Alors que l’attention médiatique mondiale reste suspendue aux tensions croissantes entre Israël et l’Iran, et que Donald Trump tergiverse sur une éventuelle implication militaire américaine, le drame se poursuit dans l’ombre à Gaza.
Un nouveau carnage a secoué l’enclave palestinienne mardi : 59 morts, 200 blessés. Des civils, pour la plupart, fauchés alors qu’ils attendaient de la farine devant un centre d’aide humanitaire à Khan Younès, dans le sud de la bande de Gaza. Tirs de chars, frappes de drones — les témoignages et les images qui émergent dessinent les contours d’un massacre à ciel ouvert.
Dans un cri d’alarme, Haaretz, quotidien israélien d’opposition, relaye le désespoir d’un médecin américain en poste à l’hôpital Nasser : « À chaque distribution de nourriture, on sait qu’il va y avoir un massacre. » Depuis un mois, Israël a instauré un nouveau mécanisme de distribution alimentaire. Il devait répondre à l’urgence humanitaire.
Il est devenu, selon les critiques, un système cynique et meurtrier. Les points de ravitaillement, désormais craints autant qu’espérés, se transforment en zones de tir. Et les autorités israéliennes, toujours selon Haaretz, persistent à défendre un dispositif qui échoue sur tous les fronts : ni la famine ne recule, ni la sécurité des civils n’est garantie, ni même le risque d’approvisionnement du Hamas n’est écarté. « Le gouvernement israélien joue avec la vie des Gazaouis », dénonce le journal, appelant l’administration Trump à cesser de détourner le regard et à faciliter l’acheminement de l’aide par l’ONU. Toute autre voie, affirme-t-il, « constitue un crime de guerre ».
Depuis Londres, The Guardian fustige une communauté internationale « anesthésiée ». La fureur contre l’Iran a éclipsé les cris étouffés de Gaza. « Alors que la planète appelle à la désescalade, la dévastation se poursuit. » Le quotidien rappelle qu’Israël, en tant que puissance occupante, est tenu par la quatrième Convention de Genève d’assurer l’accès à la nourriture, à l’eau et aux soins médicaux. Une obligation bafouée au quotidien.
Car à Gaza, « ce ne sont pas seulement les infrastructures qui s’effondrent, mais le principe même selon lequel la guerre doit avoir des règles ».
Le Monde dresse un constat plus large et inquiétant : celui d’un monde où le droit international ne fait plus loi, où la force prime. Depuis l’invasion américaine de l’Irak en 2003, justifiée par un mensonge d’État, les digues ont cédé. Poutine s’y est engouffré en Géorgie, puis en Ukraine. Aujourd’hui, Netanyahu, sûr de la puissance militaire d’Israël, franchit à son tour les lignes rouges en toute impunité.
« Il ne s’agit pas seulement de rappeler des principes abstraits », souligne le quotidien parisien. « L’histoire enseigne que les interventions militaires sans légitimité internationale sèment le chaos, alimentent les insurrections, brisent les sociétés. »
L’érosion du droit international ne menace pas seulement les peuples sous les bombes. Elle menace l’équilibre du monde. Le droit n’est pas un luxe, mais un garde-fou. Un rempart contre l’arbitraire. Son affaiblissement progressif, constate Le Monde, ouvre la voie à un ordre où seule compte la loi du plus fort. Dans ce monde-là, les famines deviennent des armes, les aides humanitaires des leurres, et les civils des cibles.
Pendant ce temps, à Khan Younès, les corps sont enterrés à la hâte. Et les survivants attendent encore de la farine.
Article écrit par : Amadou Diop
Mis en ligne : 19/06/2025
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