L’affaire pourrait prêter à sourire si elle ne touchait pas au cœur névralgique des finances publiques. À 27 ans, Moctar Sall, vendeur de chapelets connu sur l’avenue Blaise Diagne, a été placé sous mandat de dépôt dans le cadre d’une enquête pour association de malfaiteurs et vol en réunion, commis la nuit avec escalade et usage de moyens roulants. En toile de fond, un cambriolage aussi ciblé qu’inquiétant au siège de la Direction de l’informatique du Trésor public, rapporte Libération.
Le vol, commis dans la nuit du 3 mars dernier, vise des bureaux stratégiques du Trésor, situé au 15 rue Malenfant. Trois locaux sont visités, avec une attention toute particulière pour le bureau n°22, dédié à l’administration des bases de données.
Deux ordinateurs, dont un HP et une tablette Surface, y disparaissent. Dans le bureau n°18, un autre HP et une somme de 200 000 F CFA s’envolent. Le bureau n°20, lui aussi forcé, n’a pu faire l’objet d’un inventaire : son occupant était récemment décédé.
Le mode opératoire intrigue autant qu’il inquiète : escalade, intrusion par balcon et guidage téléphonique en temps réel. L’auteur présumé du cambriolage, Moctar Sall, décrit un scénario rocambolesque dans lequel il grimpe à un arbre, atteint le premier étage, puis rejoint le deuxième par un balcon, tout cela sous la direction de son mystérieux complice, surnommé « Malaw ».
Interpellé, le jeune homme ne nie pas sa participation mais jure avoir été manipulé. Il affirme que « Malaw », qu’il décrit comme un habitué du quartier, lui aurait proposé 120 000 F CFA pour une « mission facile » dans un bâtiment prétendument désaffecté. Il prétend également ne pas connaître la nature des lieux visités, et clame avoir paniqué en réalisant, après coup, qu’il s’agissait du Trésor public.
Selon ses dires, « Malaw » serait venu récupérer les appareils au petit matin, à proximité de l’école Saint-Michel, dissimulé derrière une casquette, un masque et un blouson. Depuis, silence radio : le complice serait injoignable.
Pour les enquêteurs, le doute est permis. Et les questions fusent : pourquoi ces ordinateurs précisément ? Comment « Malaw » connaissait-il aussi bien les lieux ? L’hypothèse d’un cambriolage purement opportuniste peine à convaincre. Des pistes plus graves émergent : manipulation ou suppression de données sensibles ? Complicité interne ?
Déjà fiché pour des faits similaires, Moctar Sall évoque désormais un envoûtement, cherchant peut-être à esquiver les implications d’un acte potentiellement commandité.
Face aux nombreuses zones d’ombre, l’affaire pourrait connaître un tournant. Une délégation judiciaire est à l’étude, apprend-on de Libération, pour faire la lumière sur les dessous de ce vol aux allures d’opération ciblée. L’enquête s’attache désormais à identifier le mystérieux « Malaw », à déterminer ses motivations réelles, et à évaluer l’ampleur des dommages causés à l’architecture numérique du Trésor.
En attendant, Moctar Sall reste en détention, et le cambriolage du 3 mars continue d’alimenter les spéculations. Car au-delà du vol, c’est la sécurité d’un pan entier de l’appareil étatique qui est remise en question.
Article écrit par : Mariama Ba
Mis en ligne : 23/04/2025
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