vers une justice arbitraire, où la présomption d’innocence n’est plus qu’un leurre. Le message est clair : aujourd’hui Diagne, demain qui ?

Article opinion écrit par le créateur de contenu : Mame Gora.
Mis en ligne : 09/10/2025

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