La récente sortie de l’Alliance des syndicats autonomes de la santé, « And Gueusseum », relatée dans L’Observateur, fait froid dans le dos. En annonçant un nouveau plan d’action et en réaffirmant leur intention de maintenir la pression sur le gouvernement, ces professionnels de santé semblent oublier l’essentiel : leur mission première est de soigner, pas de punir. Si le droit de grève est légitime dans toute démocratie, son usage dans les services de santé, surtout dans des conditions aussi rigides, devient moralement discutable.
Depuis plusieurs mois, le secteur de la santé au Sénégal est en proie à une agitation constante. Le syndicat « And Gueusseum » dénonce un manque de considération de la part du ministère de la Fonction publique et une absence de dialogue sincère. Ils revendiquent des acquis, un meilleur traitement, et des engagements non tenus. Sur le fond, leur demande de dialogue est légitime. Mais sur la forme et dans la méthode, la ligne rouge est franchie. Car à chaque mouvement de grève, ce sont des vies humaines qui sont suspendues, abandonnées, parfois perdues.
Qu’on le veuille ou non, un médecin, une infirmière, un aide-soignant, n’est pas un fonctionnaire comme un autre. Il a entre ses mains la vie des autres. Lorsqu’il choisit d’entrer dans ce métier, il devrait le faire en conscience, avec un sens profond de l’éthique et de la responsabilité. On ne devient pas médecin par intérêt, mais par vocation. C’est ce qui rend cette profession si particulière. À partir de là, peut-on raisonnablement accepter qu’un malade soit refusé dans un hôpital parce qu’un mouvement social est en cours ? Pire encore, qu’on lui exige de l’argent avant même de jeter un regard sur sa douleur ?
Si j’étais le ministre de la Santé, j’irais jusqu’au bout : toute personne du secteur de la santé qui déserte son poste au détriment des patients devrait être exclue de l’ordre professionnel. On ne joue pas avec la santé publique. D’autres femmes et hommes, parfois bien plus compétents et passionnés, attendent de pouvoir exercer. Il faut remettre la vocation au cœur du métier. Il est temps de créer un cadre légal rigoureux interdisant toute grève dans les services essentiels comme les urgences, la maternité ou les soins intensifs. Car l’État a aussi la responsabilité de protéger ses citoyens face à une prise d’otage sociale.
Dans plusieurs pays comme la France ou l’Allemagne, les grèves dans le secteur de la santé sont strictement encadrées. Un service minimum est obligatoire, et dans certains cas, des réquisitions sont possibles. Au Japon, le personnel hospitalier ne fait jamais grève. Le dialogue social s’y fait autrement, par respect du patient. Pourquoi ne pas nous en inspirer ?
Oui, les revendications peuvent être légitimes. Oui, les professionnels de santé méritent respect et reconnaissance. Mais non, la vie humaine ne peut pas être la monnaie d’échange dans des rapports de force. Il faut une réforme profonde du droit de grève dans le secteur de la santé. Trop de familles ont perdu un proche pour une simple grève de garde ou un retard dans la prise en charge. Cela doit cesser.
J’en appelle aux autorités sénégalaises : encadrez fermement les mouvements sociaux dans le domaine de la santé. Et à vous, soignants engagés, souvenez-vous du serment d’Hippocrate, de la vocation première qui vous anime. Le peuple sénégalais mérite une santé humaine, digne et responsable.
Article opinion écrit par la créatrice de contenu : Eve Sagna.
Mis en ligne : 11/06/2025
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