Sam Nujoma, premier président de la Namibie et figure emblématique de la lutte pour l’indépendance, est décédé samedi à l’âge de 95 ans, a annoncé dimanche la présidence namibienne.
« Notre père fondateur a vécu une vie longue et déterminante au cours de laquelle il a servi de manière exceptionnelle », indique le communiqué officiel, exprimant « chagrin et tristesse ». Une période de deuil national sera décrétée, et les arrangements funéraires seront précisés ultérieurement.
À la tête de la South West Africa People’s Organization (Swapo), le mouvement de libération qu’il a cofondé en 1960, Sam Nujoma a mené un combat acharné contre l’administration sud-africaine qui contrôlait la Namibie depuis la Première Guerre mondiale. Après des décennies de lutte, il parvient en 1990 à arracher l’indépendance du pays, mettant fin à la domination de l’apartheid.
Devenu président, il s’efforce de rassembler une nation marquée par la ségrégation, unifiant une population de deux millions d’habitants aux origines ethniques diverses. Son charisme et son autorité naturelle lui valent le surnom de « Vieux », tandis que sa barbe fournie rappelle celle du révolutionnaire cubain Fidel Castro.
Resté au pouvoir pendant quinze ans, Sam Nujoma n’a pas hésité à modifier la Constitution pour s’octroyer un troisième mandat, avant de se retirer en 2005 à l’âge de 75 ans, désignant son dauphin à la tête du pays. S’il a officiellement quitté la scène politique, il est resté influent en coulisses, n’hésitant pas à intervenir sur les grandes questions nationales et panafricaines.
Lors de l’une de ses dernières apparitions publiques en 2022, il apparaissait poing levé, lâchant son déambulateur pour appeler à poursuivre le combat pour « les idéaux panafricains ».
Figure respectée, Nujoma n’a jamais mâché ses mots, notamment contre les « colons blancs » et les « néo-impérialistes ». En 2021, il avait rejeté l’offre de réparation de plus d’un milliard d’euros proposée par l’Allemagne pour le massacre des Hereros et des Namas au début du XXe siècle, qu’il jugeait « terriblement insignifiante ».
Sur le plan diplomatique, il s’est affiché aux côtés de leaders controversés comme Robert Mugabe, soutenant sa réforme agraire visant à exproprier les fermiers blancs. Il a aussi maintenu des liens étroits avec des régimes comme ceux de Cuba, de la Libye, de l’Iran et de la Corée du Nord.
Conservateur dans ses prises de position, il s’est ouvertement opposé aux droits des minorités sexuelles, qualifiant l’homosexualité de « folie ».
Né le 12 mai 1929 dans une famille de paysans, Sam Nujoma est l’aîné de dix enfants. Très jeune, il quitte son village pour travailler à Walvis Bay, où il découvre la dure réalité de la discrimination raciale.
Devenu syndicaliste et militant indépendantiste, il est contraint à l’exil en 1960, laissant derrière lui sa femme et ses quatre enfants. Depuis l’étranger, il organise la lutte armée de la Swapo, qui déclenche la guerre d’indépendance en 1966. Ce conflit, qui dure plus de vingt ans, fait plus de 20.000 morts.
À son arrivée au pouvoir, il fait le choix du pragmatisme : refusant d’instaurer une commission vérité et réconciliation, il intègre les anciens escadrons de la mort pro-sud-africains au sein de l’armée et de la police nationale.
Article écrit par : Fatoumata Diop
Mis en ligne : 09/02/2025
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