Il y a exactement 80 ans, le 1er décembre 1944, le camp militaire de Thiaroye, situé en banlieue de Dakar, fut le théâtre d’un massacre brutal et injustifiable. Des centaines de Tirailleurs sénégalais, des soldats africains ayant combattu pour la France durant la Seconde Guerre mondiale, furent abattus par l’armée française.
Ces hommes, qui avaient sacrifié leurs vies pour libérer une métropole occupée par les nazis, réclamaient simplement les paiements qui leur étaient dus après leur démobilisation.
Une promesse non tenue
Ces soldats, faits prisonniers par les Allemands après la défaite française de 1940, avaient été libérés en 1944. À leur retour en Afrique, ils furent regroupés au camp de Thiaroye pour organiser leur répartition dans leurs pays respectifs. Pourtant, leur retour fut marqué par une profonde désillusion.
Selon une circulaire du gouvernement français, les tirailleurs devaient percevoir leur solde en deux étapes : un quart avant leur départ de France et le reste à Dakar. Mais cette promesse resta lettre morte. À Thiaroye, les tirailleurs, désabusés, exigèrent leur dû. Le 27 novembre 1944, un premier groupe de 500 hommes destinés à Bamako refusa de partir sans être payé.
Le général Marcel Dagnan, en charge de la division Sénégal-Mauritanie, intervint personnellement. Dans ses échanges, il se heurta à la fermeté des tirailleurs, qui réclamaient seulement ce que leurs camarades français avaient déjà reçu. Humilié et déterminé à « rétablir l’ordre », Dagnan opta pour une réponse violente.
Le jour du massacre
Le 1er décembre, Dagnan donna l’ordre d’encercler le camp avec des troupes armées. Les tirailleurs, rassemblés sur l’esplanade, furent pris au piège. Malgré l’absence d’une quelconque rébellion armée, les soldats français ouvrirent le feu.
Le bilan exact demeure incertain, les chiffres officiels ayant probablement été maquillés pour éviter un scandale international. Les estimations varient entre 1200 et 1700 victimes, enterrées dans une fosse commune au camp même.
Un crime oublié, une mémoire à raviver
Le massacre de Thiaroye incarne la brutalité d’un système colonial qui n’hésitait pas à sacrifier ceux qui avaient pourtant tout donné pour la défense de la France. Ce drame fut longtemps occulté dans les récits officiels, et les victimes n’ont jamais reposé dans un lieu digne de leur sacrifice.
Aujourd’hui, 80 ans après, le massacre de Thiaroye reste un symbole puissant des luttes pour la reconnaissance et la justice. Il rappelle l’urgence de réexaminer les liens entre la France et ses anciennes colonies, de reconnaître les injustices passées et d’honorer la mémoire de ceux qui ont été trahis par un système pour lequel ils s’étaient battus.
Article écrit par : Emmanuel Ndour
Mise en ligne : 01/12/2024
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